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Certifiée, la CMA booste à la fois les jeunes, les métiers de la mode et la brique de terre

Fier d’avoir mené ce combat qui place la Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Mayotte sur le devant de la scène, son secrétaire général, Jean-Denis Larroze nous l’avait annoncé : il a obtenu la certification ISO 9001 version 2015. A la fois une planche de salut, puisque la loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel impose une certification à tous les Centres de formation avant le 1er janvier 2021, et un catalyseur de marchés, « la certification est un ‘plus’ pour décrocher des fonds européens. »

Jusqu’à présent, ce sont les organismes financeurs des formations, comme OPCALIA, ou la Dieccte, qui s’assuraient de la capacité du prestataire à dispenser une formation de qualité, mais désormais, l’article 5 de la loi introduit l’obligation pour ces derniers d’être certifiés. Tous ne sont pas concernés, mais ceux qui veulent continuer à travailler avec l’Etat, le conseil départemental/région ou Pôle emploi, devront s’y plier.

La Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Mayotte a choisi cette voie exigeante, seul avec le RSMA à être certifiée. « C’est structurant pour nous, c’est un bonus pour Mayotte puisque nous sommes les premiers à l’être, ainsi que pour les bénéficiaires de formations et ceux qui nous financent », déclarait Jean-Denis Larroze, devant les médias ce jeudi.

Un investissement de 50.000 euros, qui impose de remettre au pot prés de 15.000 euros pour les contrôles annuels. « Si des anomalies mineures sont détectées, nous devons les résoudre, et en cas d’anomalies majeures, la certification est suspendue pendant 3 mois. »

« Un peu comme une maison des Compagnons »

Faïza Saïd va faire souffler une brise féminine à la CMA

Et un atout qu’il convient de capitaliser en diversifiant les formations. La première s’intitule « Neet Work », un mix entre « Not in education, employement, or training » et le travail en réseau, ‘network’, qui s’adresse à ceux que la Direction du Travail a appelé les « invisibles » dans son dernier appel d’offres. La CMA France ayant répondu à un appel à projets IEJ (Initiative Emplois Jeunes), 14 projets ont été retenus dont celui de Mayotte. Il s’agit de repérer les jeunes sortis des dispositifs publics et de les ramener vers l’emploi.

Sur un mode qui pourrait être vu comme une déclinaison du RSMA, avec deux sessions de six semaines les attendent cette année, et idem en 2020. Internes pendant 4 semaines avec un moniteur éducateur et un éducateur spécialisé, ils suivront une remise à niveau tout en participant aux tâches ménagères, « dès 5 heures du matin et couchés tôt, un peu comme dans une maison des Compagnons ». Puis ils partiront une semaine à Madagascar, à Diégo, dans un Centre de formation au chantier naval de Diego, qui est venu à bout des bandes de jeunes qui terrorisaient la population, « aujourd’hui, ils sont 400 à être sortis de la délinquance et à avoir un boulot ». Ils suivront des ateliers pratiques de chaudronnerie, de charpentier de marine, « des formations qui n’existent pas à Mayotte, et qui pourront ensuite développer des métiers ici. » En échange, le centre de formation malgache profitera de la certification de la CMA pour se structurer. Puis retour à Mayotte pour boucler la formation et être dirigés vers l’emploi.

Brique de terre, raphia, bambou et vétiver

Booster la brique de terre compressée made in Mayotte

Autre projet ambitieux, la création d’une Ecole Régionale des Métiers de la mode, portée toujours par la CMA, et Faïza Saïd, qui vient d’être recrutée, et qui détaille : « Nous allons proposer des formations avec plusieurs spécialités, couture, stylisme, maroquinerie, esthétique, parfumerie, etc. J’ai déjà ouvert plusieurs ateliers similaires en Afrique de l’Ouest. » Grâce à un accompagnement du conseil départemental, « qui nous aide beaucoup désormais », glisse Jean-Denis Larroze, et des financements OPCO (les nouveaux Opérateurs de compétence, financeurs des formations), et des fonds européens, l’école devrait ouvrir fin août. Des partenariats sont déjà noués, avec Décathlon, Princesse Tamtam, avec en prévision des stages chez des grands couturiers.

La Chambre veut aussi épauler les entreprises qui ont du mal à trouver du personnel compétent sur place à Mayotte. « Nous allons découper le titre de formation en plusieurs unités de valeur », des grades que le jeune pourra franchir les uns après les autres, « lors de contrats de professionnalisation au sein des entreprises. » Un dispositif qui se heurte à la frilosité des artisans, l’un d’entre eux, présent, évoquait sa difficulté : « Je n’arrive pas à dégager 500 euros pour les payer au titre du contrat de travail. »

Histoire de se tourner vers l’avenir en se basant sur le passé, le Pôle Régional d’Innovation est créé et se penche sur l’historique brique de terre comprimée de Mayotte, certifiée ATEx (Appréciation Technique d’Expérimentation) par le Centre scientifique et technique du bâtiment en 2018. « Seront intégrés d’autres matériaux locaux entrant dans la construction, comme le raphia, le bambou et le vétiver ». Ce pôle sera couplé avec un laboratoire de recherche, « où participe actuellement Art Terre ».

Parmi les autres projets, une coopération avec les acteurs du BTP à Anjouan, « avec la formation de 72 artisans », ou une aide à la structuration de la Chambre d’artisanat de Diana (Madagascar).

Pour mettre en place tous ces projets, la CMA a étoffé son équipe qui se monte désormais à 18 collaborateurs.

Anne Perzo-Lafond

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