Ahmed a eu le Bac il y a un an. Bon élève, mais n’ayant pas de papiers français, malgré le dépôt de son dossier en préfecture, il se tourne vers le Centre Universitaire de Dembéni. « Sans papier, on ne peut rien faire pour vous », lui aurait-on répondu. Il s’exprime bien, mais ne sait plus quoi faire. Ses frères et sœurs sont tous à Mayotte, son papa est décédé, et sa maman habite Anjouan.
Il assure qu’un retour sur son île équivaut à l’échec, « je ne trouverai aucun travail là-bas », explique-t-il. Il a peur de sombrer et de devoir un jour revenir en kwassa dans un mode survie… avec toutes les dérives que cela suppose.
L’an dernier, un Collectif d’étudiants s’est constitué pour permettre aux bacheliers qui ont un projet d’étude, de pouvoir les poursuivre en facilitant leur régularisation administrative. Après avoir défilé depuis la place de la République vers la préfecture, ses représentants avaient décroché plusieurs entretiens avec Eric de Wispelaere, le Secrétaire Général de la Préfecture. Des situations individuelles avaient été débloquées, mais avec retard, « des cartes de séjour avaient été émises en novembre, trop tard pour les BTS », rappelle Nouraida Aouladi, en 2ème année de BTS Assistant de manager au lycée Bamana.
Agir dès le Bac en poche
Un dispositif avait alors été mis en place : un protocole triangulaire, entre ce collectif, le sous-préfet et l’Education Nationale à travers le vice-rectorat de Mayotte, avec désignation de référents. « Le 15 juin, il a été convenu de le réactiver », informe le Collectif, qui prend dès cette année le problème en amont, donnant aux futurs bacheliers, la marche à suivre. « La préfecture nous a indiqué que la fabrication des cartes serait lancé dès que le Bac sera délivré. De son côté, le vice-rectorat avait oublié d’informer les chefs d’établissement. »
Les lycéens étrangers dont la situation administrative n’est pas actuellement réglée et qui passent les épreuves du bac, sont ainsi invités, en cas de réussite, à se retourner vers leur chef d’établissement. Ils doivent remettre un dossier constitué d’une lettre de motivation et des copies des documents suivants : le relevé de notes du baccalauréat, le bulletin du troisième trimestre de l’année en cours, la notice des résultats APB notifiant l’affectation en enseignement supérieur, s’il en dispose, la copie du passeport, ou la carte d’identité, ou le DCEM (Document de Circulation pour Etranger mineur).
120 bacheliers concernés l’année dernière
« Le chef d’établissement rédige un avis et envoie le dossier numérisé au service du Vice-Rectorat qui le transmettra aux services de la préfecture par une adresse électronique dédiée. Les étudiants concernés auront dû préalablement constituer un dossier de demande de carte de séjour qu’ils auront déposés par courrier avec accusé de réception au service de la préfecture. Les jeunes gens qui auront leur majorité d’ici la fin de l’année 2017 doivent déposer un dossier en urgence et suivre la procédure auprès de leur proviseur. »
L’année dernière, sur les 120 bacheliers listés par le collectif, 80 étaient en difficultés, « et 65% environ ont pu continuer leurs études à Mayotte, à La Réunion ou en métropole, grâce à leur carte de séjour », indique Nouraida.
En cas de difficultés les futurs étudiants peuvent s’adresser auprès du collectif des étudiants étrangers à Mayotte (EEM) : eem.mayotte@laposte.net. Les élèves étrangers, titulaires d’un CAP ou d’un BEP qui auraient obtenu une inscription dans un lycée de la métropole ou de La Réunion et qui auraient des difficultés administratives à le rejoindre sont également invités à prendre contact avec le collectif.
Le Collectif des étudiants étrangers à Mayotte est hébergé par la Cimade Mayotte, 63, rue de la Pompe, Boboka, 97600 Mamoudzou, 06 39 03 22 11
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte