À Ongojou, des classes paisibles dans un décor de chantier inachevé

À Ongojou, les écoles restent ouvertes dans un calme trompeur : derrière les murs repeints, la boue, les câbles et l’abandon persistent.

À Ongojou, commune de Dembéni, les écoles maternelle et élémentaire ont rouvert après les vacances d’octobre dans un calme trompeur. Les classes semblent paisibles, les enfants attentifs, les enseignants à leur poste.

Mais les bâtiments fragilisés par le cyclone Chido, survenu le 14 décembre 2024, sont loin d’avoir été réparés. Fenêtres brisées, boue omniprésente, câbles électriques pendants, sanitaires insalubres : un an après la catastrophe, le chantier reste inachevé. Et la saison des pluies approchant à grande vitesse, chaque recoin de ces écoles devient un risque pour les élèves et le personnel.

Le calme trompeur de l’école maternelle

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Les enfants sont accueillis par rotations de classes le matin ou l’après-midi.

À la maternelle, le silence des classes jure avec le chaos qui règne dehors. Les enfants de trois à cinq ans écoutent attentivement les enseignants, immobiles sur leurs bancs, tandis que la cour ressemble à un champ de boue, parsemé de flaques stagnantes et de cailloux laissés par les travaux inachevés. À l’entrée, des parpaings trônent comme des vestiges menaçants : « Après, les voyous vont les prendre et se taper dessus », s’inquiète un parent.

Les fenêtres sont brisées ou maintenues par du scotch, les murs lézardés, et des câbles électriques pendent des plafonds ou courent le long des couloirs. Certains longent même les fenêtres, à portée des enseignants. Les sanitaires extérieurs sont glissants, boueux et impraticables.

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Une gouttière coule à proximité d’une installation électrique.

Sarfati Houmadi, présidente du Collectif « Ongojou Uni », dénonce « des travaux ne sont pas terminés, il y a des câbles partout, les fenêtres n’ont pas été réparées, ce n’est pas sérieux ».

Avec la saison des pluies qui approche, chaque flaque menace de devenir un piège, chaque câble exposé un danger immédiat. « Regardez l’eau qui coule près du réseau électrique », alerte un parent d’élève.

Une cour de chantier à l’école élémentaire

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Un container dans la cour de récréation de l’école élémentaire.

À l’école élémentaire, même contraste saisissant. Les classes repeintes et rénovées au centre de l’établissement donnent l’illusion d’un lieu sûr et accueillant. Mais dehors, le décor bascule : la poussière recouvre murs et sols, les grillages troués laissent passer n’importe qui, un container rouillé trône au milieu de la cour, et des rigoles d’eau stagnante, parfois couvertes de mousse, transforment certaines zones en véritables pièges glissants, et les sanitaires sont inondés.

Fatima, mère de deux élèves, regarde les enfants dans l’école avec appréhension. « Les chats défèquent dans l’école, la clôture est si basse que n’importe qui peut entrer ».

L’école raconte ainsi une autre histoire : celle d’un bricolage sans fin où l’abandon s’est installé comme une habitude.

Des alertes ignorées

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Dans la cour, un grillage, une bâche déchirée, de la poussière, des déchets et des rigoles d’eau composent un décor de fortune.

La situation ne date pas d’hier. Le 25 août 2025, les parents d’élèves d’Ongojou avaient choisi de frapper un grand coup : une journée « école morte » pour dénoncer l’état désastreux des établissements. Le « Collectif Ongojou Uni » réclamait alors des engagements clairs, un calendrier, des réponses.

Deux mois plus tard, le décor n’a pas tant changé. Quelques classes peintes, des vitres colmatées à la planche, un raccordement électrique bricolé, les locaux techniques tiennent à bout de fil, les sanitaires sont vétustes, et la cour ruisselle dès la première averse.

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Des élèves à la sortie de l’école élémentaire.

Sollicitée à plusieurs reprises, la mairie n’a pas répondu à nos demandes, pour plus de précisions sur l’état d’avancement de ces travaux. « À Ongojou, on est abandonné, on passe toujours après les autres villages de la commune », déplore encore Sarfati.

Près d’un après le cyclone Chido, à la veille de la saison des pluies, la promesse de réparer semble dissoute dans la gadoue. Ici, le provisoire est devenu pérenne, et les enfants, eux, n’auront qu’à se contenter du « magnégné ».

Mathilde Hangard

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