Les participants, qui s’étaient donnés rendez-vous de bonne heure devant les urgences du CHM, brandissaient des slogans tels que « La santé au rabais », « soignants en danger, patients abandonnés » et chantaient à tue-tête dans les rues de Mamoudzou et de Dzaoudzi « Barrages, les caillassages, on en a marre de ce carnage ! » pour rejoindre la préfecture.
«La santé caillassée». L’expression revient, sans cesse. La centaine d’agents hospitaliers réunie jeudi en début de matinée devant les urgences du CHM, illustrait la saturation, l’épuisement et la peur ressentie par les soignants. Après plusieurs semaines de mobilisation en octobre dernier où le personnel du CHM avait notamment exercé son droit de retrait après l’attaque de bus de l’hôpital, une nouvelle fois, les soignants se sont mobilisés pour alerter sur l’insécurité quotidienne dont ils sont victimes, comme leurs patients.
« Les véhicules de secours arrivent avec difficulté sur les lieux pour aller secourir des gens en danger. On laisse des gens mourir car on est bloqués par des barrages. Les soignants sont constamment en danger. Les patients aussi », confie un soignant.
Après plusieurs heures de marche, le cortège s’est rendu à la Préfecture de Mayotte en Grande-terre pour exprimer leurs doléances au préfet de Mayotte. Après un sitting en plein soleil, le représentant de département a accepté de recevoir une délégation de 10 médecins.
« Un décor de guerre permanent »
Ces échanges ont duré près de 2h, pendant lesquels le cortège d’hospitaliers patientait en plein soleil, ce geste témoignait d’un épuisement significatif des professionnels de santé face à cette situation. « On n’arrive plus à faire notre métier, les soignants et les patients ne peuvent plus circuler, certains patients ne prennent plus le risque de venir se faire soigner, tout le monde a peur, on vit dans un décor de guerre permanent, on étouffe d’insécurité sur cette île », déplore une soignante.
Face à cette mobilisation, plusieurs engagements du Préfet
En fin de matinée, les médecins reçus par le préfet se sont dits « rassurés » d’avoir été entendus par le Préfet, qui a « écouté attentivement » un à un l’ensemble des médecins présents. « Si aucune solution miracle n’existe » a rapporté la délégation de médecins, plusieurs mesures ont pu être identifiées pour améliorer le quotidien des soignants, des patients et de la population en général.
Parmi ces mesures, un rendez-vous mensuel « santé-sécurité » va être mis en place dès à présent, tous les mois, permettant aux professionnels de santé de faire un point avec les services de la préfecture au sujet de l’insécurité. Aussi, des agents relais du CHM vers les forces de l’ordre vont être identifiés pour améliorer la communication entre les deux parties en cas de difficultés rencontrées sur le territoire.
Le préfet s’est également engagé à revoir le déploiement des forces de l’ordre autour des centres de soins. A ce sujet, des axes de circulation vont être sécurisés pour permettre d’établir des « axes libres prioritaires » pour les véhicules de secours. Enfin, les forces de l’ordre vont être renforcées, par une intensification de la présence du GIGN, du RAID, et d’outils de surveillance numérique, sur le territoire.
Mathilde Hangard