Mayotte manque de main d’oeuvre qualifiée. Ce n’est pas un scoop, et cette réalité qui frappe aussi bien la santé que l’éducation ou la construction conduisent les employeurs à recruter à l’extérieur, ce qui génère du turn-over et pénalise les chantiers entrepris.
A cela s’ajoute une demande croissante, que les entreprises locales peinent à satisfaire faute de personnel.
« La multiplication des chantiers fait qu’un chef de chantier en a plusieurs à gérer, face à ces conditions de travail beaucoup font le choix de partir vers la fonction publique en quête d’une meilleure sécurité d’emploi » concède Anfane Hafidou, DGA au conseil départemental. Ce dernier rappelle la volonté du conseil départemental de mettre l’accent sur la formation professionnelle dans les domaines en tension, comme le médico-social ou la santé, mais aussi le BTP. C’est dans cet esprit qu’a été lancée ce mardi une première promotion de futurs chefs de chantier. La douzaine de stagiaire commence ce mois-ci une formation de deux ans en alternance qui débouchera sur un Bac+2 en travaux publics. Une formation portée par le Département, le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et le Greta.
Actuellement, « on a surtout des difficultés à trouver des compétences et à les maintenir dans nos activités, or, la première recherchée c’est la gestion de chantier. On veut viser sur le long terme » assure Ahmed, responsable d’une TPE spécialisée dans le second-œuvre. « Autre difficulté », poursuit-il, « dans une TPE, le salarié peut trouver de meilleures conditions en traversant la rue. Donc il y a de l’emploi, la demande est sur le territoire ».
« On est à la bourre, on a vraiment besoin d’avoir rapidement des gens compétents dans les entreprises. C’est la première formation de ce type, il en faudrait plein d’autres » encourage le président de la fédération mahoraise du BTP. Message reçu : Anfane Hafidou prévoit déjà de doubler voire tripler l’effectif de la promotion 2022. Entre les chantiers sportifs pour les jeux des Îles, l’objectif de 6000 logements en 10 ans fixé par la SIM et la classe qu’il faudrait bâtir chaque jour pour faire face à la démographie, les enjeux du BTP sont colossaux. Et les futurs professionnels peuvent être rassurés, même sans avoir à quitter Mayotte, « votre carrière est déjà faite » promet un employeur.
Un avenir bien tracé dans un secteur en forte demande
Tous les professionnels présents à ce séminaire de rentrée s’accordent en effet sur ce point : les futurs diplômés ne manqueront pas de travail dans leur branche, mais surtout, ils ne seront pas enfermés dans le poste pour lequel ils se forment. « On voit des techniciens quitter l’entreprise pour aller enseigner, en tant qu’entreprises on a du mal à lutter contre ça » regrette un des responsables de la SIM, premier promoteur immobilier de Mayotte et grand demandeur de ce type de compétences. « Vous entrez dans le monde du travail à 18 ans, vous aurez 5 ans d’expérience d’avance par rapport à un ingénieur qui a fait plus d’études, donc si vous êtes motivés, aucune porte ne vous sera fermée, vous pourrez monter » assure aux jeunes stagiaires un ingénieur du BTP venu les informer sur les débouchés. En clair, les opportunités sont multiples, et les jeunes bac+2 peuvent d’ores et déjà se rêver en futurs ingénieurs, au gré des promotions et formations internes. Un métier d’avenir donc.
Parmi la douzaine de garçons, Faïda Mohamed MMadi fait figure d’exception. La seule fille de la promo s’est inscrite sur le tard et n’a pas encore d’entreprise pour l’accueillir. Bourrée d’ambition et de motivation, elle ne s’inquiète pas pour l’avenir.
« J’ai fait un bac général, beaucoup d’autres stagiaires ont fait un bac pro. Certains disent que c’est handicapant mais moi je suis vraiment motivée pour travailler dans le BTP, je suis très déterminée et ça ne me fait pas du tout peur. Mon objectif c’est de devenir architecte. L’alternance permet d’avoir des compétences et d’apprendre un métier, c’est très apprécié.
Cette opportunité m’aidera à atteindre ce but.