Les ambitions collectives du comité de suivi de la refondation suspendues au vote du budget

Si cette première réunion a permis de poser un cadre de travail pour le déploiement des investissements jusqu’en 2031, de nombreuses interrogations persistent pour que le comité soit pleinement effectif, notamment sur les dossiers à refonder, les décrets encore manquants et le vote du budget.

Le comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte a été officiellement installé ce lundi 15 décembre en fin de matinée au Rectorat.

Présidé par le sénateur de Mayotte Thani Mohamed Soilihi, ce comité réunit des parlementaires nationaux et locaux, des représentants des collectivités mahoraises ainsi que de l’État. Il comprend notamment les députées Anchya Bamana et Estelle Youssouffa, plusieurs sénateurs dont Saïd Omar Oili, le président du Conseil départemental Ben Issa Ousséni, Madi Madi Souf, représentant de l’Association des maires, Ali Moussa Moussa Ben, président de l’Association des intercommunalités, ainsi que le préfet de Mayotte François-Xavier Bieuville.

Beaucoup de questions, peu de réponses précises

Comité de suivi, refondation, Mayotte
Le sénateur de Mayotte Saïd Omar Oili.

Sa mission est de veiller à la mise en œuvre effective des mesures de reconstruction prévues par la loi, d’en évaluer l’avancement de manière rigoureuse et transparente, et d’en rendre compte régulièrement au Parlement. Les membres du comité exerceront leurs fonctions à titre gratuit.

Ce matin les échanges, qui ont duré plus de deux heures, ont par ailleurs bouleversé le programme de la visite officielle de la ministre des Outre-mer. Celle-ci ne s’est finalement pas rendue au lycée Younoussa Bamana pour constater l’avancée des travaux et la signature de la convention inter-départements avec le Département de La Réunion, prévue par le président du Conseil départemental Ben Issa Ousséni, a été retardée. Des ajustements qui traduisent la richesse des discussions ou bien au contraire, la persistance de certaines interrogations ?

Le sénateur Saïd Omar Oili a été le premier à s’exprimer à la sortie de la réunion. « Ce premier rendez-vous a soulevé plusieurs questions. Tout d’abord, qu’est-ce que l’on va refonder ? Quels sont les dossiers qui existaient déjà avant le passage de Chido et lesquels ont été mis en place après le cyclone ? Est-ce qu’on va en faire une synthèse ou reprendre les dossiers déjà engagés ? Si on reprend ceux existants, il nous faut des montants en plus », a-t-il remarqué. « Les décrets sortis aujourd’hui pour la loi de refondation, il n’y en a que trois sur une vingtaine de prévus. Quand je pose la question, on me répond que, dans quelques semaines, les décrets seront publiés. On n’a pas de réponses précises pour le moment, malheureusement », a ajouté Saïd Omar Oili. Si les décrets d’application de la loi manquent, les porteurs de projets ne peuvent pas déclencher les dépenses ou verser les fonds, même si l’argent est officiellement prévu dans la loi.

« L’argent est disponible, les outils existent »

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Education, gestion de l’eau ou des déchets…, l’ambition du comité est d’évaluer le déploiement effectif de la loi de refondation sur le territoire.

« C’était un moment important. Ce n’est pas un comité énième qui vient s’installer, c’est une très bonne idée. Cela va nous permettre collectivement d’avoir un suivi dans le temps, très rigoureux et très précis, de la manière dont sont déployés les investissements à Mayotte, tels qu’ils ont été actés par la loi, de la stratégie pluriannuelle jusqu’en 2031. Cette première réunion a été l’occasion de se le redire et de poser un cadre, de définir la manière dont on va travailler », se réjouit la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou. « L’argent est disponible, les outils existent, maintenant il faut savoir comment on déploie tout cela sur le terrain ».

« Ce n’est pas juste l’État, depuis Paris, qui va décider qu’il faut avancer sur l’eau, les déchets ou l’éducation par exemple. Nous avons besoin de nous retrouver pour entendre les maires, les collectivités, le Rectorat et les parlementaires », a insisté la ministre. « C’est un espace commun de travail sérieux. Les moyens seront mis sur la table, notre responsabilité côté État sera de donner les chiffres, de faire la transparence et de communiquer les éléments dont les membres auront besoin ».

« Ce comité de suivi est important pour nous les élus, car c’est un espace différent de l’établissement public de reconstruction, qui représente l’ingénierie et la finance. Il y a toute une coordination de la politique publique que nous, en tant qu’élus, devons interroger et contrôler », a continué la député de Mayotte, Estelle Youssouffa.

Un comité décentralisé tout de même dépendant du budget

Loi, immigration, parlement, hémicycle
Une grande partie de la refondation du territoire dépendra de l’adoption du budget, tant sur sa rapidité que sur son ampleur. (photo d’illustration)

Si aucune date n’a été donnée pour la deuxième rencontre du comité, tous les regards se tournent désormais vers Paris et le vote du budget qui devrait se tenir d’ici la fin de l’année.

« Cela fait un an qu’on attend cette reconstruction. On a réussi à augmenter l’enveloppe pour Mayotte, mais il faut maintenant voter le budget, et ce n’est pas gagné à Paris », averti Estelle Youssouffa. « Moi, je voterai pour le budget. J’ai négocié avec le Gouvernement un milliard d’euros pour Mayotte en 2026. Je suis claire sur mes engagements. Il faudra que les uns et les autres assument leur vote auprès de la population ».

Victor Diwisch

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