Qui a dit qu’on ne pouvait plus rien organiser à Mayotte à cause de l’insécurité en hausse constante ? Certains refusent de se laisser démonter par « cette épine dans le pied » ! C’est notamment le cas de Del, l’organisateur du festival Milatsika depuis maintenant 17 ans. L’édition de cette année s’est déroulée comme d’habitude dans son village natal de Chiconi, connu pour être le berceau de nombreuses danses et chants de l’île. « Aucun incident n’a été à déplorer sur le site du festival », nous a-t-il assuré. Grâce à sa collaboration avec une société de sécurité, mais aussi avec celle d’une 30aine de bénévoles originaires du village, cette 17ème édition s’est une fois plus déroulé dans un esprit festif et serein. « Au fil des années, nous avons réussi à fédérer un public fidèle qui nous suit, ce qui génère un esprit de famille au sein du festival. Quand les gens viennent à Milatsika, ils se sentent libérés et oublient tous leurs soucis ! », déclare Del.
Pour lui, c’est l’esprit convivial du festival et ses choix artistiques originaux qui expliquent son succès. « Nous choisissons de mettre en lumière des artistes très talentueux, mais peu connus. Cet esprit de découverte a fédéré tout un public autour de notre évènement », poursuit l’organisateur, lui-même musicien en marge de son travail d’enseignant. Il est vrai que vous ne trouverez pas de « stars » au festival Milatsika, qui préfère inviter des artistes en marge des gros succès populaires. Une forme de festival d’art et d’essai en somme, qui s’efforce d’ouvrir la musique mahoraise à d’autres sonorités, venues de ses voisins malgaches, réunionnais, africains, mais aussi métropolitains. « Le festival Milatsika a pour vocation de sortir des clichés folkloriques et de réunir les musiques d’autrefois aux musiques actuelles », peut-on d’ailleurs lire en description sur le site de l’évènement.
Del, implacable face aux critiques sur les réseaux sociaux
Sur les réseaux sociaux, certains ont attaqué cette 17ème édition, lui reprochant « de ne pas mettre assez en lumière les artistes mahorais ». Pourtant, de nombreux artistes locaux se sont produit sur scène cette année encore, comme toutes les précédentes. Ainsi Bedja, H-Prod DJ Houssaïni, Bob Mursala, Baban Mayanga et Yoni-S se sont partagé l’affiche avec les artistes malgaches et métropolitains invités. On ne peut donc pas dire que les artistes mahorais n’aient pas été mis à l’honneur de cette 17ème édition.
Del explique ces critiques par une mauvaise habitude « d’assistanat » des artistes de Mayotte. « Ici, certains artistes trouvent normal d’attendre qu’on vienne les chercher au lieu de démarcher les évènements et après ils viennent se plaindre », vitupère-t-il. « Passer sur scène, ça se mérite, c’est le fruit d’un travail. En métropole, si un artiste attend qu’on vienne le chercher, il peut attendre longtemps », rappelle celui qui, par ailleurs, privilégie les musiciens audacieux tant dans leur art que dans leur tempérament.
Nora Godeau