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Mamoudzou

Le grand chef de la police nationale a parlé sécurité à Mayotte

Dans la suite logique du porte-à-porte ministériel des parlementaires mahorais sur l’insécurité, il fut encore question de méthode, mais cette fois avec Frédéric Veaux. Avec un objectif, mettre ces jeunes hors d’état de nuire. "Il faut changer de doctrine", réclame le sénateur Thani Mohamed Soilihi. 

Jusqu’à présent, focus avait été fait sur la sécurité en zone gendarmerie. La persistance d’actes violents de bandes de délinquants malgré l’envoi que Gérald Darmanin juge massif de forces de l’ordre, « davantage qu’à Marseille », avait incité le directeur général de la gendarmerie nationale à se rendre par deux fois sur le territoire, « nous allons changer de modalités d’action », nous avait expliqué Christian Rodriguez, annonçant un déploiement de ses hommes à la fois sur les axes routiers, à la fois sur les hauteurs. Il faut dire que l’arrêt de l’hélicoptère, soit disant pour maintenance de plusieurs semaines, au moment où la délinquance frappe le plus, est handicapant. « Il nous permettrait de visualiser parfaitement le déplacement des bandes », nous glissait avec regret un gendarme mobile. On pourrait invoquer un manque de chance, mais cela met plutôt en évidence la nécessité d’un 2ème appareil, ou la mise en place d’un partenariat avec l’île de La Réunion pour suppléer.

Après avoir été reçu au ministère des Armées pour évoquer sa contribution à la résolution des problématiques de l’île, cette fois, c’est pour parler de la zone police, sur le Grand Mamoudzou, que le sénateur Thani Mohamed Soilihi frappait jeudi dernier à la porte du ministère de l’Intérieur. Il était reçu par Frédéric Veaux lui-même, homonyme de l’ancien préfet de Mayotte. Le Directeur général de la Police nationale avait fait venir ses proches collaborateurs pour évoquer les pistes de travail sur la problématique sécuritaire.

Dispersion n’est pas raison

Les jeunes s’entrainent à supporter les gaz lacrymogène

Nous avons interrogé le sénateur mahorais à l’issue, alors que la population demande davantage de protection. Il s’agissait pour Thani Mohamed Soilihi de comprendre l’écart entre la présence qu’on nous annonce massive des forces de l’ordre, et des violences toujours plus nombreuses. Une fois l’opération Wuambushu terminée, Mayotte retrouvait ses séquences de délinquance. Il faut donc anticiper sur les prochaines, en cherchant à optimiser les forces de l’ordre présentes.

« Tout d’abord, j’ai demandé au Directeur général de la Police nationale un changement de doctrine lors des interventions, en lui expliquant que les gaz lacrymogènes nuisent davantage aux habitants qu’aux délinquants. Ça les excite, ils s’entrainent même à les supporter et ils se filment ! ». « Pas facile ! », répondait en substance le big boss de la police : « Ils disent qu’ils utilisent cette méthode pour les disperser. J’ai alors indiqué que le précédent DTPN Laurent Simonin avait doté le commissariat d’une arme semblable au fusil à pompe, qui permet de viser sans tuer, seuls des policiers parfaitement formés peuvent l’utiliser. »

La technique de dispersion est sans doute adaptée sur des faits uniques, comme lors d’une manifestation qui dérape en métropole, mais pas des évènements récurrents comme des jeunes qui reviennent quotidiennement à l’assaut des automobilistes.

« On sait où ils sont »

Police, Mayotte
Valoriser les bons éléments

Deuxième axe d’amélioration, « valoriser les agents qui ont prouvé leur efficacité sur le terrain, et il y en a plusieurs. »

Ensuite, le sujet des retours des policiers vers leurs centres d’intérêt matériel et moraux que peuvent être leurs territoires d’origine était de nouveau abordé. Une vieille requête qu’avait porté le président Hollande en 2014 à La Réunion, qui défendait la prise en compte le centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) « afin de favoriser le retour des fonctionnaires originaires ». Pour le sénateur, « c’est un gage d’efficacité. Ils vont se fondre dans le paysage, être informés rapidement de ce qui se trame. » Une logique qui l’incite à demander une meilleure coordination avec la police municipale. « Tout le monde dit ‘ces voyous, on sait où ils sont’, ça n’est donc pas impossible de neutraliser leurs actions. »

Ce qui suppose un changement de comportement chez les policiers municipaux aussi en raison justement de leur proximité avec la population. A Koungou en 2011, certains avertissaient les gardiens des barrages de l’arrivée de la gendarmerie.

L’échange dérivait sur la nature des interpellations, « ce sont les chefs qu’il faut attraper, c’est la tête du serpent qu’il faut couper et non pas les trouffions qui l’accompagnent parce qu’ils n’ont pas d’autres activités », réclamait l’élu mahorais.

L’important pour lui est donc de s’attaquer aux problèmes à la racine et d’aller chercher les jeunes en passant notamment par les circuits locaux avec des exigences de résultat,  « si on travaille vraiment dans ce sens, on va voir la situation s’apaiser rapidement. Je suis d’accord pour dire que le gouvernement met beaucoup de moyens, mais il faut les utiliser de manière efficace. Ce n’est pas parce qu’on met des millions que ça marche, comme je le dis toujours, la sécurité c’est une obligation de résultat, pas de moyen. »

Un entretien qu’il juge positif, « il y a une prise de conscience du problème de Mayotte ».

Anne Perzo-Lafond

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