La grande Opération d’Intérêt national (OIN) annoncée à Mayotte depuis plusieurs gouvernements – et on se souvient de la promesse du ministre Carenco en 2023 – va enfin voir le jour. Un décret pris ce 30 juin 2025 en donne les contours.
L’OIN répond à un enjeu d’aménagement d’une urgence telle qu’elle nécessite l’engagement de l’Etat qui y consacre alors des moyens particuliers. Actuellement, elles concernent les travaux relatifs à 24 zones en France, dont l’aménagement des principaux pôles urbains de Guyane.
Chido a semble-t-il, accéléré le processus pour Mayotte puisque l’OIN porte sur le traitement des zones d’habitat informel « identifiées comme prioritaires » après le passage du cyclone le 14 décembre 2024. Les zones concernées par le périmètre de l’OIN sont inscrites aux communes de Dembéni, Koungou et Mamoudzou. Pour mémoire, en 2023, le maire de Mamoudzou indiquait que la surface occupée par les bidonvilles sur sa commune représentait environ 45% des zones construites.
Une ZAD contre l’inflation foncière

Néanmoins, le ministre chargé de l’urbanisme pourra prendre un arrêté pour délimiter des secteurs au sein desquels les communes resteraient compétentes pour délivrer les permis de construire, d’aménager ou de démolir et pour se prononcer sur les projets faisant l’objet d’une déclaration préalable. Une dérogation à l’OIN d’une durée limitée.
Enfin, une zone d’aménagement différé (ZAD) sera créée sur les périmètres de l’OIN « pour préserver la faisabilité foncière et économique des opérations d’aménagement prévues dans le cadre de l’OIN ». C’est l’EPFAM – en cours de mutation vers un large établissement public d’aménagement – qui aura le droit de préemption pendant dix ans.
La ZAD est présentée comme une procédure qui permet aux collectivités bénéficiaires, de s’assurer progressivement de la maîtrise foncière de terrains en vue d’une opération d’aménagement, et ainsi d’éviter que l’annonce de ce projet ne provoque une envolée des prix. On a vu plusieurs projets bloqués à Mayotte, retenues collinaires et autres, par une inflation du foncier, empêchant les réalisations d’intérêt général par l’EPFAM. Un sujet très politique puisque cette préemption est souvent présentée par les propriétaires fonciers comme une atteinte à leurs droits, en témoigne l’éviction récente de l’article 19 du Projet de loi de Programmation pour la Refondation de Mayotte (PLPRM).
Anne Perzo-Lafond