Les Mahorais l’espéraient : le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, a tranché. Par un arrêté signé le 2 octobre, il ordonne la réquisition des moyens et effectifs de la Direction des Transports Maritimes (DTM), ex-STM, en prévision de la grève illimitée annoncée à partir de ce lundi 6 octobre à 8 heures du matin.
« Il est procédé à la réquisition d’un navire de la DTM […] afin d’assurer la liaison entre la Grande-Terre et la Petite-Terre », stipule le texte officiel. Une mesure exceptionnelle, motivée par ce que le préfet décrit comme « la nécessité de garantir la circulation des urgences et des personnels essentiels à la continuité des services critiques du département », mais aussi par « le risque de trouble à l’ordre public pouvant résulter de l’absence des moyens de transport ».
Un service minimum pour éviter la paralysie

L’arrêté, publié en fin de semaine dernière, confie à la DTM le soin de choisir le navire à mobiliser — Polé, George-Nahouda ou Chatouilleuse — « en fonction des disponibilités techniques et des contraintes de marées ». Le personnel nécessaire devra être réquisitionné pour assurer « la sécurité des passagers, des biens et la régularité du service minimum », précise l’article 3 du texte.
En cas de refus d’exécution, la direction s’expose à des sanctions pénales ou administratives prévues par le Code général des collectivités territoriales. Le document rappelle également que « le présent arrêté est exécutoire à compter du 6 octobre 2025 et jusqu’à la fin du mouvement social. »
Concrètement, un seul amphidrome devrait assurer les traversées entre le quai Ballou de Dzaoudzi et le débarcadère de Mamoudzou, afin de maintenir la continuité du service public — indispensable pour les travailleurs, les élèves et les services d’urgence.
Le projet billettique contesté

Le mouvement, à l’appel des syndicats Snuter-FSU, trouve son origine dans un projet de billetterie électronique porté par le Département et le délégataire privé Transdev. Ce projet prévoit la mise à disposition d’agents de la DTM au profit de l’entreprise, dans le cadre d’un système de billettique couplant les liaisons maritimes et le futur réseau de bus.
Les syndicats dénoncent une « décision unilatérale », prise « sans concertation ni consultation des représentants du personnel ». Ils réclament la suspension immédiate du projet, estimant que cette externalisation fragilise les agents concernés.
Parmi les autres revendications, l’intersyndicale pointe des conditions de travail dégradées, un manque d’hygiène, des bâtiments « insalubres » et des cas de harcèlement moral au sein du service. Autant de griefs déjà mis en avant lors d’une précédente grève au mois d’août dernier, menée cette fois par le syndicat Force ouvrière, et qui avait abouti à un accord partiel.
Les barges, maillon essentiel du quotidien mahorais
À Mayotte, où la mer sépare Petite-Terre et Grande-Terre, la moindre interruption des barges désorganise immédiatement le quotidien : trajets scolaires interrompus, accès aux soins retardé, services publics ralentis. Cette dépendance absolue aux liaisons maritimes rend toute grève particulièrement sensible.
La réquisition doit permettre d’assurer un service minimum pour éviter la paralysie du territoire. Reste à observer comment la mesure sera suivie sur le terrain et si un seul navire suffira à répondre aux besoins des usagers.
Mathilde Hangard