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Trier ses déchets… pour quoi faire ?

On nous rabâche que c’est bien pour l’environnement, mais en dehors de ne pas surcharger le centre d’enfouissement de Dzoumogne, nous ne savons pas trop pourquoi nous séparons le plastique du verre dans nos poubelles. Nous avons balayé avec le responsable outre-mer de Citeo, les sujets du tri sélectif du territoire.

Lorsque les bacs tricolores sont apparus à Mayotte en 2014, on nous a demandé d’y déposer bouteilles en plastique, en verre, et nos canettes. Si une petite partie de la population avait attrapé le virus du tri en métropole, l’autre non. Les campagnes de communication ont œuvré dans ce sens, mais il reste encore beaucoup à faire, nous explique Nicolas Moullin, Responsable territorial Outre-mer de Citeo* : « Le volume de collecte est stationnaire. Depuis 2019, nous sommes à 400 tonnes de déchets par an en moyenne. » Pourtant, sur cette période, les déchets carton et papier ont été rajoutés aux trois premiers, récupérés dans une borne spécifique, « oui, mais notre parc de colonnes a chuté de 20% en raison des dégradations. Nous avons remis 100 colonnes ces deux derniers mois, puis il y en aura 130 supplémentaire en février, et nous allons en commander 150 pour 2022. »

Des bornes de tri, souvent incendiés, sont transformées en matériel pour les barrages. « Nous les substituons peu à peu par des colonnes métalliques, que l’on espère plus difficiles à déplacer, et qui offrent une meilleure surface d’affichage des consignes. » Il faut savoir qu’une seule borne coute 2.500 euros, une dégradation du mobilier urbain qui a un coût pour la société. En France, partout ailleurs qu’à Mayotte, ce sont les communes qui sont financées par Citeo et qui installent leur parc de colonnes de tri et organisent la collecte, par le biais de leur syndicat de gestion des déchets. « A Mayotte, c’est particulier, nous nous substituons au SIDEVAM en raison de ses difficultés financières et techniques, mais à long terme, il récupèrera la compétence. »

Nicolas Moullin (à gauche) inaugurait la campagne de pose de colonnes métal à Kani Keli, entourés des élus du SIDEVAM, de la commune et de l’interco

Un troc savon contre déchets

Bien que le carton ait été rajouté, nous n’avons toujours que 3 colonnes par installation, « les plastiques et le métal sont récupérés dans la même », explique Nicolas Moullin qui assure que c’est en raison d’un manque d’espace dégagé. Il y a désormais 600 colonnes à Mayotte, donc 200 points de collecte. Si cela évitera de voir les plus prisés déborder, il va falloir accroitre les capacités de collecte, « STAR Mayotte fait tourner deux camions grue actuellement, ils vont en rajouter. »

Le bac bleu est destiné aux emballages papier et carton, le jaune, pour les bouteilles et flacons en plastique et les emballages métalliques, et le vert pour les emballages en verre.

Gagner sur les hauteurs pour éviter que les canettes ne viennent joncher les artères aux premières pluies, c’est envisagé, « mais il y a un problème d’accessibilité pour les camions de la STAR qui collectent, avec des voies très étroites et pas carrossables. Nous voulons néanmoins rapprocher la collecte sélective de ceux qui en sont le plus éloignés. C’est pourquoi nous testons avec LVD Environnement Mayotte, et en partenariat avec l’Ademe, un essai de collecte sur 5 doukas. Les gens viennent rapporter des bouteilles en plastique, et au bout d’une certaine quantité, nous leur remettons du savon, des couches ou des serviettes hygiéniques. Nous en profitons pour communiquer auprès de ce public. On tente de s’adapter aux spécificité de chaque territoire ». Une opération menée jusqu’à la fin de l’année 2022, et qui emploie sur les stands d’accueil, des personnes éloignées de l’emploi.

Vers le développement du recyclage à Mayotte

Ces colonnes plus solides, vont se généraliser

Mais alors, où partent ces déchets et pourquoi trie-t-on ? « Une fois que les camions de STAR Mayotte ont vidé les colonnes, les déchets sont déposés sur un tapis de séparation à leur centre de tri de Longoni en Vallée III. Ils sont mis en balles, puis entreposés dans un container où ils vont partir pour des destinations différentes afin d’être recyclés. Le verre est acheminé en Afrique du Sud, les bouteilles plastiques et métalliques en Asie du Sud-Est ou vers l’Europe en fonction du coût des matières premières. »

Mayotte exporte donc ses déchets, faute de filière de recyclage sur le territoire, en dehors de quelques initiatives, dont celle de récupération de l’aluminium ou des huiles de cuisine usagées. « C’est le problème de tous les outre-mer, arriver à mettre en place des filières rentables de recyclage avec un volume restreint de déchets. Nous tentons d’impulser ça en lançant un Appel à manifestation d’intérêt pour un dispositif de recyclage qui intègre des idées nouvelles, adaptées au contexte et au volume. On ne pourra parler d’économie circulaire qu’à partir du moment où un territoire produira à partir de sa propre filière de recyclage ». Avec des créations d’emploi à la clé. Des petits clips explicatifs seront montés et diffusés sur les médias.

Une motivation supplémentaire pour trier ses emballages, accroitre le gisement des déchet recyclable, et créer de possibles filières.

Anne Perzo-Lafond

* Citeo est l’acteur français de la REP, Responsabilité Elargie des Producteurs, pour les papiers et les emballages ménagers : inscrit dans le code de l’environnement, il signifie que le producteur ou distributeur est responsable de, et finance, l’élimination des déchets provenant de leurs produits. Sans but lucratif, Citeo est donc financée par les entreprises pour prendre en charge la fin de vie, dont le recyclage, des emballages ménagers et des papiers

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