Tous les décideurs institutionnels en matière de santé étaient réunis ce samedi matin à la MJC de Combani pour le débat public organisé par l’ARS dans le cadre du Conseil National de la refondation en santé : le préfet Thierry Suquet, le directeur de l’ARS Olivier Brahic, le directeur du CHM Jean-Mathieu Defour, la directrice de la CSSM Ymane Alihamidi Chanfi, et le vice-président du conseil départemental chargé de la Santé Madi Moussa Velou.
Nous reviendrons sur les pistes intéressantes proposées par les intervenants pour améliorer l’accès aux soins sur un territoire que l’ex-députée et médecin Ramlati Ali ne qualifiait plus de désert médical, mais de « catastrophe médicale ».
Des annonces ont été faites, qui vont déjà donner un sérieux coup de pouce au traitement des malades. Nous livrons ici les plus importantes.
Tout d’abord, elle était attendue depuis des années, la CMU-C est annoncée pour dans moins de deux ans par directrice de la Caisse de sécurité sociale, « en 2024, la Complémentaire Santé Solidaire sera mise en place sur le territoire. Cette Couverture maladie universelle complémentaire va permettre aux patients de se faire rembourser leur part complémentaire de leurs dépenses de santé ».
L’héliSmur aux 4 coins de l’île
Pour les malades qui ont des faibles ressources, et c’est le cas pour plus des 77% qui vivent sous le seuil de pauvreté à Mayotte, cela signifie que cette aide rembourse ce qui n’est pas alloué par l’Assurance Maladie. La complémentaire santé solidaire est gratuite ou payante selon les revenus. Autrement dit, les personnes affiliées sociales qui allaient à l’hôpital pour des soins gratuits vont pouvoir se rendre chez un médecin libéral. Ce qui devrait participer à désengorger le CHM, sous condition d’en faire une solide communication. Et d’attirer de nouveaux médecins, comme l’a fait Mtsamboro.
Ensuite, pour limiter les évacuations sanitaires vers La Réunion et la métropole, plus connues sous l’acronyme EVASAN, le CHM travaille à l’émergence d’un centre de dialyse lourde, « un néphrologue va s’installer à l’hôpital qui va nous aider à le mettre en place et ainsi, limiter les EAVASAN pour cette pathologie », indiquait Jean-Mathieu Defour.
Qui poursuivait en indiquant le renforcement en cours des Centre médicaux de référence* (CMR), où une permanence de soins en service d’urgence sera mise en place, « et ils seront dotés d’hélistations pour faciliter le transport des malades. En 5 à 10 minutes, ils seront ainsi acheminés vers le CHM ». L’hôpital de Petite Terre sera doté en premier, puis Dzoumogne.
Toujours dans l’esprit d’accélérer la prise en charge, les médecins de ville seront dotés d’une hotline, « une ligne téléphonique dédiée qui leur permettra de prendre rendez-vous pour leurs patients en cas de besoin, et donc de faciliter le suivi ».
Les ambulances vont pouvoir jouer du « pin-pon »
Si des mesures vont être prises pour attirer de nouveaux médecins, en attendant de muscler leur nombre, la télémédecine va être sollicitée sous condition technique, soulignait la directrice de la CSSM : « Les règles en cours nous imposent un plafond de 20% de téléconsultation, afin que les populations vulnérables ne soient pas lésées. Nous allons néanmoins conventionner avec les médecins pour aller au-delà, sous le contrôle de la Commission paritaire locale de médecins, ce qui pourra sur certaines plages horaires, permettre l’accès à des malades qui auraient dû attendre pour leurs soins. » Un dispositif qui dépend étroitement de la technique mise en place comme le faisait remarquer Olivier Brahic : « Il faut installer le raccordement de la fibre à haut débit pour que ce soit opérationnel ». Le marché est en cours, l’opérateur n’a pas encore été désigné par le conseil départemental, selon nos renseignements.
Autre grande annonce qui va venir soulager le SAMU, la mise en place des Ambulances de Secours et Soins d’Urgence (ASSU), « dans le cadre du Comité départemental de l’aide médical d’urgence et des transports sanitaires, nous allons augmenter le quota de sociétés privées qui mettront à disposition ces ambulances aménagées pour les interventions en urgence, qui pourront ‘sortir leur pin-pon’, ce qui va permettre une meilleure offre de transport sanitaire. Car en métropole, à partir de 20h le SAMU missionne des ambulances privées. »
Equilibre entre médecine de ville et hospitalière, généralisation des maisons de santé pluridisciplinaires, accompagnement des Infirmiers en pratiques avancées dans leurs nouvelles compétences, beaucoup d’autres thèmes ont été abordés. Nous y reviendrons.
Anne Perzo-Lafond
* Il y en a 4 sur l’île, Dzoumogne, Kahani, Mramadoudou et l’hôpital de Petite Terre à Dzaoudzi