Mayotte a été le dernier territoire à intégrer les Jeux des Iles de l’océan Indien en 2006, et sous deux conditions de taille inscrites à la Charte JIOI rédigée par le Conseil International des Jeux des Iles (CIJ) : Mayotte n’a pas de droit de vote au CIJ et elle utilisera le drapeau des Jeux « et n’arborera aucun symbole de l’Etat français (hymne et drapeau) ».
Des restrictions de taille qui gomment sa nationalité au profit d’une « pacification » des tensions avec l’Union des Comores, un des membres historiques. Les autres îles membres sont Madagascar, Les Maldives, Maurice, La Réunion et les Seychelles. Mayotte était donc entrée par la petite porte. Fallait-il refuser de le faire dès le départ sous cette condition ? Ou bien le sport est-il plus fort que les tensions et revendications géopolitiques ? C’est le casse tête annuel qui prouve sa bipolarité ces deux dernières années.
En 2015, les Jeux sont organisés à La Réunion. L’occasion pour la France de prendre position par la voix de son ministre des sports Patrick Kanner qui eu le courage de trancher : « Le drapeau de Mayotte, c’est le drapeau français. La charte des jeux des Iles de l’océan Indien doit évoluer ». Hostiles au défilé des Mahorais sous le drapeau français, les athlètes comoriens ont quitté la cérémonie d’ouverture, et ne participeront pas aux Jeux.
En 2016, Madagascar se félicite d’un climat pacifié lors des Jeux qu’elle a organisés. Ayant annoncé qu’elle allait appliquer la charte à la lettre, le drapeau français n’a été sorti que pour les Réunionnais.
La sportive Laura Flessel à la rescousse
Beaucoup évoquent l’article 1 de la charte qui veut instaurer par ces Jeux « l’amitié et la compréhension mutuelle entre les peuples des Iles de l’océan Indien dans l’esprit de l’Olympisme ».
Nous avons souvent titré sur la schizophrénie qui guette Mayotte, en raison de son entre-deux identitaire. Mais dans ce cas, l’incompréhension des politiques Mahorais est compréhensible : c’est le drapeau français et pas un autre qui s’affiche sur nos mairies.
Un sujet difficile à régler en l’état, sans modifier la charte. C’est pourquoi le président du conseil départemental de Mayotte Soibahadine Ibrahim Ramadani accompagné des parlementaires de Mayotte, a été reçu le 23 octobre dernier au Ministère de la Jeunesse et des Sports, par la ministre des Sports Laura Flessel. Et l’escrimeuse quintuple médaillée olympique sait ce que c’est que défiler sous le drapeau tricolore et célébrer sa victoire au son de la Marseillaise.
Boycott des Mahorais
L’occasion pour la délégation « de dénoncer vigoureusement la réunion qui s’est tenue à l’île Maurice à la fin du mois de septembre dernier réunissant l’ensemble des ministres de la zone océan indien, où il a été envisagé de regrouper, en une seule délégation, France océan indien, les sportifs Mahorais et Réunionnais, dans le cadre des jeux de la CJSOI (jeux des jeunes). Un projet contraire à l’esprit de ces jeux », dénonce les élus.
La délégation mahoraise a ainsi fait part à la Ministre, de l’intention pour la partie mahoraise de ne pas participer à ces prochains jeux, si les choses en restaient là. Qui s’est engagée sur ce point à obtenir de la CJCOI, « la pleine participation des mahorais en tant qu’entité française à part entière à ces jeux et à envisager, dans le cas contraire, de remettre en cause sa participation ».
Pour le gouvernement, c’est une nouvelle épine diplomatique qui aurait toute sa place au sein des échanges portant sur la feuille de route Franco-comorienne. Un désaccord qui ne peut tomber que par le dialogue avec la présidence comorienne. D’autant que Mayotte a manifesté son intention d’organiser les Jeux des Iles en 2023…
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com