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Mamoudzou

Florent Pietrus : « Je viens transmettre aux jeunes la détermination d’y arriver »

Le sportif de haut niveau l’affirme dès le début, Florent Pietrus n’est pas venu pour faire beau sur la photo, mais pour transmettre aux jeunes des valeurs de dépassement de soi. Les jeunes espoirs ont d’autant plus besoin de ce coup de pouce, que leur professionnalisation est semé d’embuche faute de pouvoir poursuivre à La Réunion.

Les terrains de basket de Mayotte n’auront jamais été foulés par un joueur de tel niveau… et d’une telle taille : Florent Pietrus, 2,02m, membre de l’équipe de France championne d’Europe 2013 et 3ème de la Coupe du Monde 2014, avec 230 sélections, est le troisième joueur le plus capé de l’histoire des bleus. Venu avec son coach, Benoît Gomis, entraineur international individuel (Rudy Gobert, Nicolas Batum, Serge Baka, Helena Ciak, et d’autres), il veut faire profiter les jeunes de Mayotte de son expérience. « Je ne suis pas venu juste pour poser avec les jeunes, ça ne m’intéresse pas, annonce-t-il d’emblée, je suis là pour servir à quelque chose, témoigner de mon parcours et inciter les jeunes à se dépasser ».

Son sport tient quasiment le haut de l’affiche à Mayotte où il est le 2ème le plus pratiqué, comme en métropole. « Et lors de la dernière édition des Jeux des Iles de l’océan Indien, nous avons été jusqu’en finale, mais battus par les malgaches », souligne Hakim Ali Abdou, président de la Ligue de basket.

L’île compte 40 clubs de basket, essentiellement concentrés sur Mamoudzou et Petite Terre. C’est là que nos champions vont partager les entrainements des jeunes ainsi que dans les écoles dotées de section basket, « c’est le cas de Pamandzi 5, du collège de Labattoir et de K1 », qui se préparent donc à accueillir leurs idoles.

« Je veux retracer mon expérience auprès des jeunes. Il faut qu’ils se sentent soutenus. Pour avoir grandi en Guadeloupe, je sais ce que c’est de ne rien avoir. Tout les basketteurs rêvent d’arriver où je suis, mais qu’est ce qu’ils sont prêts à sacrifier pour ça ? Il faut une détermination à toute épreuve pour y arriver. Ma tante m’avait dit, ‘tu ne réussiras jamais au basket’, cette phrase ne m’a pas quitté et m’a motivé. Les valeurs que le sport m’a apportées sont généralisables dans la vie quotidienne, je vais jusqu’au bout. »

Le moment de la pose photo avec Miss Excellence, Abdillah Sousou, à gauche, Zamimou Ahamadi et Hakim Ali Abdou

Un pôle négatif

A l’image de la ténacité d’Abdillah Sousou, chef d’entreprise à la tête de Soussou Sportwear, qui connaît Benoît Gomis depuis très longtemps, « j’ai toujours rêvé de faire venir Florent, mais il fallait trouver les moyens, j’ai été tenace ». Ce sportif de haut niveau en karaté a rassemblé des partenaires qui ont pu financer le projet à hauteur de 45.000 euros, dont « Impact 2024 », le fonds de dotation de Paris 2024. L’une d’entre elles est une partenaire de charme, puisque Miss Excellence a participé, et sa reine de beauté 2022 était présente pour en témoigner.

Il y a quelques années, une détection des talents avait été menée chez les sportifs mahorais. Kadri Moendadze, joue à Roanne en 1ère division, Fayzat Djoumoi qui évoluait l’année dernière en équipe de France des moins de 20 ans, ou Mae Brouste, jeune basketteuse de 15 ans.

Mais pour la plupart, la Ligue se heurte à un blocage du côté réunionnais, rapporte Hakim Ali Abdou : « Le Pôle espoir de La Réunion refuse d’accueillir nos jeunes. Nous avions fait venir à nos frais le président national de la Fédération de basket, qui était motivé pour que les choses changent, mais le conseiller technique fédéral qu’il a envoyé est venu pour nous dire que la liste des joueurs inscrits au Pôle espoir était bouclée. Aucun mahorais n’y figure ». Est-on en présence d’un nouveau scandale régional d’accaparement des fonds ? Madeleine Delaperierre, directrice de la DRAJES, la Délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports, ne commente pas mais indique que la solution d’envoyer nos jeunes espoirs en métropole a été envisagée, « mais la solution reste chère et beaucoup de familles s’y opposent. Or, nous avons besoin d’elles, surtout les week-ends quand le jeune sort du Pôle espoir. » Une problématique « sujet à tension », glisse le président de la Ligue de basket, et qu’il faudra bien trancher.

L’endurance sème la graine de champion

Florent Pietrus : « Si moi j’y suis arrivé »…

Pour Florent Pietrus, c’est aussi au tempérament du jeune qu’on voit la graine de champion, « moi, je me retrouvais seul le week-end, aucune famille, mais je savais pourquoi j’étais là. La sélection se fait aussi par là, par celui qui est prêt à faire ce sacrifice. »

Et c’est un joueur humble qui avoue son secret, « si moi j’ai réussi alors que je n’avais pas de talents, d’autres peuvent le faire, mais ce que j’avais en moi, c’est de la détermination. »

Un propos qu’illustre Abdillah Sousou : « Les relais, on peut aussi les trouver à travers des rencontres dans le sport. Mon prof de karaté est devenu mon père de substitution, il m’a entièrement pris en charge en métropole, et ma famille, c’était mes potes. Moi, mon vrai père, il n’est jamais venu voir une compétition. »

Outre les entrainements avec les jeunes en club, Florent Pietrus et Benoît Gomis vont participer à la finale de la coupe de France qui se tiendra cette semaine, et qui, pour les filles, opposera Fuzellips de Cavani au BCM de Mtsapere, et pour les garçons, les Vautours de Labattoir au BCM de Mtsapere. L’histoire ne dit pas si nos champions se glisseront dans une équipe pour quelques dribbles !

Anne Perzo-Lafond

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