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Il pensait avoir trouvé une astuce pour éviter les agios… Mais se retrouve condamné au tribunal

Un client de la BFC, fréquemment à découvert malgré de confortables revenus, pensait avoir trouvé une super astuce contre les frais bancaires. Il déposait des enveloppes vides à l'automate pour encaisser temporairement les sommes indiquées dessus avant de restituer l'argent une fois sa paye versée. Pris dans un "engrenage", il a réitéré l'arnaque des dizaines de fois, et la banque a fini par porter plainte.

La morale de l’histoire pourrait être « une fois, ça passe. Vingt fois, ça casse ». Bien qu’occupant un poste de direction, et avec deux salaires à la maison, ce client de la BFC, père de 11 enfants, était tous les mois à découvert. Une mauvaise gestion du budget familial qui commençait à lui coûter cher.

Puis quand la BFC a mis en place des automates de dépôt d’espèces pour les particuliers, le cadre a eu une idée malheureuse : déposer une enveloppe vide en y indiquant un montant, malgré les nombreux avertissements sur les contrôles systématiques inhérents à ce type de dépôts d’argent. Mais dans un premier temps, la manœuvre a atteint son objectif : l’enveloppe déposée amenait son compte bancaire à être approvisionné de la somme indiquée dessus. 7 jours plus tard, le contrôle manuel de l’enveloppe conduisait au prélèvement automatique de la somme frauduleusement touchée sur son compte. Entre temps, le compte était approvisionné, et le client peu scrupuleux évitait ainsi les frais de découvert et les agios. Habile. Mais ce qui aurait pu passer pour une grossière erreur avec un dépôt de 30€ et un de 200€, a vite été perçu comme une escroquerie quand le montant cumulé des dépôts d’enveloppes vides a atteint les… 2700€.

Dès lors, la direction de la banque a convoqué le client pour avoir des explications, rendez-vous auquel il ne s’est pas présenté « pour motif professionnel ». Ni une ni deux, la banque a saisi la justice, portant plainte pour escroquerie. C’est ainsi que l’homme, qui n’a donc jamais gardé un centime de l’argent frauduleusement touché plus d’une semaine, s’est retrouvé devant le tribunal judiciaire.

« Je traversais une période de difficultés financières, malgré mon salaire la vie est chère et j’avais du mal à finir les mois, j’avais demandé des facilités, mais il n’y a pas eu de réaction. Je savais pertinemment que je ne pouvais pas tromper la banque, il est bien mentionné sur le bordereaux qu’il y aurait une vérification des billets avant que l’argent soit viré. Le dépôt se fait et 7 jours après il y a une vérification à chaque fois. Il y a eu une régularisation automatique avec prélèvement sur mon compte, à chaque fois je m’arrangeais pour que la somme soit disponible sur mon compte pour la régularisation » explique le prévenu, persuadé qu’il n’y a pas eu de « préjudice notable » pour la banque.

« Vous vous rendez compte qu’en faisant ça vous vous octroyez un prêt gratuit par la banque ? » l’interroge la présidente, agacée de le voir minimiser la gravité de la manipulation. « Dès lors que ça vous évite de payer des Agios, ça crée un préjudice pour la banque » estime-t-elle.

Escroquerie vs état de nécessité

Se disant « peiné » et « honteux » de se retrouver à la barre, l’homme assure avoir juste voulu traverser une mauvaise passe. « J’avais l’intention d’assumer et de payer » jure-t-il. Sur ce point, il n’a pas été déçu. Outre l’action judiciaire, la banque a supprimé sa carte bleue et il se retrouve fiché en banque de France.

Insuffisant pour la procureure Sarah M’Buta, pour qui « il y a un préjudice réel, peut être que des employés ont craint qu’on puisse croire que c’est eux qui ont pris l’argent. Que vous ayez remboursé les sommes, ça n’entre pas dans la définition des textes. Une peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis simple serait une peine pertinente, dissuasive et qui ne mettrait pas en péril l’équilibre financier de la famille ».

Me Nadjim Ahamada défendait le client malhonnête

Une lecture que ne partageait pas Me Ahamada, avocat du prévenu, pour qui « la banque n’est pas notre amie ». « Nous avons tous du mal à avoir un conseiller, quand on a des difficultés, la banque ne nous aide pas. On paye tous des frais faramineux. Il traversait une période difficile, et il s’est laissé tenté par ce mécanisme » analyse l’avocat. Pour lui, la relaxe se justifie triplement : absence de préjudice pour la banque car celle-ci a récupéré les sommes, plus des intérêts notoires, absence d’élément moral, son client n’ayant pas eu l’intention de garder les sous plus d’une semaine à chaque fois, et enfin l’état de nécessité, prévu par la loi. « Quelle est l’intention, si ce n’est de se donner de l’oxygène pour une semaine le temps que le pot au rose soit découvert, le temps de respirer et entretenir sa famille ? On peut le pointer du doigt mais quand on a la responsabilité d’une famille on fait ce qu’il faut pour la nourrir. C’est ce qu’on appelle l’Etat de nécessité. »

Un état de nécessité qui aurait pu être accordé à un prévenu en grande pauvreté, mais qui n’a pas convaincu le tribunal face à ce cadre supérieur gagnant plusieurs milliers d’euros par mois. Il écope finalement d’un travail d’intérêt général. S’il ne l’effectue pas, ce sera 2 mois de prison ferme. Une peine de prison avec mandat de dépôt… aurait sans doute sonné comme un bien mauvais jeu de mot.

Y.D.

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