Gestion de crise : DGS et partenaires réunis lors d’un séminaire pour tirer les leçons de Chido et Dikeledi

Le lycée des Lumières de Mamoudzou, à Kawéni, accueille pendant deux jours, ce jeudi 18 et ce vendredi 19 septembre, un séminaire organisé par la CNFPT, à l’initiative des directeurs généraux des services (DGS) de Mayotte. L’objectif est de tirer les enseignements des épisodes cycloniques Chido et Dikeledi afin de renforcer la préparation et d’améliorer l’aide apportée à la population en cas de nouvelles catastrophes — qu’elles soient cycloniques ou d’une autre nature.

Neuf mois après le passage du cyclone Chido et de la tempête Dikeledi, la délégation mahoraise du Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT), en partenariat avec le réseau des Directeurs Généraux des Services des collectivités locales, a organisé un séminaire intitulé « Crise et résilience : retour d’expérience pour mieux se préparer localement ».

Séminaire, DGS, agents territoriaux, gestion de crise, Chido, Mayotte
La conférence introductive a été réalisée par Ludovic Blay, expert en gestion de crise au sein du cabinet ATRISC.

La première journée s’est tenue ce jeudi 18 septembre au lycée des Lumières de Kawéni et a réuni les DGS, les agents territoriaux et plusieurs partenaires clés de la gestion de crise, tels que les CCAS, le SIDEVAM, le SDIS ou encore le RSMA.

À travers des présentations, des tables rondes et des témoignages, le séminaire permet de revenir sur la gestion du cyclone Chido et de la tempête Dikeledi afin d’identifier ce qui a bien fonctionné, ce qui a manqué et les leçons à tirer. « En réunissant les acteurs locaux, l’idée est de se rappeler ce qui s’est passé avant, pendant et après Chido et Dikeledi, pour préparer dès maintenant la prochaine période cyclonique », souligne Asdjathy Saïd Ali, directrice adjointe en charge de la formation au CNFPT.

« Jusqu’ici, nous n’avions pas pleinement conscience des risques qui nous entouraient. Chido a mis à nu à la fois les vulnérabilités du territoire et les limites des capacités d’action des acteurs, c’est important de pouvoir en discuter. Certes les déchets sont toujours présents, les stigmates de Chido aussi, cela peut paraître précoce d’organiser ce temps d’échanges maintenant, mais il est crucial de mieux se préparer à la suite dès maintenant, pour encaisser les futurs chocs, car ils arriveront ».

A Mayotte une gestion de crise qui repose principalement sur les autorités locales

En attendant la mise en place d’un pont aérien et l’arrivée de l’aide de la métropole et de La Réunion, les acteurs locaux sont au premier rang de la gestion de crise. Ils doivent pouvoir répondre aux besoins urgents de la population.

À Mayotte, la gestion de crise est particulièrement complexe. L’île, éloignée de la métropole et de l’Union européenne, repose sur les autorités locales pour apporter une réponse immédiate. « En métropole, la gestion de crise est structurée et fluide, avec un système pyramidal mobilisant rapidement l’État et l’Union européenne, comme lors des feux de forêt dans le sud. À Mayotte, plusieurs éléments de cette pyramide sont absents, et tout repose sur le local », explique Ludovic Blay, expert en gestion de crise auprès du cabinet ATRISC.

En attendant la création de pont aérien, l’arrivée des renforts, il est primordial que les autorités locales puissent apporter des réponses adaptées à la population. Pour se faire, Ludovic Blay a insisté, devant les DGS, sur l’importance d’avoir un plan communal de sauvegarde (PCS) à jour et efficace pour savoir comment réagir en temps de crise. Un tel document a pour but d’organiser la prévention, la protection et la mise en sécurité de la population et des biens d’une commune face aux risques majeurs et aux situations d’urgence. « Ce plan est fondamental, il n’est pas juste là pour répondre à une obligation légale, il doit pouvoir être utilisé, il doit avoir été testé et approuvé dans le cadre d’exercices, de mises en situation réelles », note Ludovic Blay.

Autre volet important selon l’expert, la prise en charge des spécificités de Mayotte et de sa population. « Les crises amplifient les problèmes sous-jacents de Mayotte, comme la précarité ou encore le manque de confiance de la population, la gestion de crise ne peut pas se faire comme en métropole », précise Ludovic Blay. Des spécificités que connaissent bien les élus locaux, qui sont présents à Mayotte généralement depuis plus longtemps que les représentants de l’Etat à la préfecture, et sur lesquels ils doivent s’appuyer pour mieux orienter et protéger les habitants.

Mieux préparer la prochaine saison cyclonique

Une partie de la population ne s’est pas rendue dans les centres d’hébergement d’urgence au moment des alertes faute de confiance. Une spécificité de Mayotte qu’il faut prendre en compte pour apporter des solutions utiles dans le futur.

Pour mieux anticiper la saison cyclonique, Ludovic Blay a proposé plusieurs mesures : assurer une communication claire et rassurante pour faciliter le confinement dans les refuges, constituer des stocks d’eau potable, de vivres et de chlore, organiser le déblaiement post-crise avec agents et citoyens, former élus et agents à la gestion de crise, multiplier les exercices pratiques de plus en plus complexes et inventorier les PCS et les Plans d’Intervention Communaux (PICS).

« Il est aussi important de capitaliser sur la mémoire collective pour que les familles comprennent les risques et se préparent efficacement », ajoute-t-il, citant l’exemple des indicateurs de crues installés sur les murs des communes après de fortes inondations.

Enfin, il rappelle que « la crise est un événement à part, qui nécessite une organisation adaptée. Il faut aider la population, même lorsque les équipes sont elles-mêmes touchées ou non formées. La gestion de crise, c’est avant tout du bon sens ».

La matinée s’est poursuivi avec une table ronde regroupant plusieurs acteurs dont les DGS de Mamoudzou, de M’tsangamouji, l’adjoint au maire de Sada, mais aussi les représentants du SIDEVAM, du SDIS et du RSMA. Leurs témoignages ont permis de se replonger dans les heures qui ont précédé et qui ont suivi le passage du cyclone Chido, le 14 décembre dernier.

Cyclone, Madagascar, Mayotte, Chido
Avec la saison cyclonique qui approche, les communes sont appelées à revoir leur Plan Communal de Sauvegarde pour organiser la prévention, la protection et la mise en sécurité de la population.

« Il aurait fallu beaucoup mieux anticiper le cyclone, vérifier tous les abris d’urgence, multiplier les moyens de communication avec la population, mettre en place des stocks d’eau, de rations, de bâches, et faire de la formation dans les différents quartiers », confie Ismaël Chakrina, adjoint au maire à la mairie de Sada. « Désormais il faut multiplier les exercices pour se préparer aux cyclones et aux tremblements de terre, mieux intégrer les inégalités dans le plan de gestion, prévoir aussi un plan déchets et un plan pour la santé mentale des habitants ».

« Evènement après évènement, la gestion de crise s’apprend », remarque Ludovic Blay, « mais il faut aussi pouvoir mettre les mots sur ce qui se passe et tirer les leçons, afin d’avoir un minimum de réflexes pour apporter des réponses efficaces lorsque la crise survient ».

Victor Diwisch

Partagez l'article :

Subscribe

spot_imgspot_img

Les plus lus

Publications Similaires
SIMILAIRES

JEP : Usines sucrières, mosquée de Tsingoni… à la découverte des lieux historiques de Mayotte ce week-end

A l’occasion des Journées européennes du patrimoine ce week-end, l’association Profession sport et Loisirs organise de vendredi à dimanche des visites de lieux témoins de l’histoire de Mayotte.

Des centaines de personnes ont répondu à l’appel à la grève de l’intersyndicale ce jeudi

Plusieurs centaines de personnes ont répondu à l'appel à la grève lancé par l’intersyndicale ce jeudi 18 septembre place de la République à Mamoudzou. En fin de matinée, les représentants syndicales se sont rendus en Petite-Terre pour une discussion avec le préfet.

La FMAE labellisée Centre permanent d’initiative pour l’Environnement

C’est au sein du technopôle de Dembéni que la Fédération Mahoraise des Associations Environnementales (FMAE) a été officiellement labellisée CPIE (Centre permanent d’initiative pour l’Environnement), ce jeudi matin, à travers la signature d’une convention. Cette labellisation vient saluer l’engagement de la FMAE et de ses associations adhérentes en faveur de l’environnement et du développement durable à Mayotte.

Le programme des Journées Européennes du Patrimoine ce week-end

À l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine, la CADEMA...