Après de nombreuses années d’attente, la Protection Maternelle et Infantile (PMI) de Koungou, située à proximité du collège Frédéric d’Achery et à l’entrée du village de Trévani, a été inaugurée ce lundi 24 novembre. Ces structures départementales jouent un rôle clé à Mayotte : elles assurent le suivi médical, social et préventif des femmes enceintes et des jeunes enfants, accompagnent les grossesses, organisent les vaccinations et offrent des conseils de santé aux familles. La PMI de l’île est répartie en cinq circonscriptions — Nord, Centre, Grand-Mamoudzou, Sud et Petite-Terre — et comprend une vingtaine de points de consultation, garantissant un suivi de proximité pour la population.
Une longue attente malgré un bâtiment primordial

En 2006, lorsque la compétence en matière de Protection Maternelle et Infantile (PMI) est transférée au Département, les femmes enceintes et les jeunes enfants du village et des alentours sont soignés et accompagnés au sein du dispensaire communal, dans des locaux fortement sollicités et inadaptés. Mais sans enveloppe budgétaire nouvelle pour mettre en place cette compétence, le Département ne lance aucun projet de construction d’une PMI alors même que la population de la commune augmente rapidement et que les besoins en accompagnement maternel et infantile s’intensifient.
Ce n’est qu’en 2018 que l’État accorde une compensation financière rétroactive ainsi qu’une dotation annuelle et une enveloppe spécifique pour la construction et la rénovation de centres de PMI. L’idée d’en construire une à Koungou voie le jour. Mais là encore ces moyens sont interprétés comme des plafonds budgétaires et sont en partie réorientés vers l’Aide sociale à l’enfance, ralentissant la concrétisation des projets de PMI.
Il faut attendre 2021, pour que la forte saturation des services existants, avec un nombre de consultations très élevé et un personnel insuffisant, mette en évidence l’urgence de créer une nouvelle structure afin de désengorger le dispensaire.
Le projet de la PMI de Koungou entre dans une phase plus concrète à partir de 2022, mais se heurte cette-fois-ci à un blocage foncier. La parcelle initialement retenue étant classée en zone naturelle, le permis de construire est refusé par la DEAL. La mairie engage alors, en 2023, une procédure de déclassement du terrain et de modification du Plan local d’urbanisme, impliquant une enquête publique et de longues démarches administratives, qui ralentissent l’avancée du dossier, malgré l’identification définitive du site et une première esquisse évaluée à environ 2 millions d’euros.
Fin 2024, alors que le bâtiment est prêt à ouvrir, le passage du cyclone Chido endommage la structure et décale encore l’ouverture des lieux.
Des locaux adaptés et des services en nombre sur deux étages

De son côté, la demande n’a pas diminué. Ce lundi, plusieurs femmes attendaient déjà aux abords de la PMI pour bénéficier d’un suivi de leur grossesse. À Mayotte, les PMI accompagnent les femmes tout au long de leur grossesse, avant que la majorité n’accouche au CHM de Mamoudzou. Sur l’ensemble du territoire, ces structures assurent le suivi d’environ 8.000 grossesses par an sur 10.000 enregistrées et prennent en charge près de 85 % des vaccinations.
« Le projet a mis du temps à arriver à terme, mais ce sont des locaux à la hauteur des besoins de Koungou et de sa population », assure le Dr. Pierre Sauves, directeur des PMI auprès du Conseil départemental. « Les familles ne seront plus obligées de rentrer dans le secteur de Mamoudzou pour bénéficier d’un suivi. Sachant qu’après Koungou il faut encore deux heures de route en raison des bouchons, c’est un endroit stratégique ».

La PMI de Koungou s’étend sur deux étages, où se conjuguent soins médicaux et accompagnement social. Le rez-de-chaussée est consacré aux suivis médicaux, tandis que l’étage supérieur offre un espace pour les missions sociales et le suivi des familles. Une salle particulière accueille le Lieu d’Accueil Parents-Enfants (LAEP), favorisant les échanges entre parents et enfants. L’accueil commun et la salle d’attente, ouverts et lumineux, créent un véritable point de rencontre entre les services, renforçant le lien entre professionnels et usagers. Grâce à cette organisation, toutes les équipes — des sages-femmes et infirmières aux éducateurs santé, psychologue et conseillères conjugales, en passant par le personnel chargé du dépistage et de l’accompagnement social — peuvent collaborer efficacement pour assurer un suivi complet et coordonné des familles et des jeunes enfants.
« L’objectif est de créer un accueil unique où chacun peut exposer sa situation et être immédiatement orienté vers le service le plus adapté. Cela permettra également, si la personne n’est pas présente sur place, de lui fixer un rendez-vous directement ici plutôt que de la renvoyer vers plusieurs services différents », précise Pierre Sauves. « Disposer d’une offre centralisée facilitera un accompagnement global de la parentalité dans son ensemble ».

Le projet a coûté plus de 3 millions d’euros, financés à hauteur de 1.345 million d’euros par les fonds européens (FEDER) et de 1.7 million par le Conseil départemental. Il s’inscrit dans un projet plus large de rénovations et de constructions de PMI, dont la dernière a été inaugurée fin septembre à Mtsamboro. Suivront Iloni, Mronabéja, Mtsapere, Vahibé ou encore Chiconi.
Les PMI de Dzoumogné, Poroani et de Bandrélé, très endommagées après le passage du cyclone Chido et des actes de vandalisme ne sont plus opérationnelles, ce qui vient perturber encore le maillage du territoire.
Victor Diwisch


