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Inauguration des logements temporaires de Majikavo

Une dizaine de familles va pouvoir investir les locaux qui leur ont été construits à proximité de leurs cases actuelles, sur l’emplacement du Talus II à Majikavo. Aux raisons habituellement évoquées de précarité et d’insalubrité pour motiver leur destruction, s’ajoute pour ce quartier, celle de la mise en sécurité des habitants. Un jugement est attendu, qui va conditionner les modalités de la destruction.

Lors du procès en réponse à la vingtaine de référés suspension de l’arrêté préfectoral de démolition des habitations, avait été évoqué la longévité de ces cases en tôle occupées depuis des années. Le terme d’ « habitat durable » a même été employé par Me Hesler, avocat des plaignants, représentant Me Marjane Ghaem, par opposition à l’habitat insalubre. Il est vrai que ces cases continuent à grimper le long de la colline, dans un hasard vertigineux, dont certaines sont présentes depuis des dizaines d’années.

Ce qui n’empêche pas les aléas climatiques de se déclencher. Ainsi ce rocher tombé des hauteurs du talus en décembre 2017, ou l’éboulement de mars 2018 qui avait mis à nu les fondations de la maison voisine, ou encore celui guère plus loin, en mai 2018. Sans vouloir agglomérer toutes les catastrophes et vouloir peser dans la balance, le maire Assani Saindou Bamcolo évoquait lui la même année, l’éboulement qui avait laminé une case et provoqué la mort d’une famille.

Un rocher tombait des hauteurs de Majikavo Koropa en mai 2018

Dans le cadre d’une opération de Rénovation d’habitat insalubre financée par l’agence qui en a la charge, l’ANRU, la démolition de la zone dite Talus II est prévue, avant reconstruction de logement en dur un peu plus loin sur les hauteurs. Dans le laps de temps, il est prévu de reloger les habitants. Une partie d’entre eux s’était mobilisée en début de mois, pour accueillir la présidente de l’ANRU, Catherine Vautrin de manière pacifique et en brandissant des pancartes : « Non à la démolition massive », « Nous demandons au conseil départemental de nous aider à régulariser les terrains », etc. Certains avançaient ne pas refuser de partir, « mais nous voulons des maisons où nos voulons vivre avec nos enfants », « Nous voulons la régularisation de ces terrains, et les autorisation pour construire ».

Accroitre les capacités de relogement

Après un procès au tribunal administratif où les parties étaient entendues, plaignants et préfecture, le verdict du jugement est annoncé pour d’ici quelques jours.

De son côté, la mairie annonce ne pas être bloquée, et continue d’avancer sur son projet de rénovation de quartier, en inaugurant ce lundi les nouveaux logements, provisoires. « Les logements sont prêts, et les familles qui le souhaitent peuvent intégrer les lieux. Comme nous l’avions expliqué, elles sont dix à être concernées, et vont pourvoir entrer dans leurs nouveaux logements la semaine prochaine, après avoir rencontré l’opérateur social », nous indique Mélanie Guilbaud, Directrice du développement urbain à la mairie.

Et en mars 2018, ce sont les fondations d’une maison qui n’avaient plus d’assises

Sur 75 ménages identifiés, une partie a préféré opter pour leurs propres solutions, les services de la DEETS ont été force de proposition sur leurs logements d’urgence. Cette capacité réduite de relogement est un enjeu car elle freine les opérations de démolitions-relogement. Et c’est ce que reprochent les associations qui épaulent ces habitants.

A ce sujet le maire s’est engagé à ce que tous les habitants aient une solution de relogement ainsi qu’un accompagnement social. Des opérations de lutte contre les étrangers en situation irrégulière sont menées depuis plusieurs années dans le cadre de l’opération Shikandra.

Notifié par le muezzin

Pour éviter ce qui s’est passé à Carobole (Koungou), où tout avait été détruit, y compris des cahiers d’écoliers, une  prise en charge des effets personnels et de stockage est proposée et financée par l’Etat.

Une des habitations de relogement temporaire présentée à Catherine Vautrin

Une fois dans ces nouvelles maisons, les habitants reprennent leurs habitudes, « ils ne veulent plus en sortir après », soulignait Mélanie Guilbaud à Catherine Vautrin. Une habitante relogée dans un habitat en dur acquiesçait.

Me Hesler faisait également valoir qu’il n’y avait pas eu de notification individuelle de l’opération RHI auprès des habitants, et l’article 197 de la loi ELAN va même plus loin, «  A défaut de pouvoir identifier les propriétaires, notamment en l’absence de mention au fichier immobilier ou au livre foncier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune et sur la façade des locaux et installations concernés. » La DGA répond avoir respecté les règles : « Nous avons informé avec notification maison par maison pendant 6 mois, avec informations supplémentaires diffusées par la mosquée de Majikavo. Mais nous avons aussi expliqué que beaucoup d’habitants n’habitent plus ici, louent les cases, qu’elles ont achetées en pensant bien faire, mais à des personnes qui n’étaient pas propriétaires du terrain, et elles se retrouvent sans rien. Nous ne pouvons pas être redevables des désordres fonciers du passé. »

Les familles commencent donc à être relogées, mais la démolition du site doit-elle attendre la réponse judiciaire ? Oui et non selon Mélanie Guilbaud : « Nous avions prévu cette opération de Résorption d’habitat illégal, qui a pu être accélérée grâce à la loi ELAN. Si celle-ci nous est refusée, nous devrons passer par un permis de démolition comme sur le haut du Talus. C’est plus long et plus coûteux pour la mairie. »

Pour poursuivre l’opération sans provocation, le ruban des logements aménagés sur deux étages avec cuisines et sanitaires commun a été coupé par le préfet Thierry Suquet en personne ce lundi matin sans que la presse n’ait été invitée.

Anne Perzo-Lafond

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