Crise de l’eau : un réseau sous surveillance

Les médias étaient conviés par l’ARS et la préfecture à un TP sur le prélèvement de l’eau à Kangani. L’occasion de faire un point sur l’état de la qualité de l’eau après l’alerte lancé sur 9 villages la veille. Le préfet répondait aux questions quelques minutes après avoir échangé avec le ministre des Outre-mer.

A la suite du communiqué portant sur les « non-conformités » de deux analyses de l’eau ce mercredi soir autour des deux zones Sohoa et Acoua, l’ARS Mayotte et le préfet donnent quelques précisions. Et autant le faire sur le terrain lors d’un prélèvement d’eau chez un particulier, un des 700 contrôles effectués par l’ARS chaque année. Il faut préciser qu’elle ne vient qu’appuyer un dispositif déjà en place, « l’autosurveillance de la qualité de l’eau est effectuée en continu par la SMAE. L’ARS de Mayotte ne vient qu’en renfort en contrôlant l’eau en provenance des captages, de la distribution et des usines de production », détaille Anil Akbaraly, Direction du Pôle santé environnement de l’ARS. Un programme qui est défini par arrêté ministériel et précisé dans un arrêté préfectoral.

En cette période de crise, l’ARS avait averti doubler les contrôles, et c’est effectif : « Nous passons de 20 à 40 par semaine et sur l’ensemble des 18 Unités de distribution ». Pour comprendre pourquoi certains villages* étaient concernés par la non-conformité de leur eau du robinet et pas d’autres, il faut comprendre ce qu’est une Unité de distribution : « L’eau de différents sites de production comme les forages, les rivières, etc. arrive dans un même réservoir, et est ensuite distribuée sur le réseau ». Ce sont donc l’ensemble des villages concernés par cette Unité territoriale de distribution qui sont touchés.

Anil Akbaraly et Maxime Ransay-Colle répondaient aux nombreuses interrogations suscitées par le contexte

Touchés par quoi d’ailleurs ? Sur quoi portait la non-conformité ?, avons-nous interrogé le docteur Maxime Ransay-Colle, médecin de l’ARS : « Nous avons retrouvé des entérocoques et des coliformes, des bactéries digestives. Ce qui n’induit pas forcément un risque sanitaire, elles ne sont pas forcément pathogènes, mais c’est le témoin d’une dégradation, il faut donc faire bouillir l’eau. »

Le robinet passé au chalumeau

Pourquoi préconiser de faire bouillir l’eau sur ces villages et non pas l’interdire à la consommation comme ce fut le cas lors de la présence de manganèse en 2021 ? « Parce que le manganèse, c’était une pollution chimique, contrairement à celle-ci qui est bactérienne, répond Olivier Brahic, directeur général de l’ARS Mayotte, dans le premier cas, vous pouvez toujours faire bouillir, le manganèse restera, alors que 100% des germes sont morts dans une eau qui a bouilli. »

La petite troupe se faufile alors dans la maison d’un particulier à Kangani, jusqu’au robinet de la cuisine pour assister à une opération de prélèvement par les agents de la Lutte Antivectorielle (LAV) de l’ARS. Méticuleusement, le robinet sera désinfecté, puis passé au chalumeau pour le stériliser, et après avoir fait couler l’eau stagnante pendant une petite minute, elle est prélevée dans deux flacons, aussitôt déposés dans une glacière. « Le premier est destiné à une analyse bactériologique par un laboratoire sur place dont les résultats tomberont dans 48h, l’autre a été rincé 3 fois car destiné aux analyses chimiques par le laboratoire de La Réunion Microlab, dont les résultats tomberont d’ici 10 jours », explique Anil Akbaraly.

La stérilisation au chalumeau fait partie du cérémonial

L’enjeu c’est donc « la réactivité », ces délais semblant incompressibles, « c’est ce que nous avons fait ce mercredi soir aussitôt les résultats connus. Nous allons poursuivre les analyses sur ces deux circuits, Sohoa et Acoua. »

La gratuité des factures en débat

Présent lors de ce prélèvement, le préfet s’éclipse dix minutes, téléphone en main. « Je répondais au ministre des Outre-mer qui boucle les crédits notamment sur les acquisitions de bouteilles. Mais en face, nous avons besoin du concours des collectivités locales, et surtout, il faut que la SMAE et LEMA fassent des propositions si on veut décliner les mesures du ministre. »

Interpellé sur une des demandes de l’intersyndicale sur la gratuité des factures d’eau, surtout quand celle-ci n’est pas conforme, Thierry Suquet ne bottait pas en touche : « C’est un sujet actuellement en débat notamment avec LEMA et la SMAE ».

Répondant que la persistance de branchements illégaux empêchant notamment des agriculteurs déclarés de produire, et que serait venu constater la police de l’eau sans plus d’action, le préfet répondait que dès qu’il aurait le rapport, « une action sera menée pour détruire ces détournements de la ressource ».

Aux côtés d’Olivier Brahic, Thierry Suquet répondait sur la gratuité des factures d’eau

Enfin, sur l’assurance que nous avait donné le ministre d’un suivi des mesures, il ne s’agira pas comme en 2018 d’un site où étaient cochées les actions les unes après les autres, « mais le ministre m’a demandé des tableaux de suivi des travaux, que nous élaborons au sein d’une Cellule de crise qui est désormais quotidienne. »

Anne Perzo-Lafond

* Acoua village, Sohoa, Chiconi, Coconi, Ongoujou, Sada, Ouangani, Poroani, Miréréni (commune de Chirongui)

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