D’un ton ferme qu’il manie peu souvent, le sénateur Thani Mohamed Soilihi rappelait en séance publique du Sénat ce jeudi le contexte: la violence qui sévit dans le département, liée à « une embolie du système éducatif, aux difficultés de l’accès aux soins, au manque de logements décents, au manque des services et d’encadrement… Quel avenir les parents qui ont défilé dans la rue en si grand nombre, peuvent avoir pour leurs enfants ? », interpelait-il le premier ministre.
Il rappelait les premières annonces sur le renforcement des forces de l’ordre, la création d’une brigade de prévention de la délinquance juvénile, le plan de sécurisation des établissements et des transports scolaires, et concluait : « Monsieur le premier ministre que répondrez-vous à ceux qui disent que la République a abandonné Mayotte ? »
Edouard Philippe confirmait la sécurisation des écoles lors de la rentrée lundi prochain, « 3 escadrons de gendarmerie mobile sont encours de déploiement sur l’île, ainsi que des agents de sécurité et des médiateurs de l’éducation nationale Des forces supplémentaires (non précisées, ndlr) arriveront mardi. Avec le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, nous avons prévu une mobilisation totale des forces de l’ordre. » Un escadron étant composé de 75 gendarmes, ce sont donc 225 militaires qui vont arriver pour la rentrée, un effort conséquent. La question se pose donc ensuite sur l’après rentrée.
« Le sentiment que la situation n’est plus maîtrisable »
Comme la ministre des Outremer, il s’accorde sur le fait qu’il faut « des réponses urgentes et rapides en matière de sécurité, de lutte contre l’immigration clandestine, de la santé, du logement, des transports ». Et comme la ministre des Outre-mer, il regarde en arrière, « les problèmes ne sont pas récents », et revient pour l’hémicycle du Sénat, sur l’évolution démographique, « une explosion issue du solde naturel et de la pression migratoire : « En 1918, un peu moins 15.000 habitants, en 1958, 67.000 habitants, et en 2017, 254.000. Ça n’a aucun équivalent, en terme d’équipements publics, elle impose un effort inouï. Le mécontentement ne naît pas d’une situation récente mais de la construction d’une situation qui donne le sentiment de ne plus être maitrisable ».
En réponse, il faut réflexion avec les élus selon Edouard Philippe, avec plusieurs suggestion : « On s’autorise à travailler sur un nouveau statut de cette maternité ? Une transformation en matière d’accès à la nationalité à cet endroit ? », en clair, le placement de l’hôpital en zone internationale, « Je mets tout sur la table », a rajouté le premier ministre, qui évoque les difficultés spécifiques « auxquels est confronté le 101ème département français ».
Une question sur laquelle il ne transigera pas, c’est le rendez-vous démocratique que représente l’élection législative* : « Je ne crois pas une seconde que des élus de la République prendraient la décision de ne pas participer à un scrutin national, l’Etat prendra ses responsabilités car il n’est pas envisageable que des élections législatives ne se tiennent pas à la date prévue ».
Si la rentrée semble être sécurisée, qu’en sera-t-il le lendemain ? Les habitants manifestent pour qu’au quotidien les agressions cessent pour eux et leurs enfants. Sur ce point, il n’y a pas eu de réponse.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
* Renseignements pris, la tenue des listes électorales est un des cas qui fait d’un maire un agent de l’Etat