Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour que, dès le 14 octobre, les habitants de ce village du Nord-Ouest de Mayotte, frappent à la porte du cabinet du docteur Davy. Il ne désemplit pas, même en ce vendredi 28 octobre d’inauguration où une femme vient d’arriver sur un brancard.
Roland Davy connaît le territoire pour avoir déjà promené son télescope dans plusieurs communes du Nord-Ouest. Arrivé à Mayotte en 1997, il a commencé à exercer à Acoua, avant de partir pour visiter le Pacifique et de revenir à Dzoumogne en 2006. Il se souvient de cette période, et parle d’emblée de régression de l’organisation de soins à Mayotte : « On a organisé les désert médicaux ici. Avant, il y avait un médecin dans chaque village, mais la DASS (ex-ARS) a voulu tout regrouper à Dzoumogne avec la construction du Centre de référence ». Son bail arrivant à expiration dans ce village, il a été démarché par les élus de Mtsamboro pour venir s’installer dans leur commune.
Le maire Laïthidine Ben Saïd rappelle que « c’est une promesse de campagne. Nous étions un désert médical, car c’est compliqué pour les territoires ruraux d’attirer des médecins quand on est éloignés des grands centres urbains. Là, nous pouvons commencer à réfléchir à développer des soins autour du cabinet ». Comportement rare en politique, il s’efface derrière son adjoint chargé de la Santé, « c’est lui qui a tout fait ! » Ali Madi Silahi fait en effet montre de détermination : « J’ai travaillé en milieu hospitalier, j’ai donc cherché qui pouvait s’installer ici. Après l’accord du docteur Davy, nous avons mené les travaux d’aménagement du cabinet, en trois mois, tout était prêt. »
Gynéco et ophtalmo à venir
Un coût de 90.000 euros pour la commune qui va pouvoir envisager d’élargir l’offre de soins, ainsi que nous l’expliquait Olivier Brahic, Directeur général de l’ARS Mayotte, présent lors de cette matinée d’inauguration : « C’est un premier pas dans la logique poursuivie par le Comité d’attractivité que nous avons récemment créé. Nous devons rechercher les potentiels au niveau national, pour les accompagner dans leur installation ici. Car un des gros freins porte sur le foncier, alors quand la commune est facilitatrice, ça aide. Nous devons également faciliter les démarches administratives. Pour cela, nous allons désigner une personne au sein de l’Agence qui suivra personnellement le dossier du professionel recruté. »
Si Mtsamboro a bénéficié d’un médecin déjà présent sur le territoire, la phase numéro deux va être la même pour toutes les communes : « Il faut diversifier l’offre de soins autour de chaque cabinet médical. L’ARS propose de financer un échographe, pour l’arrivée potentielle d’un gynécologue et d’une sage-femme ici. Mtsamboro est donc une commune pilote de la politique que nous comptons mener contre la désertification médicale. » Rappelons que la métropole dispose en moyenne de 132 médecins libéraux pour 100 000 habitants, contre 121 pour la Guyane et 43 pour Mayotte. Et encore, qui ne sont pas tous en activité.
Hamjago, le village voisin, va également en bénéficier, « nous allons implanter un centre ophtalmique et de la télémédecine. »
Si le docteur Davy était le héros du jour, sa femme, secrétaire médicale était aussi félicitée pour son action au sein du cabinet baptisé « Bacar Daou ». Une emblème pour Laïthidine Ben Saïd : « Dans une période pourrie par la délinquance juvénile, je voulais mettre en avant cet homme, Bacar Daou, à la fois médecin qui soignait avec des plantes naturelles, à la fois éducateur de rue qui s’occupait des jeunes en voie de marginalisation, et même gendarme. »
Le docteur Davy ne sera pas obligé d’endosser toutes ces casquettes, et inaugurait son cabinet avec humour, « merci à tous ceux qui vont tomber malades ! »
Anne Perzo-Lafond