Le 14 février dernier, un article du journal Le Monde a mis en lumière des accusations de détournement d’aide alimentaire après le passage du cyclone Chido à Mayotte. Une question persistante reste sur toutes les lèvres : où est passée cette aide alimentaire, censée venir en secours à la population sinistrée ? Cette question est soulevée depuis la première semaine qui a suivi la catastrophe, sans qu’une réponse claire ne soit fournie. Dans un communiqué, la mairie de M’tsangamouji a réagi fermement face aux accusations du journal. Pour la commune, si des abus sont reconnus, ils sont présentés comme des cas isolés, et non représentatifs de l’ensemble des communes de l’île. Le maire, Ibrahima Said Maanrifa, déplore l’amalgame fait entre les différentes administrations et les élus, soulignant l’absence de preuves tangibles dans les accusations.
Une gestion opaque de l’aide
L’un des principaux reproches porte sur l’opacité du système de distribution de l’aide. Selon la mairie de M’tsangamouji, les livraisons de vivres ont été irrégulières et souvent inférieures aux quantités annoncées par la cellule logistique de l’État. Les informations sur les horaires et le contenu des livraisons étaient inexistantes ou erronées. Les premiers bons de livraison n’ont été reçus qu’après plusieurs semaines, et ceux-ci ne permettaient pas un contrôle efficace des denrées. « Il est impossible de vérifier si les quantités livrées correspondent à celles sortant de la plateforme logistique« , déclare le maire. Cette situation a engendré de nombreuses tensions entre les administrés et les autorités locales, alimentées par une gestion de l’aide qui manquait de transparence. Les habitants, souvent mal informés sur les horaires de distribution, se sont retrouvés à faire la queue sous un soleil brûlant, sans garantie de recevoir leur part.
Des efforts pour les plus vulnérables

Face à la crise, la mairie de M’tsangamouji a pris l’initiative de distribuer des packs d’eau en priorité aux foyers vulnérables, comme ceux avec des nourrissons, des personnes âgées ou des personnes en situation de handicap. Bien que ces efforts aient permis de soulager certains habitants, les quantités d’aides restent insuffisantes. « Nous avons nourri entre 70 et 100 personnes, agents et bénévoles inclus, qui ont travaillé sans relâche pour gérer cette crise« , explique Ibrahima Said Maanrifa. Les distributions alimentaires ont commencé trop tardivement, et même lorsque les vivres sont arrivés, la situation était toujours tendue. En janvier, une distribution a même été bloquée par des habitants en colère, ce qui a conduit à l’interruption temporaire des aides. À partir de là, l’État a commencé à livrer l’aide dans plusieurs points de distribution, afin de réduire les tensions et mieux répondre aux besoins des habitants.
Une crise exacerbée par des denrées mal adaptées

Les premières livraisons d’aides ont été essentiellement constituées de farine, de sucre et d’eau, des produits peu adaptés aux besoins alimentaires de la population, qui s’attendait plutôt à des denrées comme du riz, des pâtes ou des conserves, manquant souvent d’eau. « Les packs d’eau c’était pour ceux qui étaient tout devant mais il n’y en avait plus quand c’était notre tour », nous confiait une habitante. « Ils donnent quelques bouteilles mais c’est pas suffisant pour plusieurs jours en famille », déplorait un homme. « Pourquoi l’aide n’a-t-elle pas été constituée avec des produits plus adaptés à notre alimentation quotidienne ? » s’interroge la population. Par ailleurs, les dons de riz et de conserves, envoyés par des citoyens, semblent avoir disparu sans explications, et personne ne sait à qui ces produits ont été distribués.
Une commission d’enquête attendue
Face à ces nombreuses questions sans réponse, la mairie de M’tsangamouji appelle à la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire, afin de faire la lumière sur la gestion de l’aide et d’en tirer des leçons pour l’avenir. « Ce travail aurait dû être fait par l’État« , regrette le maire, qui souligne que la population attend des réponses claires et des mesures pour éviter que de telles situations ne se reproduisent.