« En 2012 on comptait 58% de personnes illettrées à Mayotte et nous n’avons jamais eu le chiffre concernant l’analphabétisme », révèle Abdou Madi Charif, le chef de projet de la plateforme de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme (PLIA). Celle-ci fait partie du groupement d’intérêt public CARIF-OREF, à l’origine de l’organisation de la Journée Nationale d’Action contre l’Illettrisme ce lundi 9 septembre. A Mayotte, les professionnels de la formation ont échangé toute la matinée autour de cette question qui, à notre époque, ne peut plus être dissociée de celle de l’illectronisme. C’est la raison pour laquelle la Fondation Orange participait elle aussi à cette journée aux côtés du rectorat, de la préfecture, du RSMA et des différents organismes de formation de l’île. Soit, en tout, une quinzaine d’acteurs.
Outre les chiffres de l’ancienne étude de l’INSEE de 2012, Abdou Madi Charif nous révèle un chiffre encore plus inquiétant : 61% des jeunes de Mayotte ont des difficultés à lire et écrire. « Ce phénomène a tendance à augmenter au fil des années en raison des arrivées de plus en plus nombreuses d’enfants en provenance des îles voisines. Mais d’un autre côté, de plus en plus d’outils sont développés par les différentes structures pour y remédier », déclare-t-il. Le fait que le français ne soit pas la langue maternelle de la plupart des enfants vivant à Mayotte contribuerait grandement à l’illettrisme, mais également une certaine « peur de la langue française et de l’apprentissage en général », selon le chef de projet de la PLIA. Ce dernier nous précise que l’illettrisme concerne les personnes qui, bien qu’ayant été scolarisées, éprouvent toujours des difficultés à lire et écrire et que le terme « analphabétisme » est utilisé pour définir les personnes qui n’ont jamais été scolarisées.
Aborder l’illettrisme et l’illectronisme simultanément
Lors de la table ronde organisée entre les professionnels de la formation, plusieurs problématiques ont été abordées dont celle de la manière d’enseigner le français à un public dont ce n’est pas la langue maternelle à la base. « Nous ne pouvons pas non plus utiliser les méthodes du Français Langue Etrangère (FLE) car Mayotte est une île française, le cas est donc différent », explique une responsable du centre de formation Hodina. De nouvelles méthodes d’apprentissage du français sont donc développées, adaptées au cas de notre île dont les langues régionales ne sont pas enseignées à l’école, ce qui fait que les élèves n’ont pas de base linguistique écrite à laquelle se référer. La formatrice a également insisté sur la nécessité d’aborder l’illettrisme et l’illectronisme simultanément. « Avec la transition numérique, on ne peut plus séparer les deux à l’heure actuelle. Il faut partir des besoins des élèves, l’accompagnement doit être spécifique pour lever les blocages », a-t-elle expliqué.
Cette journée va justement être suivie de la mise en place, au cours de cette semaine, de différents ateliers autour du numérique. Un atelier numérique sera proposé par le RSMA en collaboration avec la Maison France Service. « Il s’agira d’aider les gens à prendre en main le smartphone, d’accéder aux e-mails et de les sécuriser, bref de faire en sorte que la technologie cesse de leur échapper », précise Abdou Madi Charif. En parallèle, des ateliers autour de la parentalité seront également organisés pour aider les parents à suivre la scolarité de leurs enfants via les différentes plateformes numériques du rectorat comme Pronote par exemple.
N.G