Décidément, le sénateur RDPI (Renaissance), Saïd Omar Oili, court après des réponses. Le 7 janvier 2025 l’élu adressait un courrier au ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et au ministre des Outre-mer, Manuel Valls, pour connaître le bilan des victimes de la catastrophe naturelle et ses questions sont restées sans réponse. À nouveau sur le même sujet, dans un courrier rédigé le 14 janvier 2025, à la ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche, Agnès Pannier-Runacher, le sénateur affirme que ses requêtes n’ont eu aucun écho.
Un accord pour favoriser une « pêche responsable »
Le 20 mai 2014, un accord de pêche entre l’Union européenne et la République des Seychelles entre en application pour une durée de six ans pour permettre aux navires de pêche des Seychelles de pouvoir pêcher dans les eaux territoriales de Mayotte. Reconduit une première fois, puis modifié le 10 juin 2022, et à nouveau reconduit le 1er janvier 2023, pour une durée de six ans, l’objectif de cet accord est de renforcer un partenariat économique entre la République des Seychelles et l’archipel de Mayotte sur le secteur de la pêche, en favorisant une « pêche responsable » dans les eaux de l’Union européenne et en permettant au secteur de la pêche à Mayotte d’accroître son développement, moyennant des redevances financières de la part des pêcheurs seychellois à l’égard de la France.
La pêche, un secteur déjà fragile avant Chido
À Mayotte, la filière pêche tente tant bien que mal de se structurer, bien qu’elle soit encore artisanale. De nombreux pêcheurs ne disposent que de pirogues ou de barques, quand certaines pêches s’effectuent encore à la force des mains. Néanmoins, ces embarcations et ces pratiques ne respectent pas les normes européennes et ont été déclarées interdites par l’Etat. En juillet 2024, la préfecture avait annoncé l’ouverture d’un guichet pour permettre aux pêcheurs de déposer une demande pour l’obtention d’un « navire de pêche professionnel », de moins de 12 mètres, d’une valeur de 30.000 euros, dont les aides seraient versées par l’Etat et le Département sur une période de trois ans.
La gestion des redevances, au coeur de la discorde
L’accord précise que les senneurs battant pavillon seychellois doivent payer la somme de 110 euros par tonne de poissons capturés. Ce montant est déclaré comme « évolutif » chaque année passant dans le cadre de cet accord. Mais impossible de savoir quel est le montant de ces redevances perçues par la France depuis l’application dudit accord et comment ces fonds sont-ils utilisés par l’Etat ? Depuis plusieurs mois, le sénateur Saïd Omar Oili bataille pour obtenir des réponses quant aux montants perçus par l’Etat grâce à la pêche des armateurs seychellois. Dans un précédent courrier adressé à l’ancien ministre délégué à la Mer et à la Pêche, Fabrice Loher, en date du 14 octobre 2024, le sénateur plaidait pour le déploiement d’une « opération vérité » sur ce vaste sujet vieux de dix ans entre la France et la République des Seychelles. « Afin d’évaluer les effets de cet accord sur la filière pêche de Mayotte, je souhaite avoir connaissance de ces rapports annuels sur les montants versés par les opérateurs et sur l’utilisation de ces fonds de manière détaillée », déclarait-il. D’après l’élu, la situation du 101ème département français post-cyclone nécessite d’autant plus des financements pour la reconstruction du territoire ravagé depuis Chido. Dans le plan « Mayotte debout », présenté par le Premier ministre, François Bayrou, un soutien aux filières de l’Agriculture et de la Pêche, a été intégré, notamment en mentionnant l’utilisation des redevances prévues dans l’accord de 2014 entre la France et la République des Seychelles sur la pêche dans les eaux territoriales mahoraises.
Le ministère de la Transition écologique renvoie aux Outre-mer la patate chaude
Pour le sénateur, obtenir un bilan précis de cet accord, près de dix ans après sa mise en œuvre, est essentiel, avant de demander la mobilisation de fonds supplémentaires. Face à ce « manque de transparence sur ces données », Saïd Omar Oili a indiqué s’être rendu à la Direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture (DGAMPA), ce jeudi 23 janvier 2025, pour réclamer ces documents. À ce sujet, la DGAMPA aurait répondu que ces données étaient détenues par le ministère des Outre-mer, créant ainsi une suspicion inquiétante autour de ce dossier.
Mathilde Hangard