Il y a 75 ans de cela naissait, dans un monde meurtri par des années de conflit international, l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Une organisation située en Suisse, comptabilisant désormais près de 194 états membres et directement rattachée aux Nations-Unies. Cette date d’anniversaire enregistre également la création de cette journée mondiale dédiée à la Santé, visant aussi la réduction des inégalités à travers le Monde quant à l’accès de ses services fondamentaux. Des inégalités qui s’élèvent à hauteur de 30% de la population mondiale qui ne peut prétendre bénéficier de soins essentiels pour motifs de désertification médicale dans les pays développés et faute d’infrastructures adaptées dans les pays en voie de développement. Chaque année, une thématique précise y est abordée. Après « un Monde plus juste et en meilleure santé » en 2021 et « notre planète, notre santé » en 2022, c’est donc « la Santé pour tous » qui couvre cette édition 2023.
Une matinée participative, intelligemment construite
À l’origine et préparation de cet événement réussi, entre les murs de l’établissement de Tsararano, une armée de petites fourmis qui s’agite de manière quasi autonome depuis près de 4 mois. Des fourmis rattachées à la section BTS Services et prestations des secteurs sanitaire et social (SP3S) pour qui la mise en pratique du concret s’est astucieusement couplée à l’enseignement de leurs matières. « Après une enquête auprès de tous les élèves du lycée, nous avons pu établir une liste des spécialités et priorités Santé à aborder durant cet événement » nous précise Taandhima.
Une enquête exhaustive des besoins, au moyen d’un questionnaire 100% création interne, ayant par la suite servi de fil conducteur et d’orientation afin de contacter les partenaires escomptés. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le pari autonomie est des plus remarquables, au regard des 10 stands proposés et de l’organisation carrée qui s’y greffe. Aux côtés de chaque spécialiste, une armée de 1 à 3 BTS SP3S , afin d’assurer le bon déroulement et la quiétude des ateliers auxquels se joint une brigade de « Pat’Patrouille », comme ils aiment s’appeler, orientant les rotation et direction des 850 lycéens concernés et de leurs professeurs.
Sexualité, brisons les tabous
Bien que le poids du silence et des traditions perdure, il n’en demeure pas moins que les jeunes mahorais sont de plus en plus soucieux d’aborder des thématiques essentielles qui les touchent, notamment aux prémices de leur vie intime.
Des thématiques pour lesquelles l’orientation des questions se veut de plus en plus libre, aussi au regard d’un contexte extra-familial qui favorise les échanges « Nous autres, professionnelles santé, nous constatons que la parole et les saines interrogations se libèrent, garçons et filles confondus et cela est encourageant bien entendu pour la préventions des divers risques et responsabilités liés à la sexualité », souligne Raysate Abdallah, Chargée de la Santé sexuelle auprès de la Croix-Rouge qui depuis ce début d’année 2023 a obtenu, auprès du rectorat, autorisation de venir sensibiliser les élèves — en plus des autres partenaires territoriaux — au sein même des divers établissements scolaires en complément des infirmiers et de leur programme de 3 jours dédié à la Santé sexuelle.
Un thème subtil et incontournable qu’il serait bon d’aborder, selon les professionnels, dès la maternelle dans une approche de respect du corps, des parties intimes qu’on ne peut autoriser à toucher et plus tard, dans l’enseignement secondaire et tertiaire, revenir sur les notions de consentement, de pratique, d’estime de l’autre, en plus des moyens de protection et contraception. Pour Jade et Antoine, agents de prévention de l’association Nariké M’Sada, c’est aussi la représentation à travers la pornographie et la violence sexuelle qui sont des sujets abordés en plus de ce qu’engendrent les maladies sexuellement transmissibles. Des maladies de types VIH ou bien Hépatite B, pouvant être justement dépistées à leurs prémices au sein même des locaux de l’association à Cavani, au moyen de kits tests mis à disposition.
Ratissons large
Lorsque l’on parle de Santé, il est un facteur essentiel lié avant tout à une notion de connaissance, certes, mais aussi de prévention. Et notamment en notre département où la carence du corps médical et de ses diverses spécialités est un problème récurrent. Il en est cas au regard des professionnels dentaires par exemple. Seulement 15 dentistes recensés pour une population officielle de 310 022 habitants. Un gouffre que tente de faire entendre Lailati Mvoulana, animatrice UFSBD* « il est important que les jeunes comprennent qu’il ne faut pas attendre qu’il y ait un problème pour aller consulter car, non seulement il n’est pas dit que le rendez-vous pourra être pris le jour même, même s’il s’agit d’une urgence et en plus, cela coutera beaucoup plus cher qu’un simple rendez-vous préventif ».
Une approche préventive qui vise également l’hygiène corporelle, la puberté, l’intérêt de se laver les mains, de se couper les ongles, de changer régulièrement de sous-vêtements ou encore de se raser. Des rappels qui peuvent apparaitre basiques mais qui pourtant, dans les faits, sont aussi des découvertes pour certains notamment dans les approches environnementale et de toxicité liées à l’utilisation des serviettes hygiéniques et leur non dégradation. Des rappels exposés de manière fluide par l’Association Horizon pour lesquels les lycéens ne semblent pas bêtement gênés comme nous le confie Farouk (18 ans) : « Les règles ça n’est absolument pas sale par contre, c’est la première fois que je découvre ce qu’est une cup, c’est assez impressionnant… ». Une évolution des mentalités qui se généralise à proportion égale des maux et pathologies qui malheureusement croissent et/ou apparaissent, comme les phénomènes d’addiction au sens large voyant s’installer différents types auprès des jeunes publics.
En plus des drogues et boissons alcoolisées, représentant une lutte et un fléau depuis de nombreuses années, s’ajoute de manière insidieuse — car courante dans la société de tous les jours — des phénomènes de dépendances quasi addictives liés à la caféine ou encore à l’omniprésence des smartphones. Une prise de conscience et une réflexion participative que l’association Fahamou Maecha tente de construire auprès des lycéens présents.
Du côté de UFOLEP**, la priorité majeure est de ramener tout un chacun à la pratique sportive et l’activité physique pour tous et ce, même si les personnes présentent des pathologies chroniques tel que le diabète. En effet, en ciblant les exercices en fonction du public concerné, le sport contribue également au traitement d’un très grand nombre d’affections de longue durée et aide à prévenir notamment les maladies relatives à l’obésité*** mais aussi les risques neurodégénératifs ou encore psychiatriques liés à la sédentarité, au stress, à l’enfermement…
Durant toute cette matinée, les lycéens de tous bords ont donc pu se renseigner, échanger, participer et être interpellés durant presque 4 heures sur divers sujets corrélatifs à leur santé physique, physiologique mais aussi psychologique couronnant de succès cette édition impulsée par la dynamique et pleine implication des ces 1ère année BTS SP3S couvrant de légitime fierté leurs professeurs encadrants Naïma Khadraoui et Hoi Ho Tsz.
MLG
* L’ Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire (UFSBD) est un réseau d’associations régionales et départementales dont l’objet est de susciter, d’animer et de coordonner tous les efforts entrepris en faveur de la santé bucco-dentaire en France.
** L’Union française des œuvres laïques d’éducation physique est une association loi de 1901 et la première fédération affinitaire multisports de France ciblant 3 axes actuels sociaux prioritaires : sport-santé, sport-handicap et sport-durable.
*** Selon Santé Publique France, en 2019, 55,9%, des adultes de 15 ans et plus à Mayotte, étaient déjà en surpoids ou obèses (43,9% des hommes et 64,4% des femmes).