La décision des Sages était suivie sur le plan national pour le lien que les médias en ont fait avec la peine d’inéligibilité requise contre Marine Le Pen lors du procès des assistants parlementaires du RN. La décision la concernant doit tomber ce lundi.
Condamné notamment à deux ans de prison dont un avec sursis, et 4 ans d’inéligibilité avec exécution provisoire pour prise illégale d’intérêt lors de la passation de marché pour la CADEMA, la Communauté d’Agglomération Dembéni Mamoudzou, Rachadi Saindou avait été démissionné de sa présidence et de ses fonctions de conseillers communautaire et municipal par le préfet. Le représentant de l’Etat s’appuyait sur le code électoral qui prévoit que tout conseiller municipal qui se trouve condamné à une peine d’inéligibilité « est immédiatement déclaré démissionnaire par le préfet, sauf réclamation au tribunal administratif dans les dix jours de la notification, et sauf recours au Conseil d’État. »
Un point de droit que Rachadi Saindou jugeait inconstitutionnel sur plusieurs points et dont le recours incitait le conseil d’Etat à déposer une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC). Dans sa décision de ce vendredi 28 mars 2025, le Conseil constitutionnel le déclare pourtant conforme et répond point par point aux requêtes de l’ancien élu.
Tout d’abord sur « l’atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité » que représente son éviction alors qu’il a déposé un appel, les Sages déclarent qu’il s’agit bien d’assurer, en cas de recours, « l’efficacité de la peine et de prévenir la récidive. » D’autre part, cela contribue « à renforcer l’exigence de probité et d’exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. » Enfin, il faut s’en remettre à la décision du juge, à qui il revient de « d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure [d’exécution provisoire, ndlr], est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur ». C’est-à-dire que chaque situation est un cas particulier qui amène le juge à prendre ou pas cette décision d’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité.
Une question de graduation des responsabilités

L’ex-président de la CADEMA faisait également valoir un défaut d’égalité devant la loi entre les élus locaux et les parlementaires. Ces derniers ne sont en effet pas soumis à la même règle. Ils ne peuvent être démis immédiatement de leurs fonctions qu’en cas d’absence de recours ou en cas d’une condamnation immédiate. Un état de fait logique pour le Conseil constitutionnel, lié à leur fonction : « Les membres du Parlement participent à l’exercice de la souveraineté nationale, votent la loi et contrôlent l’action du Gouvernement », ce sont ces prérogatives qui justifient que « les membres du Parlement se trouvent dans une situation différente de celle des conseillers municipaux. »
L’éviction de l’élu mahorais est donc « conforme à la Constitution ». Une décision qui n’a de lien avec la situation de Marine Le Pen qu’au titre de son mandat de Conseillère départementale du Pas-de-Calais, qu’elle pourrait donc perdre aussitôt si elle était condamnée ce lundi 31 mars à une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire.
En revanche, en fonction de la durée de la condamnation, cela pourrait l’empêcher de se présenter aux présidentielles de 2027.
Anne Perzo-Lafond