Dans le cadre de la préparation du budget 2026, et après l’adoption de trois lois prévoyant 4 milliards d’euros pour la reconstruction et le développement de Mayotte après le cyclone Chido, le sénateur Saïd Omar Oili a adressé, lundi 27 octobre, un courrier au Premier ministre Sébastien Lecornu. Il y réclame plusieurs documents qu’il juge « essentiels pour mieux défendre les intérêts de Mayotte et accompagner sa reconstruction ».
Suivre l’application des mesures en faveur de la reconstruction
« Près d’un an après le passage du cyclone Chido qui a ravagé l’île de Mayotte le 14 décembre 2024, trois lois ont été promulguées afin d’assurer la reconstruction de l’île : la loi n°2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte ; la loi organique n°2025-793 du 11 août 2025 relative au Département-Région de Mayotte et la loi n°2025-797 du 11 août 2025 de programmation pour la refondation de Mayotte. Je compte bien assurer un suivi strict de l’application des mesures prises en faveur de la reconstruction de notre archipel, notamment dans le cadre de l’élaboration du budget 2026″, souligne le sénateur.

Pour assurer ce suivi, Saïd Omar Oili souhaite obtenir :
– La remise du rapport inter-inspections lancé par l’ancien Premier ministre François Bayrou, qui a évalué les besoins de développement après le cyclone Chido.
– Le bilan de la planification sur Mayotte prévu à l’article 53 de la loi du 11 août 2025 sur la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport recensant et évaluant les plans stratégiques applicables à Mayotte.
– La programmation annuelle des investissements.
– Le bilan détaillé du Fonds d’amorçage déployé après le cyclone Chido.
– Le bilan du nombre d’élèves accueillis à la rentrée 2025 (premier et second degré), l’état d’avancement de la reconstruction des établissements scolaires et un point sur le recrutement des enseignants.
De nombreuses sollicitations sans réponses ou de façon incomplète
Un nouveau courrier, après une longue série de sollicitations restées sans réponses ou traitées de façon incomplète.
Pour le rapport inter-inspections, Said Omar Oili a demandé des précisions dès le 9 avril 2025 auprès du ministre des outre-mer, Manuel Valls, puis le 30 avril et le 30 juin 2025 auprès du Premier ministre, François Bayrou. Concernant le deuxième point, le rapport recensant et évaluant les plans stratégiques applicables à Mayotte qui doit être remis Parlement au plus tard le 11 novembre, le sénateur a écrit, le 20 octobre, à la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, pour lui demander « l’état d’avancement de ce processus ».
Du côté du bilan détaillé du Fonds d’amorçage, qui sert à financer en urgence les collectivités touchées par le cyclone et à lancer rapidement les projets de reconstruction des infrastructures publiques, Saïd Omar Oili remarque l’absence de réponses de la part de la préfecture de Mayotte, suite à sa demande de précisions dans un courrier du 17 septembre dernier.

« Monsieur le Préfet, suite à la rencontre avec le Directeur général des outre-mer le 11 septembre 2025, je souhaiterais pouvoir disposer du bilan détaillé et par thème de réalisation du Contrat de Convergence et de Transformation 2019-2023 de Mayotte », avait écrit le sénateur. « La loi n°2025-797 du 11 août 2025 de programmation pour la refondation de Mayotte reprend dans son article 2 des opérations qui font l’objet d’une contractualisation avec l’État. Dans le cadre des futurs débats parlementaires sur le projet de budget 2026, j’ai donc besoin de ce bilan », anticipait déjà Said Omar Oili, rappelant également qu’en « application de l’article 24 de la Constitution, les parlementaires exercent un contrôle sur l’action gouvernementale, et doivent disposer des informations nécessaires à cette fonction, et qui sont des données publiques ».
Pour le bilan des écoles à Mayotte, le sénateur avait déjà tenté d’obtenir à trois reprises, les 11 juillet, 28 août et 9 octobre, en écrivant directement à la rectrice de Mayotte, Valérie Debuchy, mais là encore sans recevoir de réponse.
« Nouveau sénateur depuis maintenant deux ans, je suis très étonné de constater que nous passons beaucoup de temps à élaborer des textes, mais pas assez pour contrôler leur efficacité sur le terrain », a déclaré Saïd Omar Oili, ce mardi 28 octobre, à l’occasion de l’examen au Sénat du projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer. « Trois lois depuis Chido ont été votées pour la reconstruction de Mayotte, et je serai intraitable sur leur application. Je mesure très concrètement les résistances, voire les blocages des administrations à rendre des comptes sur l’application de ces textes votés par le Parlement. Comment voulez-vous que nos populations fassent confiance aux élus, si les engagements contenus dans les lois restent lettre morte ? ».
« Très pessimiste pour la suite »
« Je serai de la même manière très vigilant sur l’application de ce texte contre la vie chère dans mon territoire. Et je m’inquiète sur les moyens déployés sur le terrain par les administrations de l’Etat pour faire appliquer ces nouvelles dispositions, Je constate la faiblesse des moyens des administrations déconcentrées sur mon territoire et je suis très pessimiste pour la suite », a-t-il ajouté.

À Mayotte, où le taux de pauvreté touche près de 75 % de la population selon l’Insee, la question de la vie chère se pose avec une acuité particulière, aggravée par le passage du cyclone Chido. Le sénateur a alerté sur la flambée des prix dans certains secteurs, comme les matériaux de construction et les produits de première nécessité, sur la dévastation de l’agriculture locale entraînant une pénurie de fruits et légumes, ainsi que sur la crise de l’eau, qui dure depuis des années et oblige les ménages à acheter de l’eau en bouteille et à aménager leur maison pour la stocker. La population s’étonne également de la vente par la Préfecture de bouteilles initialement destinées à être distribuées, relève Saïd Omar Oili.
« Face à ces crises majeures qui s’accumulent sur notre territoire, la population mahoraise n’en peut plus », a-t-il insisté, « la question de la vie chère prend une nouvelle dimension et une priorité des habitants de notre archipel ».
Victor Diwisch


