« C’est un phénomène très rare », commente laconiquement Bertrand Aumand, chef du service Mayotte à l’Insee à la lecture de ce chiffre des plus percutants : en 2020 l’espérance de vie à la naissance a reculé de trois ans, passant ainsi de 76 ans à 73 ans. Un fait rare donc, et même inédit au plan national – il est toutefois probable que la situation sanitaire vécue par la Guadeloupe et la Martinique donne lieu à des évolutions semblables pour l’année 2021 – liés selon l’Insee aux épidémies de dengue et de coronavirus qui ont touché l’île.
Laquelle a ainsi payé un lourd tribut en 2020 avec une surmortalité de 25% (190 décès) par rapport à l’année précédente quand la métropole voit ce malheureux taux plafonner à 9%. Seule catégorie d’âge épargnée par cette surmortalité : les moins de 25 ans. « Ce qui tombe bien car la population est en majorité jeune », commente Bertrand Aumand.
Ce qui tombe mal, en revanche, c’est que les choses sont allées de mal en pis durant les premiers mois de 2021 (jusqu’à juin) en lien avec le pic épidémique. 91% de surmortalité chez les plus de 75 ans, + 65% pour les plus de 50 ans, ou encore + 134% chez les hommes et + 61% chez les femmes. Dans le même temps, la vie faisait son rattrapage avec une « reprise très sensible » des naissances : + 12% de février à juillet 2021 par rapport à la même période de 2020. « Si on garde ce rythme, on dépasserait les 10 000 naissances cette année », fait savoir le chef du service Mayotte à l’Insee, qui voit là « une forme de rattrapage ».
Baisse des naissances en 2020
Car, autre fait marquant de 2020 : le nombre de naissances a baissé de 6%, portant le nombre de bébés nés cette année à 9180 contre 9770 en 2019. L’indice de fécondité reste toutefois largement plus élevé qu’ailleurs sur le territoire national puisque l’on comptabilise en moyenne 4,2 enfants par femme à Mayotte contre 3,6 en Guyane et 1,8 en métropole. Autre élément stable, les trois-quarts des enfants nés ont une mère étrangère. En revanche, les pères sont plus souvent français. 56% des nouveaux nés de 2020 ont au moins un parent français et naissent ainsi français.
Côté âge des mamans, on observe une évolution positive avec la baisse continue de la part des mères mineures. En 2020, on enregistre tout de même 90 enfants issus de mères de moins de 15 ans.
Autant d’éléments chiffrés donc, venant rappeler la singularité de notre département, comme sa fragilité à l’aune de la crise sanitaire.
Grégoire Mérot