“On m’a envoyée au CRA alors que je me rendais simplement à l’université”

Faute de papiers à jour, un certain nombre d’étudiants ne peut s’inscrire à l’Université de Mayotte, mais beaucoup continuent à venir en cours malgré les risques que cela représente, notamment d’être expulsé du territoire.

Le 8 septembre, des étudiants de l’Université de Mayotte avaient bloqué l’université, ils dénonçaient des dysfonctionnements au sein de l’établissement lors de la rentrée scolaire. Ce mercredi, une réunion avait lieu entre des représentants d’étudiants et la direction. La situation s’est améliorée. “Les cartes étudiantes ont commencé à arriver, pareil pour les climatiseurs, de nouveaux ordinateurs et des chapiteaux ont été livrés et les salles dans l’ensemble sont réparées”, se félicite Benji Chamsiddine Abdou, président de l’Union étudiante qui était à l’origine de la mobilisation.

« C’est très difficile de continuer mes études dans ces conditions »

Le 8 septembre, des étudiants de l’Université de Mayotte avaient bloqué l’université, ils dénonçaient des dysfonctionnements au sein de l’établissement lors de la rentrée scolaire

En revanche, une partie des étudiants étrangers ne peut pas s’inscrire à l’université faute de papiers à jour. Le problème n’est pas nouveau mais il est persistant. Volontaires pour étudier, ils se rendent quand même pour la plupart sur le site universitaire. Nasrati suit les cours de deuxième année de droit mais n’a pas pu s’inscrire car depuis mai dernier, elle attend le renouvellement de son titre de séjour. “Récemment, il y a deux ou trois semaines, je me suis faite arrêtée, on m’a envoyée au centre de rétention administrative alors que je me rendais simplement à l’université. C’est très difficile de continuer mes études dans ces conditions, alors que j’ai fait tout mon possible pour valider ma première année. Si je suis expulsée aux Comores, je devrai repartir de zéro”, raconte-t-elle. Malgré le risque de se faire arrêter à tout moment par la police aux frontières (PAF), elle continue à se rendre en cours pour ne pas accumuler de retard dans ses études.

Impossibilité de prétendre à une bourse

L’une de ses camarades, Halima, rencontre le même problème. En juin, son titre de séjour est arrivé à expiration, de ce fait elle n’a pas pu s’inscrire en deuxième année de droit. Depuis, elle essaie de prendre un rendez-vous auprès de la préfecture pour le renouveler mais sans succès. “Prendre un rendez-vous c’est très difficile, ils sont très rares. Quand de nouveaux sont mis en ligne, une fois par mois, on a une heure pour en prendre puis après il n’y a plus de disponibilités.” L’étudiante de 22 ans, habitante de Petite-Terre, prend également le risque de se faire arrêter sur son trajet pour venir étudier mais elle y tient. “Si mes amis m’envoient les cours, je ne pourrai pas les comprendre, il faut y assister pour bien les saisir”, estime-t-elle. Sans inscription achevée, elle n’a pas le droit non plus à une bourse.

Des jeunes qui renoncent aux études

De nombreux étudiants étrangers sont concernés par ces problèmes d’inscription

Étudiante depuis deux ans à l’Université de Mayotte, Assimaou n’a pour sa part jamais réussi à régulariser sa situation administrative. “Depuis que je suis en terminale, j’essaie d’avoir un rendez-vous à la préfecture pour demander un titre de séjour”. En vain. “Je n’y arrive pas, je me suis rapprochée d’associations, j’ai vu une assistante sociale mais ça n’a rien donné”. Son inscription à l’Université de Mayotte a quand même fini par être validée en fin d’année dernière.  Ce qui lui a permis de faire les rattrapages et obtenir le redoublement de sa première année de droit. Malgré cela, les risques pour venir étudier sont trop importants, ce qui amène la jeune comorienne, qui vit depuis 10 ans à Mayotte, à ne plus venir étudier. “Depuis la rentrée je n’y suis presque pas allée car j’ai peur de me faire attraper par les policiers”, témoigne-t-elle.

“L’université est engagée pour les aider dans la mesure de ses possibilités”

Nasrati aimerait que “l’Université prenne en charge le suivi des dossiers à la préfecture et qu’elle fasse les démarches pour nous obtenir des rendez-vous,” mais aussi que l’institution fournisse un justificatif pour éviter aux étudiants de risquer une expulsion en venant étudier. Face aux difficultés rencontrées par les étudiants étrangers, le président de l’Université de Mayotte, Abal-Kassim Cheik Ahamed, affirme que “l’université est engagée pour activer tous les leviers pour les aider et les accompagner dans la mesure de ses possibilités et de ses compétences.” Il précise par ailleurs que la pièce d’identité nécessaire à l’inscription ne vise pas à “vérifier la régularité administrative des étudiants mais à vérifier leur identité”.

Lisa Morisseau

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