« La vieille dame des Badamiers vient d’opérer un véritable lifting », a déclaré avec humour Mikidachi Houmadi, le maire de Dzaoudzi-Labattoir, jouant sur le surnom affectueux donné à la première centrale électrique de Mayotte, mise en service en 1987. L’inauguration des nouvelles installations de dénitrification s’est en effet déroulée ce mercredi 18 septembre devant l’ensemble des salariés d’EDM, quelques élus et autres hauts responsables de structures publiques et privées du territoire, qui ont eu ensuite le droit à une visite complète de la centrale.
Le terme « dénitrification » est un peu trompeur dans la mesure où il n’a rien à voir avec les nitrates, mais avec l’oxydes d’azote, le principal polluant rejeté par les centrales électriques. En pulvérisant de l’urée dans les installations, les particules d’oxyde d’azote se retrouvent piégées par une réaction chimique, les cantonnant ainsi dans les tuyaux sans qu’elles ne puissent s’échapper dans l’atmosphère. Avant la « DeNOx » (traitement des oxydes d’azote), EDM enregistrait 29,3 mg/m3 de ces particules polluantes au niveau de la plage des Badamiers, ce qui était déjà en dessous des recommandations de l’OMS qui préconise de ne pas dépasser les 40 mg/m3. Avec ces nouvelles installations, ce sont désormais seulement 2,6 mg/m3 de particules qui seront rejetés dans l’atmosphère, améliorant considérablement la qualité de l’air. « Ce projet de transition énergétique est réussi dans la mesure où la pollution est réduite sans porter atteinte à la production correspondant aux attentes de la société », résume la présidente du conseil de surveillance d’EDM, chargée de veiller à ce que les activités de son entreprise nuisent le moins possible à la santé des Mahorais.
EDM : une expansion spectaculaire en 15 ans
« A Mayotte, la population augmente de 4% chaque année et la consommation énergétique de 5% par an depuis 20 ans. EDM doit donc suivre le rythme afin de fournir tous les habitants en électricité », a déclaré Raphaël Ruat, le directeur général d’EDM. Il a rappelé que son entreprise produisait 107 MW d’électricité à Mayotte dont 34 aux Badamiers et 73 à Longoni, centrale plus récente puisqu’installée en 2015. « EDM aujourd’hui, c’est 313 salariés et une vingtaine d’alternants pour 53.000 clients. Il y a 15 ans, ce n’était que 100 salariés et une seule centrale. Les investissements d’EDM sur le territoire sont donc énormes ! », s’est-il félicité. Il a également annoncé d’autres investissements à venir puisqu’un terrain de 15.000 m² adjacent à la centrale des Badamiers a été réservé à EDM par voie de Déclaration d’Utilité Publique (DUP) afin qu’elle puisse encore agrandir ses installations en prévision de la croissance démographique. « Notre feuille de route prévoit 250 millions d’euros à investir en 10 ans », dévoile-t-il.
Les installations de dénitrification, qui ont coûté la bagatelle de 20 millions d’euros, ont été réalisées par l’entreprise Eiffage Metal, un gros groupe industriel dirigé par Denis de Villepin. Les travaux ont commencé en novembre 2022 et, dès mars 2024, deux premiers moteurs étaient terminés. Les deux autres l’ont été tout récemment, d’où cette cérémonie célébrant la réussite de l’ensemble du projet, livré « clé en main », selon Denis de Villepin.
Un passage au bioliquide à l’horizon 2028
Raphaël Ruat a détaillé la nature des investissements d’EDM pour les 10 prochaines années. Les moteurs diesel fonctionnant au gasoil, actuellement utilisés pour faire fonctionner les deux centrales de l’île, seront convertis au bioliquide à l’horizon 2028. Celui-ci sera de l’huile de colza, probablement importée de métropole. Une extension de la capacité de production thermique, en prévoyant des moyens de production décarbonés, sont également au programme ainsi que 2 nouvelles lignes sous-marines pour relier la Petite-Terre à la Grande-Terre. EDM compte aussi développer davantage ses installations de captage de l’énergie solaire et travaille à renouveler le contrat de concession qui, signé en 1997, va bientôt arriver à expiration.
Avec cette inauguration, EDM souhaite montrer qu’elle a bel et bien pris le train de la transition écologique et du développement durable, à la fois pour le bien de l’environnement de l’île et de ses habitants, mais également pour répondre aux nouvelles exigences des politiques, pour qui le respect de l’environnement est devenu un enjeu majeur.
Nora Godeau