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jeudi 2 mai 2024
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Mayotte en Santé, coup de projecteur pour un colloque bien au delà de nos insulaires contrées

Coup d’envoi ce lundi de la 2ème édition de ce congrès d’un autre genre réunissant durant 3 jours en présentiel ou visioconférence, médecins, scientifiques et acteurs du monde associatif, préventif et sanitaire au sein du Pôle d’excellence rural de Coconi, commune de Ouangani. 

Par voie concrète ou virtuelle, ils sont près de 600 à être attendus afin de pousser communes réflexions et établir une sorte d’état des lieux quant à 3 thématiques à la fois transversales et interconnectées que sont la Santé sexuelle, les maladies infectieuses émergentes ainsi que les addictions et ce, en territoires défavorisés. Car oui, comme le souligne dans son discours d’ouverture Raïssa Houmadi, ingénieure à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale de Toulouse et vice-présidente de l’association Nariké M’Sada : « Il est important de comprendre que ces enjeux sanitaires dépassent les uniques préoccupations locales pour justement s’ouvrir à une dimension plus large. Une réalité du territoire certes, mais des inquiétudes partagées à des échelles hexagonale et ultramarine, voire internationales ». Par ces ouverture et objective visibilité, aussi offertes à d’autres territoires, Mayotte s’auto-illumine dynamiquement parlant, en vue de faire sainement bouger les choses en matière de Santé.

(de d. à g.) Dr Raïssa Houmadi, Zainaba Mohamed secrétaire générale de Nariké M’Sada et Salime Aynoudine, directeur des soins du CHM qui souligne : « Nous nous devons d’être présents aux côtés de tous les dispositifs et associations qui oeuvrent en matière sanitaire sur notre département. Ce qu’il faut comprendre c’est que tout ce qui n’a pas été fait en termes préventifs aura d’indéniables répercutions sur l’approche même des soins. Pour être très terre à terre, il faut comprendre que cela coûte bien plus cher de traiter un patient contre une maladie plutôt que d’accompagner des dispositifs dans des démarches préventives. Notre soutien est total »

La Santé sexuelle 

Qu’entendons-nous par cette appellation ? En comprendre la définition dans son ensemble et les facteurs bien-être qui s’y greffent en termes purement physique mais également mental, émotionnel voire même social. Discerner l’approche légale relative aux droits humains et à l’égalité des sexes, notamment pour les femmes à disposer de leur propre corps, être ou non consentante, choisir le nombre d’enfants qu’elles désirent, d’avoir accès librement à la contraception ou même à des protocoles d’avortements sécurisés et encadrés. Voilà quelques grandes lignes des bases posées par l’intervention de Christine Katlama, professeur de maladies infectieuses Hopital Pitié-Salpêtrière. Des bases qui ne sont pas déconnectées d’une certaine réalité locale. Mayotte, 1ère pouponnière nationale avec 10 795 naissances enregistrées en 2022 par le CHM. Des grossesses pas toujours désirées, engendrant aussi des risques maternels parfois mortels.

Allocution par visioconférence du Professeure Françoise Barré Sinoussi, Prix Nobel de médecine et présidente de Sidaction

Hémorragies, éclampsie, infections ou encore dystocie, ces causes imputant par exemple une estimation en 2019, de 917 décès pour 100 000 naissances au Nigéria, 426 à Madagascar, 217 aux Comores et tout de même de 50 ‰ à Mayotte (soit 6 fois plus qu’en Métropole). Des grossesses qui se veulent également à dominante précoce, principalement dans les pays pauvres. En effet, chaque année, ce sont près de 2,5 millions de filles de moins de 16 ans qui accouchent au motif de facteurs principalement culturels, religieux, de pauvreté, de mariage d’enfants, d’absence de perspective de vie en une société à dynamique patriarcale.

Il ne peut être fait état de sexualité sans aborder une autre réalité qu’est la violence faite aux femmes. Ainsi, selon un rapport de l’ONU-Sida, il est recensé que 35% des femmes ont subi des violences physiques et/ou sexuelles à un moment donné de leur vie et que 45% des adolescentes indiquent avoir eu un tout premier rapport forcé. Des tristes faits, aussi terrain favorable au risque de contamination par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH).

Le VIH, bilan

Dans le Monde, en 2021, 38,4 millions de personnes vivaient avec le VIH, dont 54,5% de femmes, principalement en territoire hémisphère Sud et continent africain. Une réaliste promiscuité géographique qui ne peut être exclue des facteurs risques accroissants, en notre 101ème département français, aussi carrefour de population. À Mayotte, en 2022, ce sont 416 patients, dont 96 nouveaux cas, vivant avec le VIH, qui ont été suivis. Une courbe ascendante d’année en année touchant, là aussi, principalement les femmes du fait de pouvoir les dépister plus facilement, notamment lors de leur suivi médical de grossesse. Rappelons que peu de gens, hommes et femmes confondus connaissent réellement leur situation/santé sexuelle en ce sens. En dépistage de séropositivité confirmée, en 2022, il serait question à 58,07 % de féminine patientèle contre 41,93 % pour la gente masculine; les rapports hétérosexuels étant la première et majeure cause de transmission en ce territoire à la population très jeune et donc en proie à une épidemique majoration de cas de VIH.

Durant ces 3 jours de colloque, il est proposé aux participants de se faire dépister gratuitement VIH/et VHB/VHC au moyen de tests rapides d’orientation diagnostique

Les addictions 

S’il est des idées reçues à mettre à mal, ce sont bien celles de la répression, de la stigmatisation et du cloisonnement instinctif qui se voudrait de dire qu’il existe des addictions et/ou drogues plus douces ou, à contrario, plus dures que d’autres. Des carcans qui au final n’ont guère fait leurs preuves en matière d’efficiente lutte comme ne manque pas de le souligner conjointement Marie Öngün-Rombaldi, déléguée générale de la Fédération addiction et Naïra Meliava, directrice générale d’Oppelia : « En Août dernier, un rapport de l’ONU aux droits de l’Homme préconise de mettre fin à la guerre aux drogues, au profit d’un développement de programme de soins et de réduction des risques. Par cette suppression des sanctions visant directement les consommateurs de drogues, il en découlera une évidente réduction de la surpopulation carcérale et aura des effets positifs en matière de santé ».

(de g. à d.) Naïra Meliava et Marie Öngün-Rombaldi

Une autre approche visant avant tout l’aspect aussi encadré et sécuritaire des personnes concernées. La drogue, au final, quasiment tout le monde est concerné de manière plus ou moins directe. En France, il serait question de 45 millions d’usagers tant dans la forme ’’licite’’ qu’illicite. Et notre île n’est pas en reste. Implantée sur notre territoire depuis près de 2 ans, la Plateforme Oppelia de prévention et de soin des addictions à Mayotte (Popam) assure des missions d’accueil, de prévention et d’accompagnement en matière de consommation et conduite addictives notamment grâce au travail terrain de ses 14 agents répartis en 2 antennes situées à Miréréni et Dzoumogné.

Le stand informatif des dispositifs accompagnement, sécurité et prévention de la Popam, animé par les médiateurs Aboubakari et Thomas

Là où la tant dévastatrice Chimique se voudrait de diminuer peu à peu, il est d’autres produits de plus en plus consommés et ce, quelle qu’en soit la tranche d’âge et même la classe sociale. Alcool, tabac à chiquer ou encore chicha; autant de facteurs nocifs pour la santé, tant physiologique (risque d’AVC, cancer poumons, foie, lèvres, vessie, pharynx…) qu’émotionnelle (agitation excessive, anxiété, crises d’angoisse, dépression, isolement…).

Les maladies infectieuses émergentes 

Parmi la plus connue, pour ne pas dire médiatisée, la fameuse Covid-19. Par émergente, il est sous-entendu une maladie qui n’a jamais été recensée par une quelconque autorité sanitaire. À cela se greffe l’approche de ré-émergence de potentielles maladies/épidémies qui refont massivement surface et le climat tropical, tout comme le réchauffement climatique, ainsi que la mouvance plus régulière des populations, contribuent fortement à accroitre ces facteurs risques. Nos territoires ultramarins, de par leur respectif emplacement géographique et bien d’autres facteurs singuliers, ne sont guère comparables à la Métropole.

Le professeur Loïc Epelboin basé au CH-Cayenne, Guyane

« Dans les Drom-Com, beaucoup de maladies infectieuses émergentes ont des origines zoonoses, c’est à dire dont l’agent initial est animal. À Mayotte, tout comme en Guyane et dans les Antilles d’ailleurs, les escargots géants, les limaces ou même les crabes terrestres sont à l’origine de l’Angiostrongylose qui est une maladie tropicale négligée liée à un nématode. Les symptômes sont avant tout respiratoires » nous précise le professeur Loïc Epelboin, infectiologue au Centre hospitalier de Cayenne et intervenant lors de ce congrès Santé. 

La fièvre Q causée par la bactérie Coxiella burnetii et transmise du bétail à l’Homme, (re)ferait également de plus en plus parler d’elle chez nos amis guyanais mais, de manière globale, par effet de vases communicants et de voyages de par le Monde. Apparue dans les années 30 chez nos amis australiens, par simple inhalation de ce microbe, ladite fièvre provoquerait des symptômes assez similaires à une grippe (toux, maux de tête, fièvre, douleurs musculaires…) son diagnostic est souvent imperceptible si analyses en laboratoire il n’y a pas. 

S’il est une maladie dangereuse, ancienne, quasiment disparue et pourtant bien spécifique et présente sur le territoire mahorais c’est le Béribéri. Provoquée par un déficit en vitamine B1, elle peut engendrer des conséquences potentiellement mortelles dues à des troubles neurologiques ou encore une insuffisance cardiaque notamment chez les nourrissons.

Épidémie de peste à Madagascar en 2017. Si proche géographiquement parlant ainsi qu’en date. Ici protocole de décontamination des rues en cours (archives/DR/Sciences et Vie)

Autant de regards et d’expertises croisés qui seront échangés tout au long de ces 3 jours au moyen de sessions parallèles et sous-ramification des thématiques majeures citées en introduction. Un constructif état des lieux et une mutualisation des connaissances permettant également de positionner Mayotte aussi au devant de la scène médico-scientifique comme le souligne le docteur Bernard Castan, président de la Société de pathologie infectieuse de langue française :

(de g. à d.) Moncef Mouhoudhoire, directeur de Nariké Msada et le Dr. Bernard Castan

« C’est un travail remarquable qui est entrepris par le biais de ce colloque et qui se doit de sortir de Mayotte justement. C’est la première fois que je viens en ce territoire et ma dynamique se veut avant tout d’observation, d’écoute et d’imprégnation des vrais acteurs locaux pour, d’une part, enrichir les connaissances et d’autre part, dans un second temps, éveiller les consciences. Comprendre les problématiques et freins locaux — avec une vision objective — qui ne peuvent nullement être comparés et/ou solutionnés par une approche métropolitaine. Bien entendu, la piste politique est la solution à tout cela. Les défis sanitaires majeurs, aussi liés aux problématiques démographiques sont comparables à ce qu’on peut trouver sur l’île Lampedusa en Méditerranée. Notre but est de créer un réel lien régulier avec Mayotte pour justement encourager cette pleine visibilité à échelle nationale et aller par la suite soutenir les idées auprès des acteurs et autorités concernés ».

Franc succès annoncé pour cette seconde édition qui doit avant tout ses lettres de noblesse grâce à la pleine implication d’acteurs de l’ombre qui font grandement avancer les choses par la force de leurs initiatives et actions.

 

MLG

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