Le ministère des outre-mer a cofinancé cette enquête « Violences et rapports de genre » (VIRAGE) avec le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Elle porte sur trois territoires ultramarins : La Réunion, la Guadeloupe et la Martinique. Ces premiers résultats portent sur le territoire de La Réunion.
Près de quinze ans après l’enquête ENVEFF de 2002 et dans la suite de l’enquête menée en 2015 dans l’Hexagone, VIRAGE outre-mer actualise et approfondit les connaissances statistiques sur les violences sexistes et sexuelles. Outre une extension de son champ d’investigation à la population masculine, elle mesure ainsi la nature de ces faits (ou actes) de violences commis (à l’encontre des femmes et des hommes) dans différents espaces, au cours des 12 derniers mois et tout au long de la vie.
« Les résultats de l’enquête confirment la nécessité de poursuivre et amplifier les actions contre ce phénomène dans ces territoires, tant dans la sphère publique que privée. Ils montrent également une progression de la libération de la parole des victimes, qui résulte notamment d’une action résolue de l’ensemble du Gouvernement mobilisé en ce domaine. La lutte contre les violences sexistes et sexuelles figure au cœur de la stratégie de la « Grande cause du quinquennat », avec une attention particulière à la situation dans les outre-mer. L’ambition est d’apporter une réponse adaptée et la plus efficace possible à ces violences dans ces territoires », indique le ministère des Outre-mer.
Avant de généraliser cette étude à l’ensemble des outre-mer, comme a l’air de l’indiquer le titre « Violences sexistes et sexuelles dans les territoires d’outre-mer », il aurait fallu la mener également à Mayotte et en Guyane. A noter que, davantage qu’en métropole, les femmes « victimes de propositions sexuelles insistantes » ou de « pelotage », connaissent leurs auteurs (prés de la moitié).
Violences dans les espaces publics au cours des 12 derniers mois précédant l’enquête
– Les espaces publics demeurent plus sexistes qu’en métropole : deux fois plus de femmes déclarent avoir été sifflées et interpellées sous prétexte de drague (36%), trois fois plus rapportent des propositions sexuelles insistantes malgré leur refus (3%), mais elles ont subi dans les mêmes proportions (2 %) du pelotage sexuel (attouchements seins, fesses, baisers forcés).
– La plupart des faits subis, soit 77%, se sont déroulés dans des lieux fréquentés régulièrement par les femmes (par exemple des centres commerciaux, des transports publics…) et dans la journée (62%). Les auteurs sont quasi exclusivement des hommes.
– Si les femmes sont principalement victimes d’inconnus, les proportions d’auteurs connus sont plus importantes qu’en métropole, notamment en ce qui concerne les propositions sexuelles insistantes (41 d’inconnus %) et le pelotage (59 % d’inconnus).
– Près d’une femme sur deux en emploi ou au chômage a subi au moins un fait de violences dans les espaces publics contre un tiers des femmes inactives.
– L’effet de l’âge est particulièrement marqué : les jeunes femmes entre 20 et 29 ans sont les plus exposées aux insultes (15 % contre 9 % de l’ensemble des femmes), aux sifflements ou interpellations sous un prétexte de drague (55 % contre 36 % pour l’ensemble des femmes), et au fait d’être suivie (7 % contre 5 % de l’ensemble des femmes).
Violences au travail au cours des 12 derniers mois précédant l’enquête
– Une femme sur quatre a subi des faits de violences au travail contre une femme sur cinq en métropole. Les salariées de l’Etat, 35 % d’entre elles, sont davantage victimes.
– 22 % des femmes ont déclaré des faits de violences psychologiques, violences les plus courantes. Elles ont augmenté depuis l’enquête Enveff en 2002 et sont 1,5 fois plus élevées qu’en Métropole. Elles concernent principalement les femmes cadres et elles sont avant tout le fait de la hiérarchie (45 %) et des collègues (40 %).
– Une femme sur vingt est victime de harcèlement sexuel au travail, proportion plus élevée qu’en métropole (une sur trente) et qui a quintuplé depuis l’Enveff en 2002. Sans être une augmentation des faits eux-mêmes, la dénonciation davantage légitimée socialement qu’en 2002 de ces actes et le contexte #MeToo expliquent sans doute en grande partie ces niveaux de prévalence. Même si les victimes sont principalement des jeunes femmes entre 20 et 29 ans (9 % d’entre elles), le harcèlement sexuel demeure présent tout au long de la vie professionnelle des femmes. 9 % des femmes salariées d’une association et 6 % des femmes salariées de l’État déclarent du harcèlement sexuel au travail contre 5 % de celles qui travaillent en entreprise. Les cadres et les femmes des professions intermédiaires (infirmières, assistantes sociales par exemple) sont les plus concernées par ces violences (respectivement 10 % et 7 % d’entre elles).
Violences dans le couple au cours des 12 derniers mois précédant l’enquête
– Les prévalences de faits de violences sont restées stables depuis 2002. Néanmoins, les prévalences pour chaque type de violences sont plus importantes qu’en métropole.
– Les violences psychologiques restent les plus déclarées avec une femme sur trois à La Réunion dont 9% en situation de harcèlement psychologique.
– Près d’un quart des femmes vivent dans une relation conflictuelle en 2018 contre 13 % en 2002. Le principal sujet de disputes concerne la répartition des tâches de la vie quotidienne (34 % des femmes soit 18 points de plus par rapport à 2002) et l’éducation des enfants (27 % contre 22 % en 2002).
– Les situations de conflits sont un contexte déterminant pour comprendre les violences dans le couple. Des faits de violences plus graves ont été déclarés dans des proportions plus importantes par les femmes s’étant séparées dans l’année. Ainsi, 6 % d’entre elles ont été menacées de mort et 3 % ont été menacées avec une arme, voire ont subi une tentative de meurtre.
– Parmi les victimes, la situation dans l’emploi est déterminante : les femmes au chômage (16 %) et les inactives (14 %) sont les plus touchées par le cumul des faits de violences comparées aux femmes en emploi (12 %). Le nombre d’enfants est également une autre variable significative. Ainsi, alors que parmi les femmes sans enfants, 10 % déclarent des faits de violences cumulés elles sont 17 % des femmes ayant 3 enfants et plus.