L’audience solennelle est un terme spécifique à la justice qui désigne la cérémonie annuelle dans les juridictions, au cours de laquelle est mise à jour l’activité durant l’année écoulée. Celle du tribunal judiciaire se tenait également ce vendredi. Si ce dernier est bien rodé, c’est la fraicheur qui prévalait pour l’audience solennelle des Prud’hommes.
Pour cette grande première, le procureur Yann Le Bris se devait de rappeler les fondamentaux : « Le rôle du conseil des Prud’hommes est essentiel pour ancrer l’égalité sociale et induire un recours limité aux magistrats professionnels. » En permettant qu’un conflit autour d’un contrat de travail soit jugé en priorité devant les professionnels du secteur privé. Les 28 conseillers prud’homaux, répartis en deux collèges, employeurs et salariés, et les présidente Gaëlle Biguet et vice-présidente Ambaria Madi, n’ont pas ménagé leur peine pendant cette première année de plâtres essuyés, « nous n’avons pas eu de vie de famille ! », s’exclame cette dernière.
C’est que l’installation du CPH a été retardée à 5 reprises pour cambriolage des locaux, puis a été bloqué par un déficit de greffiers comme nous l’avions expliqué lors de l’élection de la nouvelle présidente, Mounira Madi.
Or, sans greffier, pas d’audience. Une greffière placée avait été allouée, mais la délinquance a eu raison de sa résistance. « Nous avons nous même rédigé les tenue d’audience, les rôles, etc. »
Autre problème, aucun des conseillers prud’homaux n’a été indemnisé, « pourtant les dossiers sont complets et transmis à l’agence de paiement. »
C’est le fond qui manque le plus…
Le Conseil des Prud’hommes a désormais pris sa place, qu’avait occupé jusqu’alors le Tribunal du travail. Outre les dossiers transférés, le succès a été immédiat puisque les requêtes en référé (en urgence) ont explosé, + 1.650% ! Sur 208 requêtes, un peu plus de la moitié seulement traite du fond, « un nombre important de dossiers arrivent en référé alors qu’ils devraient être traités au fond. D’autre part, souvent, la requête est vide, le justiciable doit faire un effort pour argumenter et déposer des documents dans ce sens pour éviter les renvois ou les classements », déplorait Gaëlle Biguet dans sa présentation de bilan de l’année écoulée. Elle invitait les requérants à se rapprocher des partenaires sociaux, les syndicats de salariés ou patronaux sont en effet là pour ça, et de solliciter le Centre départemental d’accès au droit (CDAD).
Pour l’instant, le juge départiteur, censé régler les litiges n’a pas eu à intervenir, mais l’occasion a failli se présenter lors de l’élection de Mounira Madi, puisque le collège des employeurs aurait bien vu le nom de l’ancienne vice-présidente sortir des urnes. Moyennant quoi, certains ont retiré leurs candidatures lors de la constitution des sections. Ce qui incitait la nouvelle présidente a inviter le collège des employeurs à « prendre de la hauteur » pour le bon déroulé des prochaines audiences.
Dans un discours très affirmé, elle soulignait l’importance d’être élu conseiller prud’homal, « c’est un engagement profondément républicain, qui demande sagesse, honnêteté, impartialité et sans oublier, la probité. C’est important de rendre la justice sur les lieux même où le droit du travail s’est créé, et d’être jugé par ses pairs. »
L’année judiciaire est donc ouverte au conseil des prud’hommes.
Anne Perzo-Lafond