Ne parlera-t-on plus le shimaoré, le shibushi (kibouchi) ou encore le swahili un jour à Mayotte ? Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (Unesco), « Au moins 40% des plus de 6.700 langues parlées dans le monde sont menacées d’extinction à long terme, faute de locuteurs. Cela aurait de graves conséquences pour la diversité culturelle et mettrait en péril les savoirs et savoir-faire séculaires qui pourraient être décisifs dans les efforts de l’humanité pour résoudre les défis de ce siècle, notamment le changement climatique et la perte de biodiversité ». De nombreuses langues pourraient ainsi disparaitre face à un avenir incertain. « Toutes les deux semaines, il y a une langue autochtone qui disparaît », s’alarmait alors en 2019 Ernesto Ottone Ramirez, sous-directeur général pour la culture de l’Unesco.
Fort de ce constat, L’Unesco a lancé il y a près de deux ans la Décennie internationale des langues autochtones (2022-2032), « qui vise à attirer l’attention du monde sur la perte critique des langues autochtones et sur le besoin urgent de les préserver et de les revitaliser ».
Si les langues régionales d’Outre-mer sont menacées c’est aussi semble-t-il parce que le nombre de locuteurs diminue, mais aussi du fait de leur faible intégration dans les programmes scolaires. Même si la tendance semble s’inverser puisqu’une proposition de loi pour intégrer les langues régionales dans les troncs communs des programmes scolaires a été déposée en fin d’année dernière.
Pour rappel, à Mayotte il y a un fort taux d’illettrisme et d’analphabétisme, près de 50% des jeunes de 16 à 18 ans seraient en situation d’illettrisme contre 9% des jeunes métropolitains. Le taux d’illettrisme et d’analphabétisme de la population approcherait, lui, les 60%.
La hausse du niveau des mers : une menace pour la transmission des langues
Selon certaines études, il s’élèverait aujourd’hui de près de 4 millimètres par an. Des zones entières de Guadeloupe, de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy, de Mayotte ou de La Réunion pourraient ainsi ne plus être habitables à l’horizon 2040-2050. L’exemple de la commune de Bouéni avec des habitations grignotées par la montée des eaux et l’avancée inexorable de la mer en est malheureusement le triste exemple. Le changement climatique risque d’impacter, dans le mauvais sens, la vie des populations ultramarines. Aussi, si on ne préserve pas certains endroits, tout ce qui les constitue est voué à disparaître avec la crise climatique et sans doute au premier rangs desquels les langues.
Audrey Azoulay, la Directrice générale de l’Unesco déclarait alors en décembre 2022, « Le langage est ce qui fait de nous des êtres humains. Lorsque la liberté des peuples d’utiliser leur langue n’est pas garantie, cela limite leur liberté de pensée, d’opinion et d’expression, ainsi que leur accès aux droits et aux services publics. Cette Décennie doit accélérer la mobilisation de la communauté internationale pour sauvegarder durablement les langues autochtones »
Sources : outremers360, Unesco
B.J.