Les barrages de l’île étant levés on aurait pu croire à la foule des grands jours au tribunal. Et pourtant que nenni, même s’il n’y avait qu’une seule affaire inscrite au rôle de l’audience, l’accusé n’a même daigné se rendre à son jugement, quant à son avocat il a demeuré injoignable, et les deux victimes étaient absentes également. Après avoir suspendu l’audience pour se retirer et décider du renvoi ou on de cette affaire, les membres du tribunal sont revenus et ont considéré que ce procès aurait bien lieu en dépit de l’absence du protagoniste et de son conseil.
Une agression par des membres de la bande de Gotam
L’affaire remonte au mois de décembre 2017 quand deux individus sortant d’un bar de nuit à Mamoudzou sont pris à partie par plusieurs membres de la bande de Gotam. Ces derniers ont en effet exigé de l’argent pour pouvoir se payer à boire. Le ton monte, l’une des deux victimes refuse de donner ce qu’ils demandent et elles se font encercler par une petite dizaine d’individus. Puis les coups de pieds et coups de poings commencent à pleuvoir. Un coup de couteau au thorax est même asséné à l’un d’eux, fort heureusement sans qu’il soit mortel. Ce dernier a alors pu rentrer chez lui avant de s’évanouir dans une mare de sang, sa mère a alors prévenu les secours et le garçon a été transféré au CHM. Les médecins qui l’ont examiné lui ont alors prescrit 21 jours d’ITT.
L’ami de la victime ayant reçu un coup de couteau a bien essayé de s’interposer pour éviter que la situation ne dégénère, mais en échange il a reçu de nombreux coups sur tout le corps nécessitant pour lui aussi 20 jours d’ITT. Ce n’est que fin décembre 2017 que l’auteur du coup de couteau est reconnu et placé sous contrôle judiciaire. Les victimes étaient également absentes de l’audience et selon leurs déclarations aux enquêteurs, plusieurs délinquants de la bande de Gotam étaient armés de pierres et de couteaux et comptaient dépouiller les fêtards pour se payer à boire. L’une des victimes a même déclaré, après cette agression, qu’elle avait ressenti la mort quand les délinquants lui portaient des coups alors qu’elle était au sol.
Bien que l’accusé ait contesté être l’auteur des faits, quand la présidente du tribunal, Aline Charron, égrène son casier judiciaire on voit que c’est loin d’être un enfant de cœur, même si avant 2017 son casier était vierge. « Je vois plusieurs mentions dans son casier, remarque-t-elle. Une en 2018 pour violence sur mineur, une autre en 2019 pour vol avec violence et en réunion, trois en 2020 pour vol avec violence, vol en réunion et vol, enfin encore une en 2022 pour participation à un attroupement… ». Bref de quoi l’envoyer à Majicavo pour plusieurs mois.
L’étude de sa personnalité montre qu’il est arrivé à Mayotte très jeune en provenance de Mohéli, qu’il était tout d’abord hébergé chez une tante avant que sa mère ne s’en occupe. Sa scolarité a été aussi chaotique puisqu’elle s’est arrêtée en classe de 3e.
Le vice-procureur, Tarik Belamiri, dans son réquisitoire n’a pas été vraiment indulgent envers l’accusé. « C’est une personne ancrée dans la délinquance, sa culpabilité ne fait aucun doute, plusieurs témoignages le mettent en cause concernant l’agression de ce soir de décembre 2017, il a été formellement identifié. Ce sont des faits de violence aggravée avec l’utilisation d’une arme et en réunion. Il a porté un coup de couteau au thorax qui aurait pu s’avérer mortel. Par ailleurs, il n’a même pas daigné se rendre au tribunal pour son procès », déplore-t-il. Aussi il a requis trois ans de prison avec mandat d’arrêt, l’interdiction de porter une arme pendant 5 ans et l’interdiction de se rendre sur le territoire français durant 10 ans.
Après avoir délibéré, le tribunal a condamné l’accusé, dans le cadre d’une peine contradictoire à signifier, à 18 mois de prison ferme avec mandat d’arrêt et l’interdiction de porter une arme pendant 5 ans.
B.J.