« C’est très dangereux, si une femme enceinte est frappée par son mari, elle peut perdre le bébé et ne plus avoir d’enfant. Ce pays a le droit de se débarrasser de ces violences physiques et sexuelles » plaide le jeune Abdoul-Ben, élève de 5e au collège Ouvoimoja de Passamaïnty. Entouré de ses camarades, il est venu place de la République à Mamoudzou pour dire stop aux violences conjugales. « Ce n’est pas bien de taper. Si on est en colère il faut se calmer pour résoudre les problèmes en discutant, on n’a pas le droit de pousser sa femme » complète son camarade Zakaria, rejoint par d’autres élèves. « Sinon la police peut venir » complète un autre élève.
Au total, ils étaient 16 à jouer plusieurs saynètes devant le comité du tourisme, avec une volonté commune : « participer à cette journée pour l’élimination des violences faites aux femmes » explique Malika Bouti, de l’Acfav, l’association d’aide aux victimes. « Plus particulièrement cette année était consacrée aux enfants exposés à ces violences conjugales. On a travaillé sur comment ces violences ont un impact sur le cycle de leur vie, dans le ventre de leur mère comme à l’adolescence, c’est un cycle. On grandit avec ces violences, avec des traumatismes, avec cette amnésie traumatique qui rentre dans le développement de leur vie » poursuit la militante qui rappelle que les violences conjugales « impactent l’enfant dans sa vie sociale, affective et scolaire. Ce sont des jeunes qui vont avoir du mal à se concentrer et seront démobilisés dans leur scolarité. C’est la raison pour laquelle cette année l’Acfav a souhaité mettre en lumière ce volet là ».
Un travail qui, mené de concert avec celui sur les violences sexuelles imposées aux mineur(e)s, a donné des résultats. Les ateliers menés avec l’Acfav en milieu scolaire pour libérer la parole ont permis d’orienter une maman vers les services de l’association pour témoigner de violences intrafamiliales.
« Dans une scène, des adolescents, un garçon et une fille devaient se confronter physiquement, mais le garçon a dit stop parce qu’il voulait montrer qu’il ne bat pas les filles, c’est pour lui impossible car il a été exposé à des victimes de violences » poursuit Malika Bouti.
Autour d’elles, les enfants débordaient de volonté de partager le fruit des échanges menés au collège, voire leur expérience personnelle, et leurs ressentis après les projections de clips de sensibilisation, le tout se mêlant dans un cri du coeur collectif.
« Je suis au collège un programme sur la sexualité, et je veux informer tout le monde qu’il ne faut pas faire ça, violences comme harcèlement » insiste Ben. « Au lycée, une fille a été entraînée aux toilettes par un garçon qui voulait faire l’amour avec elle, et comme elle ne voulait pas, il l’a giflée. Une autre recevait des messages disant qu’elle était moche, et a voulu se suicider » relate le jeune garçon visiblement éprouvé par ces réalités détestables.
Preuve s’il en est, que les messages martelés commencent à passer, et que les enfants, trop souvent victimes ou témoins de violences, ne demandent qu’à être les ambassadeurs dont cette cause a besoin.
Y.D.