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Le rectorat crée un « plan violences » pour agir « en profondeur »

Un professeur qui violente ses élèves. Un autre agressé en protégeant une adolescente dans la rue. Les violences sont omniprésentes dans et autour des établissements scolaires. Le rectorat a décidé d'agir à grande échelle pour y mettre fin, "sans omerta" mais "sans stigmatisation" assure Gilles Halbout.

Ce jeudi matin, des lycéens du LPO de Kawéni ont manifesté leur raz-le-bol des violences qui troublent le chemin du lycée. Cette action spontanée des adolescents faisait suite à l’agression d’une élève quelques jours auparavant. Cette dernière a été prise à partie devant la MJC de Kawéni. Elle a reçu le secours d’un professeur qui a lui aussi été victime de violences dans la foulée. Les élèves réunis devant l’établissement dénoncent ce climat d’insécurité qui les menace sur le chemin de l’école. Ils réclament un arrêt de car scolaire juste devant le lycée pour éviter de parcourir ces dizaines de mètres qui les angoissent.

Une solution à court ou moyen terme que n’exclut pas Gilles Halbout, le recteur, qui veut néanmoins « agir sur le fond ». Le fond, c’est ce climat de violences, parfois justifiée par une partie de la population, et qui se manifeste sous bien des formes. Il y a les violences crapuleuses comme le cas cité ci-dessus, mais aussi les bagarres entre villages, les violences domestiques, notamment faites aux femmes, et parfois même, venant des enseignants eux-même. Ainsi en décembre, le recteur a pris la décision de suspendre à titre conservatoire un professeur des écoles de Passamaïnty qui avait fait l’objet de signalements, il aurait pris pour habitude de brimer voire violenter ses élèves. Eloigné de l’établissement, il s’est vu proposer une formation pour renouer avec une pédagogie acceptable. Mais ce cas « nous a doublement interrogés » indique le recteur. En effet, la mesure disciplinaire envers cet enseignant a motivé une manifestation spontanée de parents d’élèves pour le soutenir, « ce qui pose la question de la justification des violences ».

« La violence ne soigne rien »

C’était un des points de départ du « plan violences » que le rectorat devrait prochainement dévoiler. Ce plan sera mené conjointement par le rectorat, le procureur et l’ARS. « Avec le procureur on a un premier thème à traiter qui est celui de la vengeance . On va aussi travailler avec l’ARS sur des questions de santé, sociales et sanitaires, car la violence fait du mal, physiquement mais aussi sur du long terme. Elle ne soigne rien. »

Ce plan viendra en complément des mesures déjà prises, telles que les présences accrues aux abords des établissements scolaires, le dispositif des élèves pairs « encadrés et formés par des gendarmes pour déceler les signaux de montée de violence et être à l’écoute des autres jeunes ». Un système mis en place à Kahani et Sada et prochainement à Kawéni « où ce qui se passe dehors pèse sur la vie scolaire » déplore le recteur.

Le message global sera de dire « aux élèves que la violence ne doit pas être acceptée, y compris par des adultes ». « Avec cette réflexion, on ne va pas tout régler, mais en parler peut libérer certaines souffrances. La violence ne doit pas être la norme » plaide Gilles Halbout.

A Montpellier aussi

Ce dernier, arrivé de Montpellier, précise que les violences ne sont pas l’apanage de Mayotte. « Là bas il ne se passe pas une semaine sans qu’un jeune soit agressé Place de-la-Comédie, à proximité immédiate du prestigieux lycée Joffre, il n’y a pas de quoi stigmatiser les Mahorais ». A une différence près, c’est qu’à Montpellier « quand quelqu’un subit des violences, il porte plainte et ça se sait ».

Gilles Halbout durcit le ton et veut prendre le sujet des violences à bras-le-corps

D’où l’intérêt de libérer la parole et de travailler conjointement avec le procureur. Pour que les faits graves y compris venant d’enseignants soient poursuivis et que la parole se libère.

A ce jour, plus de 300 signalements, informations préoccupantes ou signalements en justice, ont eu lieu depuis sa prise de fonction. Un chiffre en forte hausse assure-t-il.

« Mes assistantes sociales trouvent, et elles ont raison, que ça ne va pas assez vite. Mais je veux qu’on reste dans cette dynamique de ne rien enterrer ». Sans parler d’omerta, le chef du rectorat fait le constat d’un certain « renoncement » face à la violence et dit assumer sa politique qui se veut à la fois « humaniste » en donnant sa chance à tout le monde, mais aussi ferme.

« Il ne s’agit pas de stigmatiser les uns ou les autres, mais de remettre les compteurs à zéro » conclut-il.

La convergence passe aussi par là.

Y.D.

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