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Mamoudzou

Les violences permanentes engendrent une escalade langagière

Les violences de ces derniers jours n’ont pas manqué de faire réagir la classe politique de l’île. Parfois à bon escient, souvent en manque de discernement, ces réactions montrent que la lucidité est la première à vaciller devant l’effroi et la consternation.

Les troubles à l’ordre public, les affrontements, les caillassages, les incendies de commerces ont, ces derniers jours, franchi un cap supplémentaire sur fond de règlements de compte entre bandes rivales. Les cycles de vendetta prennent des proportions affligeantes, les populations subissant les dommages collatéraux et leurs lots d’exactions. La classe politique locale ainsi que certains parlementaires n’ont pas manqué de réagir, au regard de ces effusions de violence, tel le maire de Mamoudzou qui a demandé « le déploiement sans délai du GIGN et des militaires pour mettre hors d’état de nuire ces terroristes et ainsi ramener une paix pérenne à Mayotte ». On sait depuis que c’est le RAID qui est envoyé.

Mayotte, un cas spécifique reconnu par le président de la République

Néanmoins, aussi vrai que la nuée porte l’orage, le cortège funeste des violences s’accompagne à son accoutumée d’une escalade langagière. Certes, en septembre dernier, le président de la République, dans le cadre de son annonce d’un projet de loi sur l’asile et l’immigration, dès début 2023, a tenu à mettre l’accent, comme l’a rapporté la presse nationale sur « deux territoires qui feront l’objet d’une attention toute particulière », la Guyane et Mayotte, où « il faudra sans doute (…) changer les règles avec beaucoup de force parce que la réalité géographique et démographique de ces territoires est profondément différente du reste du sol de la république ».

Une voiture calcinée finit de brûler ce lundi matin

Mais ce changement de règle semble pour certains revêtir les attributs d’un blanc-seing, un permis de tout faire, quitte à y abolir les garde-fous et les textes de lois. A la violence de la rue, répond celle de l’ignorance. Dans les deux cas, il s’agit de frapper aveuglément, sans retenue aucune. Ainsi les atermoiements de l’Etat à faire respecter le régalien sur le 101e département nourrit une hydre à deux têtes, chacune porteuse d’une vision jusqu’au-boutiste. De l’antienne de la guerre civile ânonnée à qui mieux mieux à la table rase des droits d’asile sans sommation, le florilège de la surenchère rappelle ainsi que « l’émoi et l’effroi ne font pas bon ménage avec le sang-froid » et que si l’essence et l’eau sont biens translucides, elles n’en ont pas pour autant les mêmes vertus pour circonscrire un incendie.

Des mesures existantes à utiliser à hauteur de leur potentiel

Interroger, comme le recommande le député Mansour Kamardine, « l’obligation de scolarisation des étrangers en situation irrégulière » ainsi que « l’accès gratuit à la santé pour les clandestins » ou encore « l’accès au logement social des étrangers délogés de l’habitat illégal » sont autant de propositions radicales, « loin des trémolos ‘droitdelhommistes’ », visant à supplanter l’inefficacité apparente des mesures déjà existantes.

Pourtant, en octobre dernier, les élus de l’île qui s’étaient rendus à Paris en délégation sont revenus, après avoir été reçus par les présidents des deux chambres ainsi que par le ministère des Outre-mer, avec des engagements forts de la part du gouvernement avec « des propositions très audacieuses, inédites, à la limite de ce que la République peut autoriser ». Qu’en est-il ? Certaines réponses existent déjà pour mettre sous pression les délinquants, à l’instar de la poursuite et de l’intensification des opérations de décasage telle que cela a été demandé par les maires lors du Comité de suivi des Assises en septembre dernier. Ainsi, la surenchère des uns ne doit pas pour autant éluder l’existence d’outils d’ores et déjà applicables, encore faut-il les mettre en œuvre dans la totalité de leurs potentiels juridiques.

Pierre Mouysset

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