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Euclid Network ou quand les valeurs féminines, économiques et sociales mahoraises sont encore sous les feux de la rampe européenne

Pour la 3ème année consécutive, notre département attire l’attention du réseau européen Euclid Network et plus particulièrement son classement annuel Top 100 Women in Social Enterprise* en la non moins célèbre entité de la production audiovisuelle mahoraise : Jacqueline Djoumoi-Guez.

Petit par la taille, certes. Nourri de défis herculéens de tous bords, il va s’en dire. Et en retard sur son propre alignement national, c’est indéniable… pourtant, aussi caustique soit-il, le territoire de Mayotte incarne à lui tout seul un modèle de force et d’innovation notamment dans la culture économique, sociale et solidaire (ESS) et ce travers l’Europe, voire même à l’international. L’occasion d’une rétrospective condensée et mise en lumière légitime sur ces 3 incroyables portraits qui, par leurs convictions personnelles et engagements de terrain, portent haut et fort les couleurs de notre île et le plein mérite de la femme mahoraise. 

Petite introduction… 

Euclid Network, c’est LE réseau européen en pleine expansion basé dans le sud de la Hollande qui soutient les entrepreneurs sociaux ainsi que les leaders influents. Euclid Network, c’est au bas mot 500 000 organisations réparties à travers les 26 pays du vieux continent au drapeau bleu étoilé ainsi dans le Monde. Partenaire consultatif et stratégique de la Commission européenne, il siège également à l’ONU (Nations Unies) en qualité d’observateur du département Groupe de Travail. Sa mission première ? Impulser et renforcer l’entreprenariat social par l’interconnexion des capacités de tous et la mise en valeur de ce modèle économique porteur, loin d’une lubie candide à effet de mode, qui fait ses preuves par-delà les frontières et ce, depuis près de 15 ans. Et s’il est bien une idée reçue à briser, c’est que la notion de ’’social’’ n’est justement pas uniquement liée à l’approche associative ou encore humanitaire, comme on pourrait implicitement le penser.

Et les femmes dans tous ça ?

À l’occasion de la symbolique date du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, le réseau Euclid Network annonce officiellement son Top 100 des figures féminines leaders qui encouragent et/ou œuvrent pour l’entreprenariat social donc, mais aussi l’innovation sociale. En somme, une mise en valeur de ces femmes influentes qui incarnent l’Avenir et une reconnaissance certaine d’un parcours souvent nourri d’embuches et de sacrifices dans l’élaboration de leurs respectifs projets sociaux et économiques. 

Elles sont ainsi avisées par mail, près d’un mois en amont, de leur participation validée parmi une très longue liste à échelle européenne. Une surprise totale pour bon nombre d’entre elles sachant que leur inscription est le fruit d’une anonyme et bienveillante dénonciation qui fait l’objet par la suite d’une étude poussée par un jury multiculturel et international. Jury 100% féminin, totalement transparent et neutre qui n’inclut pas le vote d’une de ses membres si cette-dernière correspond à la même nationalité que la candidate en lice.

C’est ainsi que Maymounati Moussa Ahamadi en 2021 et Djémilah Hassani en 2022 ont figuré officiellement dans ce classement qui n’est pas des moindres. À l’heure de ces écrits, mardi 7 mars 2023, nous ne savons pas si Jacqueline Djoumoi-Guez fera ou non partie du Top100 final de cette édition 2023. Par contre, il est indéniable que nous saluions, pour la 3ème année consécutive, le fait qu’une ‘’entitéE’’ mahoraise soit de nouveau au devant de la scène européenne et internationale car au delà de la victoire personnelle, c’est bien de la positive notoriété de Mayotte dont il est question à travers le Monde et de la saine dynamique d’un but commun au moyen d’une mutualisation des forces vives, notamment féminines, qui composent cette île.

Maymounati Moussa Ahamadi

Femme politique, conseillère départementale de Dzaoudzi-Labattoir et ex-directrice de la BGE et de la CRESS Mayotte; fonction qu’elle occupait en 2021, lors de sa nomination européenne au Top 100 Women in Social Enterprise.

S’il y a bien un dénominatif que l’on peut lui attribuer, c’est celui de ’’précurseur’’ et le genre orthographique volontairement maintenu à la neutralité masculine est à l’image de ce qu’elle incarne comme force vive, vision novatrice et intelligente flexibilité. En somme, une main de fer mahoraise tatouée au henné dans un gant de velours des plus résistants. Maymounati c’est une expertise constante dans le monde l’entreprenariat depuis 2008 et la première personne sur Mayotte à avoir constitué à l’époque, dans le cadre de la BGE, des dossiers de demande de financements européens de type FSE (fonds social européen) et ce, en un temps record — et quelques nuits blanches — de 15 jours et les avoir de surcroît obtenus sauvant ainsi à l’époque l’emploi de ses équipiers. « Cela faisait 6 mois que j’avais été nommée directrice de la BGE et nos apports financiers jusqu’à lors nous avaient été coupés. Ma seule solution pour à la fois répondre à mes aspirations de modernisation de la structure, agrandir mon équipe et maintenir le salaire de mes collaborateurs était justement de taper aux portes de l’Europe. Pari risqué auquel je croyais et je ne me suis même pas rémunérée pendant près de 5 mois pour justement sauver la boite », se remémore l’intéressée. C’est cela Maymounati, une autodidacte de terrain qui aime les challenges et qui a aussi contribué à la pérennisation d’un dispositif Cress amené par son prédécesseur, tout à fait novateur à échelle européenne, en lien avec l’achat socialement responsable (ASR). C’est toute cette large contribution au développement économique, social   et solidaire de notre île, et ce parcours à travers les années, qui ont été étudiés au peigne fin par les membres du Jury 2021 d’Euclid Network valorisant ainsi le travail de la Petite-Terrienne, digne héritière des nos chatouilleuses, qui a offert à Mayotte, un bond en avant médiatiquement spectaculaire auprès des grandes personnalités européennes et internationales de l’entreprenariat social. Et son engagement politique au moyen d’apparitions médiatiques volontairement mesurées n’est que la continuité de ses idées pour lesquelles elle travaille d’arrache-pied dans l’ombre, continuant son combat pour le développement économique de notre île.

Djémilah Hassani

Illustration de cette nouvelle génération de femmes modernes aux racines mahoraises ayant suivi un parcours scolaire et universitaire, hors département, tout à fait brillant tout en ayant ressenti ce besoin intrinsèque de revenir fouler la terre insulaire de son enfance pour y apporter sa pleine et féminine contribution. Une contribution des plus incroyables, là aussi, parfaitement novatrice pour ne pas dire révolutionnaire, résolument tournée vers les territoires, géographiquement parlant, régionaux et internationaux. Djémilah, en quelques mots, c’est une boule énergétique solaire qui irradie de par son positivisme, sa clairvoyance et son plein engagement. Vegan extraterrestre qu’elle incarne face à l’âme mahoraise du brochetti, cela fait déjà près de 5 ans qu’elle a intégré les rangs de la Cress de Mayotte. Parlant couramment 5 langues (Mahorais, Français, Malgache, Espagnol et Anglais) et bredouillant noblement le Portugais, elle est la référente Stratégie internationale de l’ESS France (économie, sociale et solidaire), avec un volet appuyé dans l’approche ultramarine, et c’est bien tout ce travail d’ouverture, d’échange des pratiques, de rayonnement de la France ET de Mayotte en Europe mais aussi dans la zone Canal Mozambique et océan Indien, qu’Euclid Network est venu saluer l’année dernière; honorant par la même occasion sa pleine participation avant-gardiste dans la création du 1er cluster ESS océan Indien, intitulé BusinESS OI. Cluster qui a permis de mettre en corrélation les expertise et bonnes pratiques des territoires tanzanien, mozambique, comorien et mahorais. En somme, une coopérative ouverture au Monde impulsée depuis ce petit caillou bien souvent, et injustement, décrié ! «  Je suis fière d’avoir fait connaitre Mayotte de par une approche internationale et consulting. Aujourd’hui, ce sont des continents comme l’Amérique, l’Afrique, l’Europe et même l’Australie qui ont une écoute et un regard attentif quant à notre développement social, économique et solidaire. Aussi fou soit-il à croire, Mayotte incarne la référence internationale en terme d’ESS ! », s’exclame Djémilah. Une économie repensée qui valorise les nobles pratiques locales,  notamment inspirées par les femmes et les respectives traditions, tout en apportant une énergie universelle et une ouverture à l’autre. Belle reconnaissance pour cette ultramarine qui était, avant nomination, totalement inconnue au bataillon comme elle aime y repenser. 

Jacqueline Djoumoi-Guez

Comme le dit le vieil adage : jamais deux sans trois… Et quelle troisième femme mahoraise présentée aux yeux de l’Europe ! À la fois porteuse de traditions, de par son enfance sur l’île, elle est également le regard résolument tourné vers l’évolution et l’incontournable modernisation à laquelle on ne peut échapper, à moins de vivre en éternelle quarantaine et consanguinité notoire, dans une grotte ! Et encore… Titulaire d’un Master en sciences politiques et d’un autre en droit du travail, rien ne prédestinait Jacqueline à faire carrière dans l’univers audiovisuel, encore à dominante masculine et d’autant plus sur notre sol mahorais où elle a décidé de revenir vivre. « Le Monde du spectacle, des arts et de la culture, de manière générale, n’est pas quelque chose de reconnu chez nous. Et encore moins dans l’approche subventionnée. Pourtant, il a bien fallu que je vende mes  idées, mes projets, leur diffusion, que je professionnalise ma structure et rémunère mes équipes. Pour ce faire, je n’ai jamais bénéficié de subventions locales, je me suis toujours débrouillée de manière autonome et suis même allée taper hors département, directement à France Télévision par exemple », nous précise la directrice de Clap production, première entreprise audiovisuelle privée locale. 

Femme viscéralement engagée à faire évoluer les mentalités, notamment au regard de la place de la femme dans cette société mahoraise encore tiraillée par l’envie de pleine émancipation et le poids parfois restrictif des traditions, Jacqueline apporte cette touche pertinemment incisive, finement dosée et bienveillamment dénonciatrice dans ses productions afin de délivrer des messages qu’elle estime importants et libérateurs; elle qui a eu la chance d’ouvrir son esprit en des expériences hors département. 

Clap de début pour cette reconnaissance internationale qui s’offre à Jacqueline Djoumoi-Guez, heureuse sélectionnée à concourir pour ce Top100 Women édition 2023 – Euclid Network

Mais son combat ne s’arrête pas là. Aussi tournée vers la jeunesse, elle souhaite attirer l’attention sur le fait d’offrir un choix d’avenir résolument épanouissant, aussi dans l’approche professionnelle, en ce département où l’ambition des parents pousse les enfants à plutôt viser des métiers dits traditionnels mais surs… En ce sens, elle a créé la toute première bourse dédiée à l’audiovisuelle et au cinéma, pour laquelle son entreprise s’engage annuellement à hauteur de 1 500 euros par tête, pour 4 étudiants au total et ce, tout le temps de leurs études. Son but ? Susciter des vocations et l’élargissement du panel relatif au tissu professionnel dans notre département. Un département qu’elle affectionne tant et qui incarne, selon elle, la parfaite illustration et l’ADN même de ce qu’est l’économie sociale et solidaire notamment par le courage et l’intérêt commun qu’illustre la femme mahoraise dans son éternelle générosité. Ses engagements de terrain alliés à cette récente mise en lumière à échelle européenne, Jacqueline veut avant tout les dédier à toutes ces femmes qui symbolisent ses idées créatives et le moteur de ce qui l’anime. Un moteur qui se veut même bénévole au regard des spots publicitaires que sa société produit annuellement notamment en lien avec le droit des femmes.

À travers ces 3 identités bien singulières mais non moins talentueuses, Mayotte offre aux yeux du Monde cette intelligence à la fois pratique, émotionnelle, courageuse, novatrice et bien souvent révolutionnaire que la femme mahoraise d’hier et d’aujourd’hui revêt. En somme, des bâtisseuses du cœur, nourries par l’énergie de croire en un intérêt solidaire, social et surtout commun. Aussi ironique soit-il, cet indéniable talent local encore bien souvent critiqué sur son propre sol, a trouvé pleine consécration hors de nos frontières franco-mahoraises. Souhaitons à ces courageuses chatouilleuses 2.0 le plein épanouissement dans les nobles et respectifs engagements qui sont les leurs…

MLG 

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