Dimanche 20 juillet 2025, le quartier résidentiel des Manguiers II a été, de nouveau, la cible d’une attaque d’une violence inédite. Plusieurs individus armés ont notamment troué le mur de la maison d’un particulier. Pris en flagrant délit par un gardien, les délinquants n’ont pas fui. Pire : ils ont riposté à la machette, lancé des pierres, arraché des caméras et tenté d’entrer dans plusieurs maisons. Les habitants, paniqués, dénoncent une montée de l’insécurité déjà largement documentée… et ignorée.
Une attaque supplémentaire et une résidence en état de siège

« On a tous sifflé et on est tous sortis », raconte un habitant. Mais cette mobilisation collective n’a pas suffi. Selon plusieurs témoins, les assaillants ont poursuivi leur offensive de façon irrationnelle. Armés de machettes, ils ont jeté des cailloux, tenté de forcer des habitations et ciblé une terrasse où s’étaient réfugiés le gardien et le jardinier. « Ils ne l’ont pas lâché. C’était horrible. Ils lui jetaient des pierres, essayaient d’ouvrir avec la machette », témoigne un voisin.
Pendant ce temps, d’autres familles, prises de panique, ont trouvé refuge dans une maison du quartier. Les caméras de surveillance ont été arrachées. Le mur d’une habitation a été percé.
Un terrain à l’avantage des agresseurs
Le quartier des Manguiers II pâtit non seulement d’un manque d’action, mais il est aussi rendu vulnérable par sa configuration géographique. Depuis plus d’un an, les résidents alertent sur la présence de délinquants installés sur les hauteurs qui surplombent la résidence. Ces positions stratégiques offrent aux intrus une vue dégagée sur l’ensemble du quartier.

« On est constamment surveillés par ces bandits. Ils voient venir la police bien avant nous », confie un riverain. Ce contrôle visuel du territoire facilite des attaques méthodiques et ciblées. Par ailleurs, une clôture en mauvais état sur le flanc de la colline de Tsoundzou 1, signalée dès le mois d’octobre 2024 dans un courrier, puis rappelée dans un nouvel écrit, daté du 19 juin 2025 adressé au Préfet du département, au maire de Mamoudzou et au directeur général de la SIM, constitue une faille supplémentaire. L’absence d’éclairage public accentue encore cette vulnérabilité, faisant du quartier un terrain propice aux incursions nocturnes. « La résidence est plongée dans le noir », soulignent les habitants dans leur lettre.
Selon les résidents, lors de cette intrusion ce dimanche, la police est intervenue vingt-cinq minutes après les premiers appels. « Leur arrivée a été rassurante, mais aucun agresseur n’a été arrêté », déplore un habitant. Un autre témoigne : « Les policiers répètent toujours la même chose : venir ponctuellement ne fait que les faire fuir temporairement. Ces individus ne craignent rien et continueront de revenir. Il faut leur faire peur avec des moyens conséquents ».
Face à cette inaction persistante, les habitants ont élaboré un plan informel recensant les habitations déjà ciblées et celles jugées à risque. Certaines maisons ont été désertées après des cambriolages successifs, d’autres sont considérées comme particulièrement vulnérables. Ce repérage, partagé entre voisins, témoigne d’un effort collectif d’organisation en l’absence de réponse institutionnelle. « Les interventions policières sont inefficaces si personne n’est interpellé », conclut un riverain, exaspéré.
Des alertes ignorées, une confiance brisée

L’attaque du 20 juillet est le point culminant d’un long processus d’alerte resté sans suite. Le 19 juin 2025, les résidents ont adressé un courrier collectif à Ahmed Ali Mondroha, directeur général de la SIM, rappelant une première alerte datant du 29 octobre 2024. Ils y réclamaient la réparation de la clôture et le rétablissement de l’éclairage, alors que cinq nouvelles intrusions avaient été enregistrées entre-temps. « Malgré nos efforts pour financer trois agents de sécurité, nous ne pouvons pas tout gérer seuls », insistaient-ils dans leur lettre.
Le 7 juillet, soit deux semaines avant l’agression, Philippe Messelier, directeur de la gestion locative de la SIM, a accusé réception du courrier : « Je réunirai les personnels concernés et me déplacerai avec eux pour faire un constat. Je vous transmettrai ensuite les travaux à engager ainsi qu’un calendrier prévisionnel ».
À ce jour, aucun agent de la SIM ne s’est rendu sur place, rapportent les habitants. « Aucun voisin n’a constaté la venue promise », déplore un résident. Le courrier adressé le 19 juin dernier, au Préfet du département, au maire de Mamoudzou et au directeur général de la SIM, est resté sans réponse officielle de la part de ces représentants.
Ce silence nourrit un profond sentiment d’abandon institutionnel : « Nous tenons à bout de bras une résidence de plus en plus exposée. Nos familles vivent dans la peur ». Face à cette situation, les habitants réclament désormais une intervention d’envergure, impliquant police, services sociaux et bailleur social, pour restaurer sécurité et dignité dans leur quartier.
Mathilde Hangard