Quinze jours auront donc séparé le délibéré de l’audience ayant mis en lumière les conditions dans lesquelles était survenu l’accident du travail d’un soudeur survenu le 5 mai 2016 sur le site de la carrière de Kangani.
L’arbre de l’accident cachait la forêt des conditions de travail
Ce jour-là, un des ouvriers avait alors laissé par inadvertance une rallonge électrique près d’un tambour d’acheminement de blocs de roche dans un concasseur. Happée par la machine, cette dernière avait dû être arrêtée afin de permettre la récupération des débris. Toutefois, alors que certains morceaux de la rallonge étaient toujours coincés, un des soudeurs, tentant de les récupérer au moment où le tambour redémarrait, a vu son bras écrasé entraînant une amputation du membre, au regard de l’ampleur de la blessure, ainsi qu’une interruption de travail de 120 jours.
Si l’employé avait alors reconnu sa responsabilité, cet accident avait néanmoins jeté une lumière crue sur les conditions de travail du site. L’inspection du travail s’était aperçue, quelques semaines après l’accident, que les grilles de protection sur les machines étaient enlevées afin de ne pas entraver le rendement. En outre, le titre de séjour de l’employé n’était plus en règle et la visite médicale obligatoire lors de l’embauche n’avait toujours pas été réalisée un an après l’arrivée du soudeur dans l’entreprise.
Deux années de prison avec sursis initialement requises
Autant de manquements ayant justifié le 20 septembre, que le ministère public ait requis deux années de prison avec sursis à l’encontre du chef d’entreprise réunionnais, ainsi que 100 000 euros d’amende pour l’entreprise. En effet, compte tenu de l’absence d’une délégation de pouvoirs clairement définie auprès du chef d’équipe, seul le délégataire était en position de pouvoir être condamné dernier.
Malgré sa plaidoirie demandant la relaxe de son client, l’avocat de Théophane « Guito » Narayanin ne sera pas parvenu à disculper le gérant de l’entreprise au regard des chefs d’accusation retenus contre lui à savoir : blessures volontaires avec incapacité supérieure à trois mois par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail d’un employé, de mise à disposition de travailleur d’équipement de travail sans information ou formation ainsi que l’embauche de salarié sans visite médicale. Il est condamné à un an de prison avec sursis et son entreprise à 100 000 euros d’amende dont 50 000 avec sursis.
Pierre Mouysset