Répondant au sénateur Saïd Omar Oili, Anne Genetet annonce 138 millions d’euros pour les écoles au budget 2025, dans un contexte de finances contraintes. Il en va de l’exclusion de près de 10.000 enfants du système scolaire.
Lors des questions au gouvernement, et au lendemain de la publication du rapport de l’UNICEF pointant 20.000 enfants en sentiment d’exclusion sociale en France, le sénateur Saïd Omar Oili revenait sur le contexte mahorais : 20% d’élèves en plus dans le primaire entre 2019 et 2023, un déficit de 1.200 salles de classe, 55% des élèves en système de rotation, « l’équivalent de deux jours d’enseignement par semaine », 95% qui n’ont pas de repas chaud à midi. Une situation qui traduit une difficulté à absorber tous les enfants qui arrivent chaque année aux portes des écoles, « 6.000 à 10.000 enfants ne sont pas scolarisés, soit 9% de la tranche d’âge », indiquait-il en citant les chiffres du ministère de l’Éducation nationale.
Une situation d’exclusion pour tous ceux-là, « et qui illustre la progression fulgurante de la délinquance juvénile, le caillassage des bus, l’incendie des établissements. Hier, un bus de 37 élèves a subi des caillassages très violents à Mamoudzou », un tableau qui incitait le sénateur à interroger la ministre de l’Éducation nationale, « quelles mesures urgentes comptez-vous prendre ? »
Les élus de Mayotte sur le front scolaire
Bien qu’en période de discussion budgétaire, comme le faisait remarquer Anne Genetet, la ministre annonçait « plus de 500 millions d’euros d’ici 2027 pour de nouveaux bâtiments scolaires à Mayotte », qui se traduiront par 138 millions d’euros dès cette année 2025, « car notre école de la République n’est pas une dépense, c’est un investissement pour l’avenir ». Elle indiquait avoir également été interpellée au Congrès des maires le matin même par le maire de Mamoudzou sur ce sujet, Ambdilwahedou Soumaila lui ayant révélé un manque de 302 classes, imposant un enseignement en rotation où deux classes se partagent une salle, le matin et l’après-midi.
Rectifions l’idée trop communément admise que les 10.000 naissances par an nécessiteraient une salle de classe supplémentaire par jour, car chaque année, c’est autant d’élèves qui passent dans la classe supérieure et libèrent donc les locaux. Le danger, c’est l’accroissement des naissances par rapport à la moyenne auxquelles il faut ajouter les arrivées des îles voisines ce qui aggrave un peu plus une situation sinistrée. Mais aussi, de laisser perdurer cette situation de milliers d’élèves hors système scolaire qui maintient dans l’exclusion d’une année sur l’autre ceux qui ne sont pas scolarisés, et à chiffre constant, laisse autant de primo-arrivant en dehors des écoles l’année suivante.
Avec les moyens octroyés par la ministre, les maires vont avoir davantage de latitude, moyennant pour certains la contrainte du foncier, l’urgence des équipements publics touchant tous les domaines. Mais la question qui reste dans la tête des élus est bien de savoir jusqu’à quelle limite Mayotte pourra scolariser les enfants de la région, alors même que les titres de séjour ne permettent pas à leurs familles de quitter le territoire.
Anne Perzo-Lafond