À Mayotte, le Secours populaire ne compte plus les allers-retours : huit missions en douze mois, c’est presque un abonnement fidélité. Mais derrière cette cadence soutenue, une volonté tenace : accompagner les habitants après les catastrophes successives et soutenir un tissu associatif parfois épuisé mais déterminé.
Le 13 décembre prochain, l’organisation organise une journée « Vacances de Ouf à Mayotte » histoire de rappeler que l’île ne se résume ni à ses problèmes, ni à ses ruines, et que les enfants, eux, n’ont pas renoncé à retrouver le goût du rire.
Après Chido, reconstruction des possibles

Lorsque Chido a balayé Mayotte il y a un an, le 14 décembre 2024, entraînant dans son sillage inondations, destructions et une précarité renforcée, le Secours populaire a été l’une des premières organisations à se mobiliser. Collectes, acheminements de matériel, soutien aux associations locales : une mécanique solidaire désormais rodée.
Depuis, les équipes sont revenues sept fois pour structurer une réponse durable. Leur huitième mission, conduite par une délégation nationale composée de Danielle Alexandre, Christian Causse, Corinne Makowski et Michaël Pozo, doit permettre d’évaluer les besoins, consolider les projets lancés et ouvrir de nouveaux partenariats dans l’océan Indien.
Au menu : santé de proximité, lutte contre les maladies hydriques, accès à l’eau potable (750 filtres distribués à Kaweni en novembre dernier), permettant à 5 000 personnes de boire sainement, mais aussi réouverture d’espaces éducatifs. L’école Gnumba ya Wanatsa, spécialement destinée aux enfants non scolarisés, a repris vie pour offrir remise à niveau, accompagnement et réintégration progressive dans le système scolaire. Une brèche de stabilité dans un quotidien souvent incertain.
Le pouvoir des sourires
Le 13 décembre, la plage Musicale de Bandrélé se transformera en gigantesque cour de récréation à ciel ouvert. Plus de 500 enfants, venus de Mayotte, de La Réunion et de Madagascar, s’y retrouveront pour une journée de loisirs qui a tout d’un antidote aux mois de chaos passés.
Au programme dès 9 heures du matin : beach-volley, football, aquagym, paddle, kayak, plongée avec palmes et tuba, trampoline géant, châteaux gonflables… La liste ressemble à celle d’un catalogue de vacances, sauf qu’ici la récré a un supplément d’âme. Entre deux plongeons, les enfants participeront à des ateliers de sensibilisation à l’environnement, à la santé, à l’eau et même à l’insertion professionnelle, parce qu’on peut très bien apprendre en t-shirt mouillé. Un pique-nique partagé scellera ce vivre-ensemble tant chahuté sur l’île. Puis un concert d’artistes locaux clôturera la journée, comme une façon d’ancrer la fête dans le territoire.
Une île qui veut réinventer son avenir

Car au-delà de cette parenthèse festive, l’enjeu est bien là : montrer un autre visage de Mayotte. Celui d’une population éprouvée par les difficultés mais digne, d’un tissu associatif combatif, d’initiatives qui fleurissent malgré, parfois des obstacles et des vents contraires.
Les projets soutenus par le Secours populaire s’inscrivent dans cette logique : accompagner des agriculteurs dans la relance de leurs cultures (bananiers notamment), déployer un « Sport’bus » pour proposer des activités aux jeunes en errance, ou encore soutenir les traditionnelles opérations des Pères Noël verts ce mois de décembre.
Un an après Chido, la reconstruction matérielle avance, lentement. La reconstruction symbolique, elle, se joue aussi dans des moments comme ces « Vacances de Ouf ». Un rappel que l’île ne se définit pas seulement par ses crises mais par sa capacité à inventer des réponses collectives. Et peut-être, comme les enfants le feront sur la plage de Bandrélé, à prendre une grande inspiration et replonger vers des jours meilleurs.
Mathilde Hangard


