Présenté en comparution immédiate ce 17 novembre devant le tribunal judiciaire de Mamoudzou, M., un jeune homme de 23 ans originaire de Mtsahara, a dû s’expliquer sur une série de faits survenus à la fin du mois d’octobre dernier. Le 24 octobre, en fin de journée il récupère trois chiens dans un quartier du village pour faire un tour dans la rue, comme il en a l’habitude. Tout juste sorti de prison et encore sous sursis probatoire après des violences en 2023 et 2024, il attend une possible entrée en formation dans le domaine de la restauration dès janvier, avec l’espoir de repartir sur de bonnes bases.
La violence en réponse à un accident

Mais la promenade bascule lorsque l’un des chiens est percuté par une voiture. L’animal ne lui appartenant pas, le jeune homme explique avoir paniqué, craignant d’être tenu responsable. Il se dirige alors vers un local où se tient une réunion politique menée par un proche parent, adjoint au maire de la commune de Mtsamboro. Sur place, il croit reconnaître un véhicule susceptible d’être impliqué dans l’accident. L’élu, accompagné de plusieurs personnes, sort pour tenter d’apaiser la situation, mais un groupe s’attroupe autour du jeune homme, la tension monte et l’échange dégénère. M. affirme avoir reçu un coup au visage, il agrippe alors l’adjoint par la chemise, les deux hommes chutent, puis le prévenu se relève, saisit des pierres et les lance autour de lui. L’élu porte plainte dans la foulée, blessé il obtiendra trois jours d’ITT après un examen médical.
Quelques jours plus tard, le 31 octobre, il retrouve l’élu dans le village, l’interpelle, le menace et exige qu’il trouve une solution concernant le chien. Une voiture utilisée par l’élu est également dégradée. Les plaintes s’accumulent… Le 7 novembre, l’affaire prend un nouveau tournant lorsque M. est retrouvé dans la maison d’un voisin, entré par une fenêtre ouverte dans un contexte conflictuel préexistant. La victime affirme qu’il tenait un couteau et qu’il s’est montré agressif et dit s’être défendue à l’aide d’une béquille. Une vitre de véhicule est également trouvée brisée à l’extérieur. Le prévenu affirme qu’il souhaitait uniquement récupérer des boîtes de conserve pour se nourrir lui et ses chiens et reconnaît que ses réactions ont été disproportionnées.
Dans le quartier, le jeune homme est connu et ses antécédents récents n’ont pas facilité les relations, y compris au sein de sa propre famille. Il reconnaît avoir des difficultés avec l’alcool et parfois la « chimique ». Orienté vers la POPAM pour un suivi, il explique pourtant ne pas pouvoir s’y rendre, invoquant des tensions entre habitants de Mtsahara et de Mtsamboro.
À l’audience, M. tente d’expliquer son état au moment des faits. Il assure ne pas avoir voulu blesser qui que ce soit, mais reconnaît avoir perdu le contrôle et avoir bu ce soir-là. « Le propriétaire du chien a menacé de me tuer, je n’avais pas le choix ». Interrogé sur sa consommation d’alcool et de « chimique », il dit avoir « du mal à arrêter », mais promet vouloir « changer ». « Ce n’est pas bien d’agresser des gens comme ça. Moi-même je dois me dire qu’il ne faut pas lancer des pierres. Je dois contrôler mes émotions », a-t-il répété à la barre.
Victime pour sa qualité d’élu

Le ministère public souligne que l’ensemble de ces actes constitue sept infractions commises à trois moments différents, et que le prévenu reconnaît l’intégralité des faits. La récidive légale est retenue, même si le casier ne mentionne pas encore ses condamnations précédentes. La procureure insiste également sur la circonstance aggravante liée à la qualité de l’élu : le prévenu savait qu’il s’agissait d’une personne exerçant des fonctions de médiation et d’arbitrage dans la commune, et c’est précisément en raison de cette qualité qu’il est allé à sa rencontre pour régler le différend. Elle requiert une peine principale de 18 mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt, assortie d’une révocation partielle du sursis de six mois, entraînant une incarcération immédiate. Selon elle, la gravité des faits, leur répétition sur trois moments distincts et le caractère réfléchi de certains actes rendent cette peine nécessaire.
Après en avoir délibéré, le tribunal déclare M. coupable des faits qui lui sont reprochés. Il est condamné à 12 mois d’emprisonnement, avec révocation partielle du sursis de 6 mois. Le maintien en détention est ordonné, avec incarcération immédiate. Il est également frappé d’une interdiction de port d’armes pour une durée de 5 ans, et son éligibilité est suspendue pendant la même période. Des amendes sont prononcées, ainsi que l’obligation de réparer les préjudices matériels et moraux subis.
Victor Diwisch


