L’homme d’une vingtaine d’année est un récidiviste et avait déjà été condamné devant le tribunal correctionnel pour des faits de vol avec violence commis en septembre 2017. Ce sont ces multiples récidives qui le conduisent aujourd’hui devant la cour d’assises.
Des coups de machette dans la tête de ses victimes
Il est notamment reproché à cet homme d’avoir agressé avec un de ses comparses un professeur un dimanche après-midi alors que ce dernier était en train de faire une balade. Non content de l’agresser verbalement afin qu’il lui donne son téléphone portable, l’individu continue d’être violent envers sa victime et lui assène des coups de machette à la tête. L’enseignant a ainsi reçu un coup occasionnant une plaie d’une dizaine de centimètres de long et quelques centimètres de profondeur. Il a également reçu plusieurs coups de couteaux à la main. Il ne doit, selon lui, sa vie qu’à des passants qui se trouvaient près de là et qui ont entendu ses appels à l’aide.
La présidente du tribunal, Nathalie Brun, fait venir l’accusé à la barre et lui demande quelle est sa position sur les faits reprochés. « Il n’y a pas de preuve, pas d’emprunte. Je conteste les faits qu’on me reproche. Ce n’est pas moi qui ai fait ça ». Puis comme à l’accoutumé, c’est au directeur de l’enquête de l’époque de venir témoigner à la barre. Sauf qu’à la grande stupeur de l’auditoire, le directeur d’enquête ne se rappelait quasi rien de cette affaire. « Je suis arrivé le 20 août 2020 et j’ai repris une partie de l’enquête, explique-t-il. – Comment se fait-il alors que vous ne vous rappeliez pas ? Interroge la présidente. – J’ai juste fait le dépôt de plainte et je n’étais pas tout seul. Je n’ai pas fait d’enquête. – Pourtant c’est bien votre signature et votre nom qui figurent sur les procès verbaux. – J’ai signé mais ce n’est pas moi qui ai enquêté. J’ai acté ».
L’avocat général, Albert Cantinol et la présidente du tribunal sont à la fois stupéfaits et en colère. « Vous êtes convoqué devant une cour d’assises pour témoigner et vous ne demandez même pas à consulter les archives alors que vous ne vous rappelez pas de l’affaire ? Vous devez être capable de reprendre un dossier et d’exécuter une commission rogatoire ! », s’agace l’avocat général.
Quant à la présidente, elle demandait à la greffière que soit inscrit au procès verbal que « Le directeur d’enquête a déclaré à la barre qu’il était le signataire des PV d’investigation alors qu’il n’a procédé à aucune investigation telles que décrites dans les PV ». Le directeur d’enquête n’a pu apporter son concours et n’a ainsi rien déclaré devant la cour.
Des victimes encore très choquées et traumatisées
L’individu est jugé pour deux affaires distinctes même si elles sont rapprochées dans le temps et dans l’espace. C’est au tour de la première victime de témoigner en visioconférence. Encore marqué par les faits, ce monsieur décrit la scène et se voyait déjà six pieds sous terre. « Alors que je me baladais, j’ai vu deux individus venir vers moi dont un me menaçant avec une machette. J’ai donné mon téléphone pour éviter d’être poignardé. Ça n’a pas suffi, j’ai tendu mes mains pour me protéger. Quand j’étais à terre, il n’a pas arrêté de pointer son couteau vers moi et il m’a dit : « Maintenant on va te marquer », et il m’a donné un coup de machette dans le crâne. Dans son regard j’ai vu quelqu’un de très déterminé, ce n’était pas la peine de discuter. Il avait déjà mon téléphone et après il m’a donné des coups. Je pensais que j’allais y rester, que j’allais finir là. – Comment allez-vous maintenant ? Demande la présidente. – Il m’arrive d’y repenser notamment quand j’ai des douleurs au niveau des doigts. Je ne sais pas pourquoi il a été si violent. J’espère que ce procès va me permettre de tourner la page symboliquement ».
Le père de l’accusé était également convoqué devant le tribunal pour parler de son fils et des affaires volées qu’il a retrouvé chez lui et qu’il est allé ramener à la gendarmerie. Fait assez rare, au moment où le père de l’accusé raconte sa version, son fils alors sur le banc derrière, entouré de deux gendarmes, commence à prendre la parole à voix haute et à menacer son propre père. « Une fois que je sortirai, vous allez voir », aurait-il dit. Face à ces perturbations la présidente ordonne que l’on évacue l’accusé.
C’est au tour de la deuxième victime de témoigner, elle aussi en visioconférence depuis Bordeaux. Très traumatisée et très choquée c’est parfois avec difficulté qu’elle s’exprime. Comme la première victime, elle aussi était professeure. « Je sortais de cours pour aller chez moi et j’ai vu un individu qui s’approchait. Je croyais que c’était un élève qui venait vers moi pour me dire bonjour. Il a sorti un couteau ou une machette de son t-shirt et m’a donné un coup à la tempe. J’ai commencé à vomir du sang. Après coup on m’a dit qu’il avait pris mon sac et mon ordinateur. Mais sur l’instant je pense que c’était pour me tuer et non pas pour mon sac », déclare-telle Cette seconde victime revient de très loin. Elle a subi plusieurs opérations à la fois esthétiques et neuronales nécessitant des greffes de muscles et de tissus. « On a prélevé un muscle dans mon dos pour protéger la boite crânienne et maintenir la prothèse », indique-t-elle. Selon les médecins qui l’ont soignée, elle serait passée pas loin de la mort. Trois ans après les faits elle continue toujours un suivi psychologique ainsi que de la rééducation.
L’accusé est de nouveau appelé à la barre et la présidente lui demande par rapport aux témoignages des deux victimes ce qu’il en pense. Ce dernier essaie alors de noyer le poisson en faisant référence à d’autres affaires pour lesquelles il est mis en cause et se contredit dans ses déclarations. « Cette dame, elle m’accuse de choses fausses. C’est quelqu’un d’autre qui a fait ça. Quant au monsieur je ne me souviens pas de lui. Je ne l’ai jamais vu. On m’accuse pour rien », maintient l’accusé. – C’est pourtant chez vous, chez votre père, que ce dernier a trouvé des affaires appartenant aux victimes », rétorque la présidente. L’accusé a continué de nier.
Reste à savoir maintenant si les cinq jurés vont croire à son innocence, ou aux multiples « coïncidences » qui le mettent en cause. Ils devraient rendre leur délibéré en fin de journée.
B.J.