Ce lundi matin, les autorités du port de plaisance de Mamoudzou, où les voyageurs avaient jusqu’à ce week-end la possibilité de prendre des « taxi boat », ont décidé de fermer. La raison ? Un afflux de voyageurs paniqués à l’idée de ne pas pouvoir prendre leur avion. Devant le mouvement de foule et l’énervement général, le maître du port a préféré fermer. D’autant plus que, de l’autre côté à Dzaoudzi, les manifestants attendaient les « taxi boat » au tournant pour les empêcher d’accoster. « Hier (NDLR : dimanche) nous sommes allés voir les skippers pour leur demander de venir nous demander l’autorisation pour faire passer tel ou tel voyageur. Ils ont dit « oui, oui », mais ce matin ils sont passés sans venir nous parler. Nous avons pris cela pour du mépris, car ce blocage, nous le faisons pour tout le monde ! Toute le monde souffre de l’insécurité sur cette île ! C’est pour ça que nous les avons bloqués à Dzaoudzi », explique Sylviane Amavi, porte-parole du collectif des citoyens de Petite-Terre. « Si des voyageurs veulent traverser pour prendre leur avion, nous les laisserons passer, mais il faut qu’ils nous montrent leur billet avant. Nous refusons que nos blocages soient mis en péril par des personnes qui nous mentent juste pour pouvoir faire leur vie comme si de rien n’était. La situation est grave et tout le monde devrait se sentir concerné par ce qu’il se passe à Mayotte ! », ajoute-elle. Une seule barge est laissée en fonction pour les urgences médicales ou sécuritaires et Sylviane Amavi nous a déclaré que les agents du STM, solidaires du mouvement, coopéraient avec les manifestants.
Le port de plaisance a rouvert aux alentours de 14h et les navettes de Mayotte Explo ont pu reprendre les traversées. Mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous avons eu écho de nouvelles tensions entre les manifestants et des voyageurs ayant traversé sans prendre contact avec les manifestants. Toutefois, étant donné que personne ne souhaite voir son numéro de téléphone personnel inscrit dans les journaux, comment contacter ces manifestants quand on ne les connait pas ? C’est la question que nous avons posé à Sylviane Amavi. Consciente du problème, elle nous a répondu que les Forces Vives communiqueraient désormais aux rédactions l’horaire unique de la navette autorisée à faire traverser les voyageurs ayant un avion à prendre. « Il faudra être très vigilant et venir traverser 5 à 6 heures avant l’horaire prévu de l’avion », prévient Sylviane Amavi. Nous communiquerons prochainement dans nos colonnes les horaires des navettes autorisées. Par ailleurs, le ravitaillement, le gaz et les éboueurs sont autorisés à passer.
Une charte commune, mais à chaque barrage des nuances dans les règles
Les Forces Vives ont édité ce dimanche une nouvelle charte des barrages. Contrairement à ce que prétend la rumeur, davantage de personnes sont autorisées à passer sur présentation d’un justificatif. Toutefois, certains barrages qui n’avaient été que « filtrants » jusqu’à présent, comme celui de Passamaïnty, sont désormais complètement hermétiques à toute personne non signalée dans la charte. Des exceptions sont possibles, mais seulement avec de la communication. Tous les « forceurs de barrages » s’exposent à de sérieux problèmes au vu de la colère noire des barragistes qui refusent d’ailleurs pour la plupart d’être filmés ou photographiés. « On a eu trop de problèmes avec la justice, nous refusons donc désormais les images ! », nous explique Charia, la coordinatrice du barrage de Passamaïnty. Par ailleurs, d’autres barragistes nous ont confié craindre la manipulation de leur image. « Parfois, les médias coupent les photos ou les vidéos de manière à nous faire passer pour « les méchants » », nous ont-ils affirmé. « Certains balancent nos photos sur les réseaux sociaux, sans aucune explication, c’est inadmissible, on préfère donc ne pas se faire photographier du tout ! », ont ajouté d’autres. A Passamaïnty, en tout cas, la charte est scrupuleusement respectée, Charia y veille ! A condition toutefois d’avoir déjà pu passer le nouveau barrage de Doujani, érigé ce lundi matin. Toute la zone entre Doujani et Tsoundzou est « barricadée » sans compter qu’un autre barrage attend les automobilistes à Tsararano. Les piétons quant à eux sont toujours libres de circuler entre les barrages.
En direction du nord depuis Mamoudzou, aucun barrage des Forces Vives n’est érigé jusqu’à Bandraboua. « La zone qui s’étend de Kaweni à Dzoumogné est tenue par les délinquants. C’est une zone de non-droit. Le barrage de Dzoumogné a été levé et n’a pas été reformé donc le premier barrage vers le nord est à Bandraboua », nous précise Sylviane Amavi. Mise face aux échos que nous avons reçu de certains professionnels de santé qui n’ont pas pu traverser pour aller en Petite-Terre, ou l’inverse, la porte-parole du collectif nous précise : « Les personnels médicaux du CHM et du privé autorisés à passer sont les médecins, les infirmières et les aides-soignantes. En revanche, les personnels du CHM doivent utiliser les navettes du CHM et non leur véhicule personnel. Nous contrôlons tous les passages pour éviter les mensonges de personnes qui utilisent leur carte professionnelle à des fin personnelles. Chaque personne souhaitant traverser doit d’abord venir en discuter avec nous ! ». A bon entendeur !
Nora Godeau