« Les bons comptes font les bons amis », un adage populaire dont la teneur aurait pu éviter bien des tourments aux deux protagonistes de cette sanglante affaire remontant au 22 décembre 2018. « Vous dites qu’il y a un contentieux, une sorte de dispute pour une histoire de petite somme d’argent », indique la présidente du tribunal reprenant les faits tels que Mohamed les avait présentés lors de sa déposition. Si le tribunal n’entend pas entrer « dans les détails », compte tenu du caractère « dérisoire » de l’objet du litige, on apprendra, selon la version de Mohamed que ce dernier se serait rendu au domicile d’Idrisse afin de lui réclamer son dû.
« J’avais le couteau je n’ai pas pu résister »
« Vous étiez fâché car il ne vous avait pas remboursé, ni rendu le service convenu pour se faire excuser », continue la présidente. Effectivement, le dénommé Idrisse aurait dû creuser des trous pour des bananiers mais ce dernier, selon les dires de Mohamed, aurait refusé de s’exécuter alors même que le créditeur lui avait fourni les outils nécessaires à la réalisation de cette tâche.
« D’un coup, il se serait jeté sur vous et vous auriez reçu un coup de machette au bras et à la tête. Pour vous défendre, vous lui auriez donné un coup de couteau que vous aviez alors avec vous. Est-ce fidèle à la version des faits ? », interroge la présidente. « Oui ça c’est vrai », répond le prévenu avant de concéder : « j’avais le couteau je n’ai pas pu résister. Je l’ai lancé, je n’ai pas regardé où, dans quelle partie du corps. Il a voulu me donner un autre coup et je me suis protégé avec mon bras ». Résultat, l’homme présente, entre autres, une altération de la sensibilité à certains de ses doigts. Pour sa part, les coups portés à Idrisse, à la tempe ainsi qu’à la tête, au regard de son état critique, ont entraîné deux opérations sous anesthésie générale.
« Ce n’est pas très clair »
Dans ce mano à mano sanglant, les versions divergent, chacun tentant de se faire passer pour la victime de l’attaque. La présidente reprend les propos d’Idrisse. Il aurait alors indiqué que Mohamed « lui aurait porté un coup au niveau de la tempe et au niveau de la gorge après un accès de colère ». Concernant les lieux de l’altercation, si pour l’un elle a eu lieu devant le domicile d’Idrisse, pour l’autre, elle s’est déroulée à l’intérieur. Les versions s’emmêlent à tel point que la présidente soupire, « ce n’est pas très clair ». Dans son réquisitoire, le procureur de la République reviendra sur cet imbroglio des versions indiquant qu’« on aimerait savoir si c’est l’un et l’autre, ou l’un ou l’autre », avant de souligner que « personne ne peut dire qui a porté les coups en premier ».
La question de la légitime défense écartée
Néanmoins, une chose est sûre « c’est qu’il y a eu une altercation pour un contentieux financier d’un montant de 50 euros avec des coups portés qui auraient pu être, pour les deux individus, mortels ». Si la question de la légitime défense aurait pu éventuellement être avancée, le procureur balaye cette hypothétique option dans la mesure où Mohamed a pu s’échapper après les faits : « s’il a pu s’enfuir c’est qu’il n’était pas en légitime défense ». Le procureur requiert, dans son réquisitoire, deux ans de prison dont un avec sursis, à l’encontre des deux hommes. Le tribunal après en avoir délibéré va effectivement suivre la demande du procureur. Si les deux hommes sont condamnés à deux ans de prison, dont un avec sursis, un mandat d’arrêt est délivré à l’encontre d’Idrisse « qui a disparu », possiblement « aux Comores ».
Pierre Mouysset