C’est avec sa casquette de reporter, et non comme député de la nation et encore moins en tant que membre (ou ex membre ?) du groupe la France insoumise, que l’ancien journaliste, François Ruffin, a décidé de venir à Mayotte. « J’avais la volonté de venir en tant que reporter afin d’être d’abord une oreille pour entendre la situation des gens sur place dans un objectif de rencontres, et après être éventuellement une voix à l’Assemblée nationale ou lors de meetings », nous a-t-il dit. En tournée dans les Outre-mer, le député de la Somme s’est rendu au printemps dernier en Guadeloupe et en Martinique, il se rendra cette semaine à La Réunion et souhaite, d’ici la fin de l’année, aller en Nouvelle Calédonie et en Guyane.
« Il faut surinvestir dans l’éducation »
Durant sa visite de 4 jours, François Ruffin a rencontré pas mal de monde dont notamment des personnes travaillant dans le bâtiment, ainsi que des soignants, des agriculteurs, des cadres, ou encore des magistrats, et ce qui l’a frappé c’est la question de l’éducation. « Je crois que c’est la première fois où les gens me parlent autant de l’éducation, nous explique-t-il. Je pense qu’il y a une grande attente concernant ce sujet, c’est une question centrale dans la mesure où elle interroge sur l’avenir de la jeunesse mahoraise ».

Pour lui, l’État a fait le choix de sous-investir dans ce domaine sur ce territoire et déplore que la loi pour la refondation de Mayotte, votée récemment par le Parlement, ne prenne pas ce sujet à bras-le-corps. « Dans cette loi la question de l’éducation est abordée dans les annexes alors que c’est un sujet central !? La fin des rotations est prévue pour 2031… Mais qui croit à une promesse qui se projette aussi loin ?! C’est contre le principe républicain ». Pour le député, la promesse républicaine de l’égalité dans l’accès à l’éducation pour tous n’est pas respectée. « C’est un choix d’abandon… il faudrait surinvestir dans l’éducation à Mayotte alors qu’en fait on sous-investit. Ce choix de sous-investissement n’est absolument pas normal ! ». Quant à l’argument selon lequel cela pourrait créer un appel d’air, François Ruffin considère que « c’est un mauvais calcul… Mayotte c’est la maternité de la France, il faut donc investir massivement dans l’éducation », plaide-t-il.
Et il va même plus loin concernant les bacheliers du territoire. « Il faudrait offrir aux bacheliers, quel que soit leur nationalité, la possibilité de poursuivre leurs études en métropole », tout en ajoutant que concernant la fin du titre de séjour territorialisé, prévue en 2031, il « ne souhaite pas pour autant son accélération ».

Il prône, par ailleurs, pour un véritable relèvement du niveau scolaire avec « un vrai bac » pour que les néo-bacheliers mahorais ne soient pas en échec dans la poursuite de leurs études une fois en métropole. « J’ai ressenti par moment un sentiment de frustration car on ne leur propose pas d’ouverture, ni un avenir meilleur. Je le redis : l’éducation doit être la priorité, l’État doit faire beaucoup et investir massivement car c’est un département très jeune. Il faut ainsi offrir des débouchés, des formations, mais aussi développer des filières professionnels », insiste-t-il.
Durant les quelques jours passé dans l’île au lagon François Ruffin a beaucoup échangé, fait de nombreuses rencontres, et a été impressionné par l’énergie des habitants en dépit du passage de Chido qui a détruit bons nombres de secteurs économiques de l’île. « J’ai été très touché… Il faut de l’aide certes, mais aussi trouver les énergies… Il y a de l’espoir car il y a la volonté de s’organiser pour reconstruire quelque chose ».
B.J.