Nouveau gouvernement : les attentes du Conseil départemental

Plus de 10 jours après le passage du cyclone Chido, les attentes mais surtout les réactions de la population mahoraise à l’égard de l’Etat n’ont jamais étaient aussi fortes, surtout après l’annonce d’un nouveau gouvernement.

Auparavant déjà habituée aux crises successives, Mayotte se retrouve confrontée à trois crises majeures imbriquées depuis le passage du cyclone Chido le 14 décembre dernier : une crise sanitaire, une crise alimentaire et une crise sécuritaire. 

Depuis le 23 décembre, les Outre-mer ont un nouveau ministre, Manuel Valls. Pour le Président du Conseil départemental, Ben Issa Ousseni, cette nomination constitue une attente forte du Département à l’égard du ministre des Outre-mer tout juste élu, pour « qu’il s’empare rapidement du plan d’actions annoncé et qu’il engage une collaboration étroite avec nous (ndlr : le Département de Mayotte) pour le construire et le concrétiser ensemble. Il est essentiel d’éviter les erreurs du passé et de transformer notre vision de développement pour Mayotte en une réalité concrète, en mobilisant les moyens nécessaires pour atteindre cet objectif », a-t-il déclaré dans un communiqué. Suite au passage du Président de la République, les élus ont construit trois grands axes pour la reconstruction du territoire. Dans un premier temps, il s’agit de soutenir urgemment la population, d’autre part, la gestion de la crise nécessite de répondre aux urgences économiques et sociales, avant de mettre en oeuvre les moyens d’une reconstruction des bâtis. 

« Protéger et soutenir la population » 

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Face à Emmanuel Macron, à Tsingoni, une femme réclamait « On veut de l’eau ! »

Le cyclone a dévasté un territoire déjà fragile. Pour les autorités, l’heure est à l’urgence, où tous les moyens doivent être mobilisés pour répondre aux besoins vitaux de la population, en partie toujours privée d’eau, de nourriture, d’électricité et de réseau. Au lendemain du passage du cyclone, les autorités déclaraient que les habitations précaires avaient été entièrement détruites. Celles-ci, concernant presque la moitié des habitations de l’île, un nombre extrêmement important de personnes ont besoin aujourd’hui d’être relogées. Le Département de Mayotte a ainsi insisté sur l’urgence de « reloger les familles sinistrées », dont certaines sont toujours hébergées au sein des établissements scolaires de l’île qui avaient été réquisitionnés comme centres d’accueil pour les habitants avant le cyclone. 

Nettoyer l’île et soutenir les entreprises

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Débris le long des routes à Mamoudzou suite au passage de Chido

Arbres, troncs, morceaux de bois, bouts de métaux, objets électroménagers cassés, carcasses de voitures, poteaux électriques, ont été propulsés sur les voies routières, rendant impossible la circulation sur l’île au lendemain de la catastrophe. Depuis, les débris du cyclone sont progressivement récoltés et mis sur le bord des routes pour faciliter l’accès aux communes qui jusque-là étaient enclavées. Le Conseil départemental a indiqué qu’une des urgences du territoire consistait à « organiser  une opération massive de nettoyage de l’île et d’évacuer les déchets non traitables sur l’île vers les pays ou territoires en capacité de les prendre en charge », avant de retrouver un semblant de normalité à travers le paysage du 101ème département, englouti sous des montagnes de déchets à chaque coin de rue. Pour soutenir les propriétaires de bien et les entreprises, le Département a annoncé devoir « suspendre les échéances des crédits immobiliers pour les propriétaires ayant perdu leurs biens » et « mettre en place des dispositifs de sauvegarde des entreprises et des emplois, tels que le chômage partiel, la suppression ou encore le gel des charges sociales et fiscales, mais aussi garantir la continuité des soutiens fiscaux existants pour l’économie, fournir des dispositifs de trésorerie et indemniser les secteurs sinistrés, tels que le secteur agricole, le secteur artisanal et le monde de la  pêche ».

« Maîtriser les bidonvilles » 

Face à cette catastrophe, alors que les bruits de marteaux témoignent d’une reconstruction progressive des habitations sur l’île, les collectivités locales souhaitent avoir une certaine maîtrise du foncier, afin « d’encadrer la reconstruction pour éviter la réapparition des bidonvilles » sur l’ensemble de l’île. 

Reconstruire un territoire piégé dans les décombres 

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Le paysage de l’île est devenu une nature morte

Depuis le 23 décembre, un plan national de reconstruction sur une durée de trois ans a été arbitré. Pour la population, il s’agit surtout de soutenir la reconstruction des logements privés et d’accélérer celle des logements sociaux, auparavant déjà essentielle et réitérée par une partie de la classe politique, lors des opérations de décasage. À ce sujet, le gouvernement a déclaré : « L’objectif de ce plan est de sortir de la phase d’urgence pour entrer dans la phase de stabilisation, évoquée par le président de la République, dans sa feuille de route pour Mayotte, qui inclut également un certain nombre d’annonces, dont une ´loi spéciale’ pour la reconstruction de Mayotte et la création d’un établissement ad-hoc. » 

Présent lors de la catastrophe, à la différence d’autres élus ayant fait le choix de quitter le territoire avant le passage du cyclone, le président du Conseil départemental, Ben Issa Ousséni, a appelé à une poursuite de « cet élan solidaire pour bâtir un avenir durable et prospère pour Mayotte », notamment en permettant un retour urgent des enfants à l’école, force vive du 101ème département français, où une personne sur deux a moins de 17 ans. 

Mathilde Hangard 

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