28.8 C
Mamoudzou
mercredi 22 janvier 2025

Attaque du commissariat : l’œuvre d’un marginal sans motivation religieuse

Deux jours après l'attaque à l'arme blanche survenue au commissariat, la motivation terroriste semble définitivement écartée, le parquet terroriste ayant jugé inopportun de se saisir de l'affaire. Un juge d'instruction de Mayotte enquête désormais sur ce qui pourrait être une tentative de suicide par police interposée.

L’homme interpellé le 6 avril vers 11h au commissariat après avoir attaqué un policier a-t-il tenté de tuer, ou de se faire tuer ? C’est un des points que devra éclaircir le magistrat instructeur, saisi de faits de tentative de meurtre à ce stade.

Ce jeudi soir, le procureur Yann Le Bris tenait une conférence de presse pour faire le point sur les avancées de l’enquête concernant cette attaque, peut-être trop rapidement qualifiée de « terroriste ».

A l’origine de cette supposition, le témoignage de policiers qui ont entendu l’homme crier « Allahou Akbar ». Selon le procureur, il ne s’agirait toutefois que d’une partie d’un ensemble de vociférations prononcées par l’individu.

Après deux jours d’enquête, d’auditions, d’expertise psychiatrique et d’une analyse minutieuse de ses fréquentations, il ressort plutôt le portrait d’un homme destructuré, « en voie de marginalisation, voire de clochardisation » dit le procureur. Un homme qui se dit musulman mais ne semble pas vraiment pratiquant et ne fréquente pas de mosquée particulière. De toutes les auditions, rien ne permet de déduire une motivation religieuse ou politique de son passage à l’acte. Tout au plus selon le parquet, l’homme a-t-il voulu « faire parler de lui et de sa situation ». Et si le parquet de Mamoudzou a travaillé en lien serré avec le parquet antiterroriste de Paris, ce dernier n’a pas retenu l’affaire comme étant de sa compétence.

C’est plutôt en effet la situation du jeune homme d’une trentaine d’années, pour le moins précaire, qui serait l’élément déclencheur. L’homme, ressortissant israélien natif des territoires palestiniens, résidait jusqu’en 2020 en métropole où il était détenteur d’un titre de demandeur d’asile. Il s’était rendu à Mayotte pour un emploi qu’il a perdu en raison de sa fragilité psychologique, avant de s’isoler totalement dans un banga, et d’y développer un début de « délire de persécution ».

Une tentative de suicide par police interposée ?

Autre point notable, le commissariat n’était pas spécialement visé. L’homme s’était d’abord rendu à la Poste, puis devant un restaurant, avec à chaque fois l’intention de « se faire remarquer ». En passant devant le commissariat, il a vu une voiture de police franchir le portail et a profité de l’occasion pour s’y engouffrer. Là il a sorti de sa veste une fourchette à barbecue à deux pointes (et non une pioche comme on a pu le lire par ailleurs). Un policier a tenté de le maîtriser à l’aide d’un Taser, ce qui n’a fait qu’énerver l’individu qui s’est jeté sur le fonctionnaire, le faisant chuter, avant de lui porter plusieurs coups. Le policier n’a heureusement pas été blessé par l’arme. Il a reçu 8 jours d’ITT pour des dermabrasions liées à sa chute, et il est surtout « très choqué » note le procureur.

Yann Le Bris a confié l’enquête à un juge d’instruction qui a mis l’homme en examen pour tentative de meurtre

En résumé, il s’agit selon toute vraisemblance d’un acte isolé, d’un individu qui ne présente pas d’altération du discernement selon le psychiatre, mais une personnalité très fragile et une situation d’isolement total. Sans motivation religieuse aucune, il dit surtout avoir voulu alerter sur sa détresse. Le parquet a émis l’hypothèse que le suspect ait pu souhaiter en finir avec la vie, s’en prenant à un policier avec l’espoir de se faire tirer dessus.

Mis en examen pour tentative de meurtre sur personne dépositaire de l’autorité publique dans une enceinte administrative, il a été placé en détention provisoire dans l’attente de son jugement.

Y.D.

Partagez l'article:

Société

NEWSLETTER

Recevez gratuitement les articles

du Journal De Mayotte

Nous ne vous enverrons jamais de spam ni ne partagerons votre adresse électronique.
Consultez notre [link]politique de confidentialité[/link].

Les plus lus

Articles similaires
Similaire

« On nous refuse tout », le cri d’alerte des professionnels de santé libéraux de Mayotte

Un mois après le passage du cyclone Chido, les professionnels de santé libéraux dénoncent des conditions de travail "toujours intenables".

L’utilité des rapports parlementaires sur la gestion des risques naturels en Outre-mer

Le 27 mai 2024, il y a donc 8 mois, la commission d’enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outre-mer de l’Assemblée rendait son rapport. Idem pour la Délégation sénatoriale aux Outre-mer. Des feuilles de route sur les écueils à éviter et les préconisations à suivre. Avec en préalable, l’installation d’un radar météo.

Justice : un an d’emprisonnement avec sursis pour « un stagiaire du vol »

e tribunal judiciaire de Mamoudzou retrouve petit à petit son rythme habituel après Chido. Ce mardi, un jeune homme de 22 ans a été jugé pour vol et tentatives de vols pour des faits qui se sont déroulés entre 2022 et 2024. Le sang du prévenu avait été retrouvé à La Poste, l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique (ADIE) et la bibliothèque de Dzoumogné.

À Mayotte, les prix des billets d’avion s’envolent…

Lors du passage du cyclone, l’aéroport a été ravagé, provoquant l’isolement aérien de l’île pendant plusieurs jours. La reprise des vols commerciaux le 1er janvier a permis à des familles séparées pendant le cyclone de progressivement se retrouver. Malgré cela, certains habitants tardent toujours à rejoindre l’archipel, en raison de la cherté des billets d’avion.
WP Twitter Auto Publish Powered By : XYZScripts.com